Argan est un richissime bourgeois persuadé d’être malade. Il se fait faire des saignées et des lavements et sa nouvelle femme n’attend que sa mort pour profiter de l’héritage. Lorsqu’Argan décide de marier sa fille Angélique à Thomas Dafoirus, le fils d’un médecin, la jeune femme fait appel à Toinette la servante pour la tirer d’affaire.
Dernière comédie de Molière, « Le malade imaginaire » est aussi la plus aboutie et résonne comme une synthèse de l’œuvre du dramaturge. La trame tourne autour d’un homme riche et naïf qui se retrouve le jouet d’une intrigue amoureuse et la victime de la cupidité de son épouse et des médecins. Molière signe avec « Le malade Imaginaire » une comédie burlesque qui décrit avec intelligence et cynisme l’avidité d’une société et son discours devient parfois brutal lorsqu’il décrit les médecins comme des charlatans. Un peu comme un pied de nez à ceux qui ne parviennent pas à le soigner de la maladie qui le ronge, le dramaturge se fait incisif et n’hésite pas à écorner la bourgeoisie de l’époque pour mieux illustrer son propos. Chaque intrigue de la pièce y compris l’histoire d’amour sont autant de sujets fétiches de l’auteur qu’il magnifiera une dernière fois par des répliques efficaces et un sens du rythme imparable.
Et cette nouvelle adaptation prouve une fois de plus que l’œuvre de Molière n’est jamais aussi éfficace que lorsqu’elle retrouve le populaire. Et Christian de Chalonge (Le bourgeois Gentilhomme) l’a bien compris, car il signe là, une mise en scène efficace qui n’hésite pas à s’éloigner du classisisme parfois insupportable de la comédie française. Le réalisateur séquence sa mise en scène de petits interludes mais n’en n’oublie pas pour autant de garder un certain rythme et permet ainsi au spectateur de renouer avec l’esprit de son auteur. Car sous un aspect classique, Molière était avant tout un auteur populaire pour son époque, et son œuvre ne donne toute son essence que lorsque le metteur en scène se libère du didacte intellectuel et rigoureux des troupes officielles.
En confiant à Christian Clavier (Les visiteurs) le rôle d’Argan, le metteur en scène fait un choix judicieux, car le comédien, même s’il ne parvient pas à effacer son rôle fétiche des « visiteurs », encore plus avec le language de Molière, se libère totalement dans la pièce, de la même manière que De Funès le fit avec « L’avare ». Christian Clavier a acquit suffisamment de maturité pour interpretter les nuances de son personnage et le rendre suffisamment abordable pour les spectateurs toujours un peu méfiant face au côté académique de l’auteur. Aidé en cela par une distribuition aussi cohérente qu’éfficace notamment avec Marie-Anne Chazel (Les bronzés) et Didier Bénureau (Les visiteurs), l’acteur prend son envol et la pièce toute sa signification. Rarement la prose de Molière n’aura eu autant de signification que dans cette adaptation télévisuelle.
En conclusion, « Le malade Imaginaire » retrouve une nouvelle jeunesse sous les traits de Christian Clavier qui démontre que son talent ne se limite pas seulement aux « Visiteurs » ou aux « Bronzés ». L’acteur a atteint la maturité suffisante pour pouvoir se mettre au service d’un auteur aussi génial que Molière.