Une Anthologie d’énigmes historiques sous forme de fictions, jouées par une éblouissante distribution issue de la comédie Française et présentées par André Castelot et Alain Decaux.
On l’oublie maintenant devant des documentaires, un peu mièvres et condescendants, s’intéressant plus à l’intimité sous la couette (pour peu qu’elle soit un peu croustillante !) dirigés par Stéphane Bern, mais l’histoire avec un grand H avait une place importante à la télévision. A une époque où tout était encore à créer, où chacun essuyait les plâtres de programmes à faire durer ou non, mais surtout destinés à faire entrer les grandes épopées ou les grandes énigmes de l’Histoire de France, avec une volonté réelle de susciter le débat et surtout de rendre un hommage appuyé avec passion aux hommes et aux femmes qui ont écrit les grandes lignes de notre pays.
« La Caméra explore le Temps », qui fut diffusée de 1957 à 1966, fut l’occasion pour les deux historiens de faire découvrir, ou dans le pire de cas, de lever un voile de spécialistes et passionnés sur ce qui a pu provoquer le débat ou soulever la controverse. Ainsi, dans ce premier volume, l’Ina nous propose de découvrir, les premières énigmes traitées par les deux illustres spécialistes, qui n’hésitent d’ailleurs pas à se contredire dans un petit débat d’ouverture.
Que ce soit la liaison tumultueuse qui souleva bien des débats entre Napoléon et la belle « Marie Walewska », qui donna naissance à Alexandre futur ministre des affaires étrangères de Napoléon III, et suscita la controverse sur le rôle qu’elle joua dans le futur de l’empereur, « Le sacrifice de Madame De Lavalette » qui prit la place de son mari dans les geôles de la conciergerie, « Kaspard Hauser » surnommé l’orphelin de l’Europe, dont on dit qu’il était de naissance royal mais fut abandonné pour répondre aux desseins d’un autre, « Le mystérieux enlèvement du Sénateur Clément de Ris » qui fut certainement la première bavure judiciaire reconnue officiellement, ou encore « L’exécution du Duc d’Enghien » dont les raisons restent encore obscures tant elles semblent liées aux ambitions du futur Napoléon Bonaparte.
Servi par une distribution de qualité directement venue des planches de la Comédie Française, le programme relève, effectivement d’un classicisme qui peut se révéler repoussant, comme dans la fiction reprenant la relation entre Marie Walewska et Napoléon, avec de grandes tirades et des postures de tragédie, pourtant, il est difficile de ne pas se laisser embarquer par une reconstitution minutieusement travaillée avec des faits (pour l’époque) validée ou controversée par les élites historiennes du pays et une volonté évidente de rendre accessible l’histoire et de susciter par ailleurs le débat.
Côté distribution, les grands noms de la comédie française se succèdent dans les rôles de ces illustres personnages aux destinées tragiques ou pas : Michel Piccoli (Les choses de la vie), Jean-Pierre Marielle (Les galettes de Pont-Aven), Georges Wilson (Mesrine L’ennemi Public N°1), Jean Rochefort (Ridicule), Georges Descrières (Arsène Lupin) ou encore Michel Bouquet (Renoir). Avec une évidente volonté de rendre toute la dimension nécessaires à leurs personnages, les acteurs ne ménagent pas leur efforts pour incarner des êtres tourmentés et charismatiques.
En conclusion, « la caméra explore le temps » est encore un programme qui nous fait dire : « La télévision c’était quand même mieux avant ». Moins aseptisée, moins voyeuriste, plus culturelle et surtout jamais avare d’expérimentations nouvelles, la télévision des années 50-60 nous embarquait dans des émissions, un peu austère, parfois académiques et tragiques, mais avec une véritable volonté de faire entrer les grands moments de l’histoire dans tous les foyers.