Mikhail, un homme d’affaire cynique, tente d’extraire le sable d’une ancienne zone de bataille du siège de Leningrad qui abrite les corps de nombreux soldats russes. Un incident se produit et Mikhail découvre un portail lui permettant de voyager dans le temps, en pleine Seconde Guerre mondiale. Coincé entre sa réalité et des sauts temporels au cœur du front sanglant de l’Est, Mikhail se retrouve dans une quête du temps qui changera à jamais sa destinée.
Le cinéma russe est toujours plein de bonnes surprises et souvent mésestimé. Il a tendance à ne bénéficier que d'une sortie directe en vidéo. Particulièrement lorsqu'il s'agit de film de genre tel que le fantastique. Avec « Frontier », nous sommes dans cette configuration, car si le film porte un discours éminemment patriotique en évoquant la terrible bataille de Leningrad et le courage des soldats russes, le scénario s'amuse à mélanger l'historique avec le fantastique, notamment avec ce personnage d'homme d'affaire arrogant et déterminé qui va se retrouver à faire des sauts dans le temps. Une idée originale qui ne cache pas son objectif, parler de cette guerre qui fit naître tout ce qu'il y avait de plus abjecte dans le monde, mais se garde bien d'évoquer la triste gouvernance de Staline. L'histoire devient très rapidement captivante, notamment parce qu'elle va embarquer le héros dans une quête d'identité complexe.
Outre le scénario c'est la mise en scène et particulièrement l'esthétique du film qui crée la surprise. Car le réalisateur, méconnu en France, a choisi des couleurs volontairement appuyées pour donner à son film une image très distincte. A commencer par des verts de gris très présents comme si les fusils et les métaux, en général, venaient d’être déterrés du passé, ou alors des mauves très appuyés pour refléter une sorte d'atmosphère vintage et apaisante qui vient trancher avec la noirceur de l'intrigue. L'ensemble est assez remarquablement construit et participe à faire de « Frontier », un film étonnant tout autant que passionnant.
Les effets spéciaux qui fourmillent dans le film viennent habiller la narration et provoquent des transitions aussi spectaculaires que réussit. Des colonnes de tornades grises s'abattent autour du personnage et font l'effet d'un miroir entre passé et présent. Jamais dans la surenchère, les effets spéciaux viennent habiller le film et participent à sa narration sans pour autant la cannibaliser. La distribution, quant à elle, est redoutablement efficace et même si parfois Pavel Priluchnyy, connu en son pays pour des films d'action comme « Hooked », se prend un peu les pieds dans le tapis, cela ne dessert jamais le film. Au contraire, ses inégalités donnent une forme de crédibilité à l'ensemble. Quasiment de tous les plans, il porte le film sur ses épaules et ne se laisse pas voler la vedette.
En conclusion, « Frontier » est un film intéressant autant que passionnant. L'esthétique choisit par le réalisateur, la bonne tenue des effets spéciaux et la qualité de sa mise en scène en font, certes pas un chef d'œuvre, mais en tout cas, un film réussit qui aurait pu bénéficier d'une sortie sur grand écran. Une preuve que le cinéma russe sait prendre des risques et le fait très bien.