Alger. Houria est une jeune et talentueuse danseuse. Femme de ménage le jour, elle participe à des paris clandestins la nuit. Mais un soir où elle a gagné gros, elle est violemment agressée par Ali et se retrouve à l’hôpital. Ses rêves de carrière de ballerine s’envolent. Elle doit alors accepter et aimer son nouveau corps. Entourée d’une communauté de femmes, Houria va retrouver un sens à sa vie en inscrivant la danse dans la reconstruction et sublimation des corps blessés…
Venue du documentaire, la réalisatrice Mounia Meddour aime regarder la société Algérienne, avec tendresse et avec vérité. Elle sait faire paraître la beauté, les rires, les couleurs et les unions qui font briller cette société d’un pays où les traditions et le patriarcat sont encore très présents. A travers le regard de cette jeune danseuse, aux projets bien dessinés, mais qui va subir une grave agression, la rendant handicapé et mettant fin a ses rêves, la réalisatrice nous parle de ces femmes qui tiennent debout malgré la pression d’une société qui ne leur fait pas de cadeau, et surtout Mounia Meddour brosse les portraits de ces femmes brisées, cassées par la vie et par ses accidents qui doivent alors se reconstruire, souvent seules et où la solidarité entre elles reste la clé de voute de leur renaissance et de leur force.
Avec une véritable force d’écriture et une vision précise de cette société en mouvement constant, la réalisatrice ne va pas chercher a appuyer le trait plus de raison, mais va au contraire, construire une intrigue où la danse vient illustrer à merveille cette renaissance, cette exutoire aussi de toutes les souffrances et de tous les espoirs mis à mal. Jamais dans le pathos gratuit, la réalisatrice signe un scénario touchant qui lève un voile sur un sujet que l’on ne veut pas regarder en face de notre côté de la Méditerranée mais encore moins de l’autre côté. Avec une simplicité et une force, l’histoire approche en une seule intrigue bien des sujets : L’espoir d’une vie meilleure dans la migration vers l’Europe, le terrorisme et la manière dont le gouvernement le traite, la solidarité, l’espoir, les rêves et surtout la détermination à toucher ses rêves. Car c’est bien de cela que la réalisatrice veut parler à travers chacun de ses personnages : Le rêve et l’espoir d’une vie meilleure.
Et sa mise en scène va d’ailleurs suivre cette ligne de conduite. Car sans être renversante, même parfois maladroite, comme la scène de l’agression, dont la conclusion est un peu brouillonne, Mounia Meddour va s’approcher au plus près des corps dans des chorégraphies où se mêlent l’Orient et l’Occident, mais où se mélangent également la beauté et la souffrance, la détermination et les obstacles. Les plus beaux moments dans la mise en scène de la réalisatrice restent ces chorégraphies, où la caméra vient chercher quelque chose, un regard, une posture ou simplement une sensation qu’elle n’aurait pas obtenue si la chorégraphie avait été faite pour la caméra et non l’inverse.
Et puis il y a les actrices ! A commencer par Lyna Khoudri (Les 3 Mousquetaires) qui, une nouvelle fois touche par sa fragilité, sa force et surtout son magnétisme qui ne cesse, de rôle en rôle de nous embarquer, de nous toucher en plein cœur et de nous émouvoir. Face à elle Rachida Brakni (Baron Noir) impose un jeu plus strict, plus en violence et en révolte tout en laissant poindre des notes de désillusions et de renoncement, sans pour autant, vouloir laisser tomber sa fille. « Houria » est un film touchant, qui donne pourtant espoir à toutes ces femmes qui subissent la pression d’une société patriarcale. Jamais dans la caricature ou dans l’outrance, la réalisatrice signe, ici, un chant d’amour à ces femmes qui luttent pour leurs rêves et à une société Algérienne qui n’a rien à voir avec la caricature que l’on veut lui coller en étiquette.