L'histoire :
Rome, les années 70. C'est l'âge d'or des Brigades Rouges. Mais pas seulement. Une bande de petits criminels fait peu à peu régner sa loi sur la capitale italienne. Ils sont trois: Le Libanais, Freddo et Dandy. L'enlèvement d'un riche bourgeois leur met le pied à l'étrier. La rançon est investie dans le trafic d'héroïne. Alliée à la Mafia, la bande prend vite le contrôle total de ce business et gagne, en échange de quelques services, la protection de fonctionnaires affectés aux sales besognes de l'Etat. Concentrées sur la lutte contre le terrorisme, les forces de l'ordre sous-évaluent la capacité de nuisance de ces jeunes truands.
Critique artistique :
Romanzo Criminale commence un peu comme la guerre des boutons qui s’assombrirait, découvrant un vol de gerfauts abattus à peine élancés hors du charnier natal, une trajectoire qui aurait prit son origine avec le vol d’une voiture ; une romance criminelle ça ressemble à un élan de violence passionnée interrompu net par la volonté d’un autre. Romanzo Criminale est l’adaptation du roman éponyme de l’écrivain italien Giancarlo de Cataldo par le réalisateur Michele Placido qui a été attiré par sa manière de raconter l'Italie des années de plomb du point de vue d'une bande de criminels. A y regarder de plus près, l’histoire de la joyeuse troupe de gamins qui volent une voiture et deviennent plus tard une bande de gangsters irascibles, représente la gloire et le déclin d’une certaine Italie.
La bande de Romanzo criminale est inspirée d'une bande qui a vraiment existé, la bande de la Magliana qui faisait régner sa loi sur la capitale italienne pendant les années 70. C’est son histoire que Michele Placido a voulu faire connaître car écrasée par celle des Brigades rouges et du terrorisme politique. Pour incarner une telle bande de gangster, le réalisateur s’est entouré d’une distribution assez étoffée d’où émergent
Kim Rossi Stuart (qui vient par ailleurs de réaliser son premier long-métrage, Libero (2006)), Pierfrancesco Favino qui a un visage d’une rare intensité et Claudio Santamaria (le terroriste qui veut faire exploser l’avion dans
Casino Royale). On retrouve
Anna Mouglalis (Merci pour le chocolat (2000),
Novo (2002)) en mère maquerelle, prostituée ou maîtresse tantôt de
Claudio Santamaria (Dandy) et tantôt du commandant Scialoia incarné par
Stefano Accorsi récemment vu dans
Les Brigades du Tigre (2006) ou La chambre du fils (2001). Les personnages principaux sont rendus très intéressants à suivre grâce à leur psychologie complexe ou torturée à l’instar du personnage Nero (Le noir) incarné par Riccardo Scamarcio. Ils sont tous à la fois convaincus de devoir assumer leur destin de criminel et dans le même temps sujet à chercher des formes d’évasions de leurs conditions. Le Libanais, personnage déterminé, s’achète des livres au kilo qu’il ne lira jamais, Le Dandy joue les durs auquel le courage fait défaut dans les grands moments tout en étant attiré par l’argent et les paillettes, Freddo (Le Froid) tombe amoureux et rêve de s’échapper de cette vie pour la partager avec Roberta, une jolie italienne. Le personnage incarné par Anna Mouglalis est quant à lui double ce qui se manifeste par sa volonté d’être appelé tantôt du prénom de Patrizia et tantôt Cinzia et répond à l’ambiguïté du commandant Scialoia.
Fait intéressant, les deux scénaristes, Stefano Rulli et Sandro Petraglia ont aussi écrit le scénario de Nos meilleures années, un film du réalisateur Marco Tullio Giordana se déroulant à la fin des années 60, et racontant l’histoire de deux frères parallèlement à l’histoire italienne. Romanzo Criminale qui emprunte le même dispositif narratif - la mise en perspective de l’Histoire par rapport à celle d’un groupe d’individus – mais d’un point de vue dramatique et sombre a été rebaptisé en Italie par certains « Nos pires années » en référence aux différents événements qui ont joués un rôle crucial dans l'histoire de l'Italie comme la lutte contre la mafia en Sicile ou les attentas terroristes. La vision qui incarne à elle seule le vertige causé par la prise de conscience des rapports de violence incomparable entre les actes criminelles de la bande du Libanais et l’explosion de la gare de Bologne est contenue dans le regard surprit et abasourdit de Freddo soudainement plongé dans un ground zero d’où n’émerge dans un premier temps que de la poussière, des cris et les dégâts collatéraux. Les personnages de l’histoire succombent pourrait-on dire non pas sous le coup imparable d’une mort violente mais de leur prise de conscience subite et successive de la vacuité de vies passées à chercher une reconnaissance, des gains, un confort matériel qui manquent cruellement au Libanais, celui qui montre le plus sa haine contre la bourgeoisie et ses atours.
