Khédidja travaille pour une famille parisienne aisée qui lui propose de s'occuper des enfants le temps d’un été en Corse. L'opportunité pour elle de retourner avec ses filles, Jessica et Farah, sur cette île qu'elles ont quittée quinze ans plus tôt dans des circonstances tragiques. Alors que Khédidja se débat avec ses souvenirs, les deux adolescentes se laissent aller à toutes les tentations estivales : rencontres inattendues, 400 coups, premières expériences amoureuses. Ce voyage sera l'occasion pour elles de découvrir une partie cachée de leur histoire.
Nous allons passer très vite sur le scandale qui précéda le film de la réalisatrice Catherine Corsini : « Le Retour », outre des faits de Harcèlement concernant la réalisatrice et deux de ses collaborateurs, la polémique enfla surtout en raison d’une scène dans laquelle une jeune femme, interprétée par une actrice de 15 ans et demi, s’éveillait à la sexualité au travers d’une scène de masturbation. Une scène dont la loi encadre strictement le tournage et qui n’aurait pas été faite en conformité, infligeant ainsi à la production d’environ 680 000€ d’amendes (580 000 € d’avances sur recettes et 100 000€ de soutien automatique). Une sanction qui fut bien sûr contestée par la réalisatrice et la production, d’autant que la scène en question, ne fut pas intégrée au montage final.
Passons ce débat, et intéressons-nous au film à proprement parlé. Il y a beaucoup de choses dans un film de la Catherine Corsini, des inspirations personnelles et un goût pour mettre en lumière, sans forcer le trait au besoin, de mettre au cœur de son intrigue des sujets comme la différence, l’intégration et la place que chacun doit trouver, particulièrement dans une jeunesse qui cherche constamment sa place pour se construire. Dans « Le retour » , nous retrouvons tout cela. Sur un scénario qu’elle a écrit avec Naïla Guiguet (La Montagne), la réalisatrice et sa co-scénariste ont puisé dans leurs propres existences pour y mettre leurs propres fêlures dans leurs personnages : la mort d’un des deux parents, durant la jeunesse et du coup, ce manque à la construction de la personnalité mais également cette absence qui forge les caractères dans le bon ou dans le mauvais sens, mais qui laisse toujours une blessure indélébile.
Avec un sens de la narration et de la mise en scène, la réalisatrice nous entraine, avec parfois des caricatures d’usage qui ne donne pas forcément une bonne idée de la population Corse, mais elle s’en défend en expliquant qu’elle-même est Corse et que cela pourrait être une sorte d’autocritique. Ici, nous suivons le parcours de deux adolescentes revenues du continent, après que leur mère ait quitté la Corse bien des années auparavant alors qu’elles étaient enfants, et que leur père est mort dans un accident de voiture. Une Corse où la mère ne s’est jamais sentie chez elle, même après son mariage. La réalisatrice signe une mise en scène dynamique qui suit au plus près ses personnages pour voir leurs évolutions entre rébellion et besoin d’intégration. Ce qui est in intéressant c’est l’utilisation du plan large noyant presque les personnages, lorsqu’elle filme la famille Corse pour laquelle Khédidja va travailler, alors qu’elle ressert le plan, sur les visages et sur les jeunes gens et sur Khédidja elle-même, comme pour mieux marquer cette distance et ces non-dits qui l’ont fait fuir. Le propos étant de suivre cette jeunesse, la réalisatrice, les fait évoluer de toutes les manières possibles, y compris dans une soirée qui tourne au désastre, mais où chacun se découvre réellement et se révèle enfin.
Loin de toute polémique, « Le Retour » est avant un film sur la jeunesse, la découverte de soi, et le retour qui se fait à travers les enfants qui ont besoin de connaître leurs racines pour se construire, qu’elles soient faites de malentendus ou d’assurance. Les actrices à commencer par Aïssatou Diallo Sagna (La Fracture) sont remarquables et touchantes de précision. Suzie Bemba (L’Opéra), trouve ici un rôle à la hauteur de son talent qui ne cherche qu’à s’exposer encore plus. Esther Gohourou, que l’on avait pu découvrir dans le film « Mignonnes » de Maïmouna Doucouré, apparaît ici plus précise et plus nuancée dans sa prestation, de la même manière que Lomane de Dietrich (Le Bal des Folles) qui incarne la rébellion et en même temps le paradoxe d’une jeune fille de parents aisés, en révolte contre eux, mais en même temps dépendante.
Des entretiens avec la réalisatrice qui revient sur les dessous de son film et notamment ses inspirations et le choix de ses comédiens.
Un entretien avec les actrices du film.
Et surtout la fameuse scène coupée, commentée par la réalisatrice, qui coûta si cher au film et à sa production, et qui fut à l’origine du scandale.