Un biopic consacré à la chanteuse Nina Simone.
Dans l’univers des biopics, le chemin était le plus souvent balisé par une sacrosainte écriture qui reprenait la naissance, la vie l’œuvre et pour finir la mort du personnage célèbre. Et puis il y eu quelques ovnis bien sentis qui ouvraient du coup le champ des possibles, avec une approche plus en phase avec le personnage, son influence ou son travail : « The Doors » d’Oliver Stone, « Gainsbourg vie héroïque » de Joan Sfar. 2017 semble être une année charnière pour cet art si singulier que celui de raconter la vie d’une célébrité sans pour autant ennuyer l’audience ni trahir son sujet. Après le « Barbara » de Mathieu Amalric sur l’immense chanteuse en habit noir ou encore « Le Redoutable » de Michel Hazanavicius sur Jean Luc Godard, la réalisatrice Cynthia Mort (A Vif) nous invite à découvrir une icône du Jazz, à la fois chanteuse, mais aussi militante pour les droits civiques : Nina Simone.
Et en cela le film annoncé est une excellente tant l’artiste en elle-même valait un biopic ne serait-ce que pour son incroyable talent autant que pour ses combats, sans, bien sûr oublier ses fêlures qui le rendirent si difficile à cerner et si passionnante. Mais voilà la réalisatrice, qui a également signé le scénario, déroute d’emblée le spectateur en n’offrant pas une vision générale de l’artiste ou de la femme mais en passant en revue sa carrière, par le prisme de sa maladie mentale, tardivement diagnostiquée. Et cela aurait pu être une excellente idée, si elle ne venait pas cannibaliser toute la biographie de la chanteuse qui apparaît, d’un seul coup, résumée à une seule pathologie. Ajoutez à cela l’alcoolisme dont souffrait l’artiste et on comprend très vite que la biographie de la grande Nina Simone va très rapidement rater sa cible.
Car avant d’être une artiste rongée par ses addictions et par une pathologie mentale qui la fera s’isoler du monde et de la musique, Nina Simone s’était une voix chaude, hypnotisante dés les premières notes. Une sonorité rauque et une sensibilité à fleur de peau qui nous faisait dresser les poils sur les bras. Nina Simone s’était également une militante active pour la défense des droits civiques. Un combat qu’elle vivait avec passion, étant elle-même victime de la suprématie blanche qui la privait d’une part de son salaire. Elle participera à la marche de Selma où elle prendra la parole, elle intégrera dans ses chansons toute cette lutte vitale pour une égalité qu’on lui refuse, comme avec ses chansons « Mississipi Goddam » qu’elle écrivit suite à de terribles drames raciaux, une chanson qui boycottée dans le sud des Etats-Unis, ou encore « Old Jim Crow » en réaction aux lois Jim crow, celles qui décrétaient qu’il devait y avoir une séparation de traitement en fonction de la race dans les espaces publiques.
Dans la biographie de Nina Simone que nous propose Cynthia Mort, tout cela est survolé parla biais de flash-back, mais ce procédé ne parvient pas à nous faire plonger dans l’univers complexe de la chanteuse militante, et ne nous laisse qu’un bout de vie, triste, pathétique, mais que le respect et l’amour d’un nouvel assistant va venir sauver jusqu’aux ultimes moments d’une existence riche en perturbations et en combats en tout genre. Cet amour sobre, qui vient illustrer, pourtant, tout ce qui manquait à la star, ne parvient toutefois pas à nos en faire toucher toutes les nuances. Est-ce que Nina Simone méritait de n’être résumée qu’aux dernières années de sa vie, celles où le mentale ne parvenait plus à être contrôlé, ou l’alcool avait fait son funeste ravage puis une ultime maladie qui vint faire taire cette voix magnifique qui nous offrit des morceaux magnifiques et ancrés dans nos esprits tels que « I’m Feeling Good », « My Baby just Cares for me » ou encore « Mississipi Goddam ».
Seule l’interprétation inspirée pour ne pas dire habitée de Zoé Saldana (Les Gardiens de la galaxie) qui est également productrice de ce biopic vient le sauver du désastre. Car l’actrice semble avoir laissé l’esprit de Nina Simone l’envahir et nous ressentir toute cette nuance, cette dualité qui habitait l’artiste de jazz.
En conclusion, « Nina » aurait pu rendre hommage à l’une des chanteuses noires les plus marquantes de la musique Jazz. Marquante par son talent, par sa voix suave et envoutante, mais également pour ses combats qu’elle mena contre des inégalités inacceptables, qui semblent pourtant encore présente de nos jours aux Etats-Unis.