Début du XXe siècle, dans le nord de l’Italie, à Ughettera, berceau de la famille Ughetto. La vie dans cette région étant devenue très difficile, les Ughetto rêvent de tout recommencer à l’étranger. Selon la légende, Luigi Ughetto traverse alors les Alpes et entame une nouvelle vie en France, changeant à jamais le destin de sa famille tant aimée. Son petit-fils retrace ici leur histoire.
Voilà un projet qui ne manque pas à la fois d’originalité et d’intérêt. Un film qui part d’abord d’une envie du réalisateur de lever un voile sur une histoire de famille que son père racontait à table sur un village dans le Piémont Italien qui s’appelle Ugheterra et où tous les habitants portent le même nom de famille que le réalisateur : Ughetto. Pendant 9 années, Alain Ughetto va alors enquêter, retourner sur la terre de ses racines, partir à la recherche de ce passé de la famille, de ce qui a fait qu’un jour ils sont arrivés en France et ce qu’il a fallu come courage et comme détermination à ces hommes et à ces femmes pour fuir leur pays et venir s’installer dans un pays qui n’avait pas forcément envie de les recevoir et d’être tende avec eux.
Comme un hommage à ces exilés économiques et politiques ensuite, qui veulent fuir le fascisme de Mussolini et la misère d’un pays qui ne parvient plus à nourrir leurs espoirs. Nous pouvons toujours faire un parallèle avec notre société actuelle, mais Alain Ughetto, qui a signé le scénario avec Alexis Galmot (Tout Là-Haut) et Anne Paschetta (A ciel Ouvert) cherche, avant tout, à rendre hommage à ces hommes et ces femmes qui ont fondés une famille et se sont battus avec courage pour en assurer la survie. Construit comme un dialogua avec sa grand-mère disparue, le film lève un voile sur les conditions difficiles de ces familles déracinées et parvient avec beaucoup de subtilité et de tendresse à nous décrire cette défiance et cette incompréhension qui pouvaient exister entre les Italiens et les Français qui n’hésitaient pas à rappeler si cela était nécessaire, à grand renfort de quolibets, qu’ils n’étaient pas dans leur pays.
Parti, comme en pèlerinage sur les terres de ses ancêtres, le réalisateur en a ramassé des objets qui faisaient leur quotidien, comme du charbon de bois, des châtaignes, etc… et en a créé un décor qu’il a ensuite intégré à son histoire. Une excellente idée qui donne une texture particulière à son œuvre d’animation. Car ce qui surprend de prime à abord, ce sont les douceurs qui s’émanent des environnements et des personnages, dans une histoire où la violence est permanente. Et d’ailleurs le scénario ne va jamais dans l’accusation gratuite, mais garde une distance avec tout cela, pour coller au plus) l’état d’esprit des personnages qui lui ont inspiré l’histoire. La mise en scène s’amuse à jouer l’interaction entre les personnages fictifs et le réalisateur lui-même pour mieux souligner la filiation entre Alain Ughetto et sa grand-mère.
« Interdits aux Chiens et aux Italiens » est un film d’animation d’une rare intelligence, qui permets de plonger ans une partie de notre histoire que nous tentons de cacher par honte ou par manque de courage, mais que la réalité de notre société vient toutefois nous rappeler. Celle d’un pays qui se revendique comme une terre d’Asile, mais qui n’hésite jamais à rappeler aux migrants leurs places et oublie qu’ils ont également participé à la construction du pays.