Des reportages sur Walt Disney, il y en a eu beaucoup, mais le plus souvent pour vanter les qualités plus ou moins fictives de l’homme à travers une œuvre qu’il a porté à bout de bras tout au long de sa vie. Visionnaire évident, raconteur instinctif d’histoire, le grand Walt Disney avait une vision avant-gardiste de son art et voulait en permanence le pousser au plus loin de ses possibilités. D’un petit animateur passionné, et inspiré des aventures de Felix Le chat, le fondateur de l’un des studios les plus puissants de la planète aimait autant prendre des risques, tant il croyait à son instinct, que de donner vie à ses idées et à sa vision d’une société qu’il voulait idéale.
Mais pour construire un empire tel que Disney, il ne faut pas être un saint. C’est l’un de ses animateurs qui le dit lui-même et à juste titre. Alors le documentaire de Sarah Colt s’intéresse également au côté sombre du personnage, figure autoritaire de l’ensemble de ses collaborateurs, avare de compliment, impulsif et n’hésitant pas à fustiger ceux qui n’allaient pas dans son sens, particulièrement lorsque son idéal est mis à mal par les revendications de syndicalistes déterminés à imposer une égalité de traitement dans un monde qu’il a créé de toute pièce.
Et loin d’écorner l’image de celui qui révolutionna l’animation, qui lui donna toutes ses lettres de noblesses et qui changea pour des millions de personnes à travers le monde la conception d'un parc d’attraction, le reportage lui donne toute la nuance qui lui était propre et qu’il s’amusait à résumer en une phrase : « Je ne suis pas l’oncle Walt de la télévision, car l’oncle Walt ne boit pas et ne fume pas alors que moi si ! »
On aura dit beaucoup de choses sur Walt Disney, mais en regardant ce reportage, on comprend très rapidement que ce dernier avait une vision que le faisait chaque fois aller plus loin et que ceux qui le contredisaient étaient écartés de sa route. Loin d’être un anti syndicaliste militant, l’homme semble avoir vécu les manifestations dans son studio comme une trahison face au paradis qu’il pensait avoir créé pour ses employés. Et la chasse aux communistes des années noires d’Hollywood plongea un peu plus l’homme dans les envies de vengeance de ceux qui avaient osé lui tourner le dos.
Réparti en deux parties, le documentaire « Walt Disney l’enchanteur » a l’intelligence d’opposer les deux facettes de l’homme et de son œuvre sans pour autant le trahir. Elle lui donne toute la nuance nécessaire et finit, dans tous les cas de figure par lui rendre le plus bel hommage que l’on puisse faire à un tel génie du divertissement. On y voit un homme peu habité par le doute, mais dont les risques pris ont donné des sueurs froides à ses collaborateurs et à ses financiers. Un homme qui apprit chaque fois à rebondir et à garder les leçons du passé. Un documentaire passionnant à voir et revoir pour mieux comprendre l’œuvre du studio.