En tant que film de gangster, Romanzo criminale dévoile la face sombre de l'Italie, sanglante et violente, Noire et froide (comme les deux personnages de la bande) ce qui le rapproche de films comme Meanstreet ou Les affranchis mais dont le réalisateur n’a pourtant pas cherché à se rapprocher afin de revenir vers le cinéma politique italien, noir et dur qu’on retrouve chez des cinéastes comme
Francesco Rosi (
Main basse sur la ville 1963) ou Elio Petri. Car la bande de la Magliana a opéré à partir du milieu des années 70 dans un contexte politique et social très chargé. Sans connexion avec le monde du terrorisme, la bande de Magliana avait réussi à s’emparer du business de la drogue et de la prostitution à Rome grâce à des actions audacieuses comme le montre le film. Alors que l’Italie des années 70 est marquée par une déferlante de deux vagues terroristes opposées : d’un côté, à l’extrême gauche, les Brigades Rouges, de l’autre, à l’extrême droite, le terrorisme d’obédience fasciste, il semble qu’en dépit de contacts obscurs avec le pouvoir italien de l’époque, la bande de Magliana ne s’est jamais réclamée d’aucune idéologie ce qui devait en faire une organisation assez inquiétante et incontrôlable. Selon Giancarlo de Cataldo ils étaient épidermiquement fascistes car ils ne connaissaient exclusivement que la violence. Lors d’une promenade sur une plage, on entend d’ailleurs Le Libanais confié à Freddo son admiration pour de grands dictateurs comme Mussolini, Staline ou Hitler comme autant de modèles.
Verdict :
Romanzo Criminale contribue à faire connaître la face sombre de l'Italie des années soixante-dix qui est marquée par une déferlante de deux vagues terroristes opposées mais à côté desquelles sévissaient la bande de Magliana qui dominait le marché de la drogue et de la prostitution à Rome. Cette édition double DVD permet de découvrir le film dans de très bonnes conditions et est accompagnée de bonus documentés sur la période où se déroule le film. C’est aussi l’occasion de découvrir quelques-uns des nouveaux comédiens italiens prometteurs dont Kim Rossi Stuart, Pierfrancesco Favino, Claudio Santamaria, Riccardo Scamarcio ou Stefano Accorsi.
Le format de l’image des bonus est 1.33 – 4/3 et accompagné d’une piste audio Dolby Digital 2.0 en Français.
Bonus :
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Le documentaire, Un roman italien (VF, 24 min 25sec) :
chapitre 1 : Les années de plomb où le réalisateur Michele Placido, Giancarlo De Cataldo, écrivain et scénariste de Romanzo Criminale, Anna Mouglalis et Stephano Accorsi témoignent sur el contexte historique que décrit le film et sur la perception de ces évènements aujourd’hui. Il vaut dire qu’il s’agit d’une période tabou probablement à cause des relations obscures et floues qu’il y avait entre l’état, la mafia et les groupuscules terroristes. Cet un passé que l’Italie doit affronter aujourd’hui.
Chapitre 2 : la création des personnages : la tradition du cinéma en Italie veut qu’il y ait peu d’histoires et de violence ce qui explique le nombre important de personnages. Giancarlo De Cataldo nous explique commet le personnage du commandant Scialoia passe d’un policier idéaliste qui change par la suite à un arriviste bourgeois fasciné par les criminels qu’il jalouse. Il évoque par la même la nécessaire trahison du texte littéraire au profit de cet autre langage que manipule le cinéma.
Chapitre 3 : épilogue où le Froid meurt assassiné dans le film alors que dans la réalité plusieurs des membres de la bande de Magliana ont survécu, témoigné et des procès ont eu lieu.
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Le documentaire Enquête sur un tournage (VF, 14 min 33 sec) : avec les interviews de Michele Placido, Giancarlo De Cataldo, Anna Mouglalis et Stephano Accorsi sur le tournage et la manière de travail du réalisateur. Qui confie aimer les acteurs et le théâtre.
- Making of (VF, 18 min 40 sec) : qui dispense beaucoup d’image prises lors du tournage et des interviews des acteurs et du réalisateur. Un bon complément pour en savoir encore plus sur le film.
- Lien Internet :
www.warnerbros.fr
- Les crédits
MenusUne interface soignée dans l’esprit du packaging global autour du film. Les menus sont pratiques bien que l’on pourra trouver certaines transitions un peu longue.
PackagingLe packaging autour du film et du DVD est très réussit. Un beau graphisme et une affiche efficace et accrocheuse mettent dans l’ambiance du film et présentent les principaux acteurs.