À 17 ans, Zahia Ziouani rêve de devenir cheffe d’orchestre. Sa sœur jumelle, Fettouma, violoncelliste professionnelle. Bercées depuis leur plus tendre enfance par la musique symphonique classique, elles souhaitent à leur tour la rendre accessible à tous et dans tous les territoires. Alors comment peut-on accomplir ces rêves si ambitieux en 1995 quand on est une femme, d’origine algérienne et qu’on vient de Seine-Saint-Denis ? Avec détermination, passion, courage et surtout le projet incroyable de créer leur propre orchestre : Divertimento.
Voici un film que l’on aimerait aimer sans aucune forme de restriction. Tant le sujet est passionnant et porteur d’espoir, celui d’une cheffe d’orchestre et de sa sœur violoncelliste, venues de banlieue qui vont se battre, surtout la première pour trouver leur place dans un monde particulièrement élitiste des musiciens d’orchestre symphonique et de la direction de ces formations souvent gardée jalousement par des hommes. Un scénario inspiré d’une histoire vraie qui force le respect, car les deux jeunes femmes ne vont pas se contenter de vivre confortablement dans le sillon de la réussite de leurs carrières respectives, elles vont, au contraire, le partager avec le plus grand nombre et particulièrement les milieux les plus défavorisés et ayant le moins d’accès à la musique classique, telle qu’on la voit dans les théâtres.
Et si le scénario de la réalisatrice Marie-Castille Mention-Schaar (A Good Man) et Clara Bourreau (Le Paradis) suit le parcours avec une véritable empathie pour les deux sœurs et leur parcours compliqué du fait de venir de la banlieue et surtout pour Zahia d’être une femme à la direction d’orchestre, une hérésie pour les plus conservateurs des musiciens. Ecrit avec beaucoup de sensibilité, le scénario se focalise beaucoup sur la difficulté d’une femme d’évoluer dans ce monde, mais a tendance à occulte les rapports difficiles parfois que les jeunes des quartiers populaires peuvent avoir avec les musiques classiques, ou encore, ce qui peut paraître le plus intéressant, l’amour de la famille des ces deux filles qui sont entourées de bienveillance et d’un père qui leur communique un amour du classique. Ces parties son reléguées au second plan alors qu’elles sont l’essence même de leur parcours et certainement les éléments déclencheurs de cette envie de partager avec ceux qui en ont le moins la possibilité, l’amour de la musique et de ces instruments parfois difficiles à dompter.
Et d’ailleurs la mise en scène de Marie-Castille Mention-Schaar, si elle est précise va se concentrer sur parcours hautement symbolique, dans la peinture de ce combat que les femmes doivent mener pour accéder à la réussite de leurs ambitions, mais manque pourtant d’un regard plus attentionné sur cet environnement paradoxal entre l’élitisme d’un orchestre et la popularité de leur quartier. Car, els deux sœurs ont créé « Divertimento », grâce ou à cause de cet environnement qui leur a appris le partage et la curiosité sur des mondes qu’ils pensent inaccessibles et que les deux sœurs ont su rendre à ceux.
Et c’est d’ailleurs dans la direction d’acteurs que le film a le plus de mal à toucher sa cible. Car, la réalisatrice semble avoir laissé ses acteurs, et ces derniers manquent parfois trop souvent de justesse, à commencer par les deux actrices principales : Oulaya Amamra (Fumer fait tousser) et Line El Arabi (Family Business) qui manque cruellement de précision dans leurs jeux qui viennent souvent se percuter à la justesse clinique d’un Niels Arestrup (Un Prophète), décidemment intouchable dans sa qualité de jeu. « Divertimento » reste, néanmoins, un film intéressant à découvrir pour la qualité de son sujet et surtout pour toujours se rappeler que les quartiers des banlieues, ce n’est pas que la misère, la drogue et la violence, c’est aussi l’espoir, le partage et la valeur des choses. C’est aussi là que les femmes trouvent la force de s’opposer aux préjugés.