L’histoire :
Deux êtres sexuellement atypiques, Jennifer et Bratz, vont finir par se rencontrer.
Critique subjective :
Réalisateur des mythiques Basket case (Frères de sang), Elmer le remue méninges et Frankenhooker, Frank Henenlotter n’avait pas œuvré derrière une caméra depuis Basket case 3, en 1994. Long, très long. Affecté par la fin d’une époque (marquée par la disparition des sociétés spécialisées dans le cinéma d’exploitation) et totalement insatisfait par le troisième opus de Basket case (dont il a toujours terriblement honte aujourd’hui), le bonhomme avait préféré se tourner vers le monde de l’édition VHS, puis DVD (en travaillant chez Something weird video). En 2008, l’envie de s’atteler de nouveau à un long-métrage, et de conjurer ainsi un cancer naissant, sortira Henenlotter de sa longue phase d’hibernation. Le résultat s’intitulera Bad biology (maladroitement retitré Sex addict à l’occasion de sa sortie DVD française), un film emballé dans des conditions que son géniteur affectionne tout particulièrement (petit budget, casting majoritairement composé d’amis, tournage en équipe réduite et système D de rigueur).
Elle, c’est Jennifer. Elle possède sept clitoris. Cette particularité physique lui vaut d’avoir de nombreux orgasmes tous les jours, et ce depuis l’âge de huit ans. Autre singularité : deux heures après chaque rapport sexuel, elle donne naissance à une sorte de bébé difforme qu’elle s’empresse de faire disparaître. Physiologiquement accro au sexe, Jennifer enchaîne les conquêtes d’un soir et recherche le partenaire ultime, celui qui sera à la démesure de ses particularités anatomiques.
Lui, c’est Bratz. Né quasiment sans pénis, il a connu son premier orgasme à dix sept ans, grâce à des médicaments. Depuis, à l’aide de stéroïdes et autres substances chimiques toujours plus puissantes, il a réussi à faire croître un organe géant entre ses jambes. Si Jennifer a dompté son sexe, Bratz est à la merci du sien, un pénis devenu créature récalcitrante, une « bite camée » qui réclame sa dose au quotidien, carburant désormais aux médicaments destinés aux animaux. Pire encore, ce membre monstrueux est devenu tellement autonome qu’il parvient maintenant à se désolidariser du corps de Bratz (on reconnaît bien là l’auteur de Basket case).
Partant de ce postulat bien trash, où deux êtres sexuellement autres vont nécessairement être amenés à se rencontrer, Henenlotter témoigne à nouveau de sa passion pour les freaks (mutants, drogués, etc.) et démontre qu’il n’a pas perdu la main. Grâce à des procédés simples mais payants (Jennifer et Bratz s’adressent directement au spectateur, par le biais de la voix off ou en lui parlant directement, face à l’objectif), le réalisateur créé une puissante empathie pour les deux protagonistes principaux et, par extension, un véritable intérêt pour leur péripéties. Si, visuellement, le résultat n’a pas le charme de ses précédents travaux (le cachet « sale » et le grain crapoteux cèdent leur place à une image résolument plus lisse), le contenu possède indéniablement la même saveur (voir la séquence où le sexe de Bratz part en vadrouille, des passages que n’aurait pas renié John Waters). Avec Bad biology, Frank Henenlotter démontre qu’il est toujours capable du meilleur en matière le fantastique barré.
Verdict :
Au final, si les années ont passé, le réalisateur (qui accuse aujourd’hui une cinquantaine bien tassée) n’a rien perdu de son mordant. Nous reste à espérer qu’il repasse rapidement derrière la caméra.