L’histoire :
Un avocat chargé d’arranger les situations « en amont », et donc d’éviter les procès, se retrouve embringué dans une épineuse affaire mettant en cause une grande firme agroalimentaire.
Critique subjective :
Scénariste renommé (Armageddon, L’avocat du diable, la trilogie Jason Bourne), Tony Gilroy faisait ses premières armes de réalisateur en 2007 avec un thriller sobrement intitulé Michael Clayton.
Michael Clayton dispose d’une intrigue tirée au cordeau, on n’en attendait pas moins de la part d’un scénariste ayant fait ses preuves. Le spectateur sera convié à suivre les péripéties du personnage titre, un avocat d’un genre très particulier. « Arrangeur » chevronné, Clayton ne plaide jamais. Les problèmes, notre homme les prend à la racine : il conseille et oriente ses clients afin d’éviter le procès. De par le statut particulier de son protagoniste principal, Tony Gilroy évite donc soigneusement de livrer un énième film de procès. Pas question, ici, de développer une intrigue de cour et sa sempiternelle succession de plaidoiries. Le scénariste réalisateur préfère nous dévoiler les « cuisines », conscient que le spectateur ne connaît que trop bien la salle. Point d’orgue de cette démarche, le climax, antispectaculaire mais savoureux au possible (une superbe joute verbale dans un couloir désert), remporte indéniablement l’adhésion.
Plus encore que par la qualité de son intrigue, Michael Clayton brille surtout par la justesse de ses personnages. Habitué à gérer les problèmes des autres, c’est Clayton lui-même qui, cette fois, se retrouve plongé dans une situation épineuse. Tenaillé par des problèmes personnels (famille éclatée, investissement malheureux dans un bar, démon du jeu), il va surtout mettre son intégrité à rude épreuve dans une affaire judiciaire particulièrement explosive. C’est dans ce cadre que son chemin croisera celui de Karen Crowder (Tilda Swinton, oscarisée pour le rôle), la directrice juridique d’une grande firme agroalimentaire, une femme que l’on verra progressivement basculer du côté obscur. Particulièrement impliqué, Tom Wilkinson vole souvent la vedette à nos deux têtes d’affiche. Il campe ici Arthur Edens, collègue et ami de Clayton qui, dans un sursaut de conscience (doublée d’un accès de folie), décide d’instruire contre la firme qu’il était censé défendre, s’appuyant sur un document interne accablant.
Prenant soin de s’entourer de techniciens émérites, tels Robert Elswit (Magnolia, There will be blood) à la photographie et James Newton Howard (Signes, Incassable) à la musique, Tony Gilroy signe une réalisation pertinente et entièrement dévouée au propos. Jouant la carte de l’épure, le réalisateur a cependant tendance à multiplier les visuels froids, presque cliniques, quitte à favoriser un certain hermétisme émotionnel.
Verdict :
Se revendiquant du cinéma des seventies (celui de Sydnet Lumet pour l’utilisation des décors et de Sydney Pollack pour le côté politiquement engagé), Michael Clayton est un film réussi mais qui, de par sa volontaire retenue, manque parfois d’émotion. Un supplément d’âme lui aurait sans doute permis d’atteindre de hautes sphères, le potentiel était bel et bien là.
Passons rapidement sur les pistes 2.0 (VO et VF), tout à fait efficaces mais forcément un peu limitées, pour évoquer un Dolby Digital 5.1 clair et parfaitement dosé, particulièrement en version originale. Si le film n’est pas propice à une bande son tonitruante, la dynamique sait se montrer réactive quand le besoin s’en fait sentir (explosion de la voiture). On conseillera davantage la VO, la version française mettant les voix trop en avant, un état de fait d’autant plus gênant que les doublages ne sont pas des plus heureux (cf. George Clooney qui ne bénéficie pas de son doubleur habituel).