Dog et Mirales sont amis d’enfance. Ils vivent dans un petit village du sud de la France et passent la majeure partie de leurs journées à traîner dans les rues. Pour tuer le temps, Mirales a pris l’habitude de taquiner Dog plus que de raison. Leur amitié va être mise à mal par l'arrivée au village d'une jeune fille, Elsa, avec qui Dog va vivre une histoire d'amour. Rongé par la jalousie, Mirales va devoir se défaire de son passé pour pouvoir grandir, et trouver sa place.
« Chien de la casse », n’est pas un film qui passa inaperçue à Cannes, d’où il reparti avec le Prix Pierre Chevalier. D’abord parce qu’il utilise une tonalité radicalement de ce que l’on pense des films de potes. Ici, nous sommes dans un village du sud de la France, où les jeunes adultes n’ont d’autres distractions que de refaire le monde sur la plage du village et d’errer dans les ruelles en rêvant à un avenir qu’ils veulent se construire. Jean Baptiste Durand qui avait déjà traité du sujet de la relation amicale avec un Dominant et un dominé dans son court-métrage : « Il venait de Roumanie », est repartie sur cette base et a explorer avec plus de finesse et peut-être même une inspiration que les comédiens principaux lui ont apporté, des personnages plus profonds, plus complexes.
Ici, nous avons, cette relation amicale, fraternelle entre Dog, un jeune homme discret, un peu taciturne, et Mirales, son exacte opposé, véritable moulin à parole, parfois hâbleur, souvent cassant, qui s’est créé son monde sans pour autant y trouver sa place. Et lorsque Dog va rencontrer Elsa, qu’il va tomber amoureux, Mirales va connaître la jalousie et apprendre à trouver sa place, qu’il a tellement peur de perdre. Il passe alors de Dominant à tyrannique, provoquant le malaise, chez ses amis, mais chez le spectateur également. Et c’est toute la subtilité du scénario de Jean Baptiste Durand, que de se concentrer sur la relation de ces deux jeunes hommes, Dog d’abord qui va se laisser piétiner par son ami, se laisser humilier, comme si rien ne pouvait être autrement, et prendre l’amour comme exutoire. Et puis surtout Mirales dont les apparitions et autres diatribes vont pousser chacun dans ses propres retranchements, créer le malaise et appuyer sur les fêlures d’une relation qu’il veut exclusive par peur de ne plus avoir de place. Mirales apparaît comme quelqu’un qui s’intéresse à tout, qui a besoin de tout, mais ne trouve jamais le bon endroit ni le bon mot pour être enfin une part entière de son monde.
Des personnages complexes qui gravitent autour de ces sentiments mal traités. Et le réalisateur pose sa caméra et laisse les comédiens s’exprimer cherche l’invisible, l’imprévu, en limitant les mouvements pour offrir plus de possibilité à l’imprévue. Cela donne des scènes entre douceur et violence, entre passion et répulsion. Visuellement passionné avant d’être technicien, le réalisateur livre ici une œuvre puissante et subtile dans laquelle la peinture des bandes d’amis en errance s’offre un nouvel écrin, en se retrouvant, non as dans une banlieue quelconque du Sud de la France, mais sur la place d’un petit village, sans plus de distraction et de plan d’avenir.
Mais la plus grande réussite vient évidemment de son casting ! Anthony Bajon (La Prière) continue de parfaire sa technique déjà remarquable et sur e rapport au corps qui rend son jeu si puissant en limitant les effets de voix, de dialogues, juste par la position de sa tête ou de son regard. L’acteur sait être présent tout en étant minimaliste. Face à lui, celui qui fut la révélation de l’année, alors que sa carrière est déjà impressionnante Raphaël Quenard que l’on a pu voir chez Quention Dupieux (Mandibules), chez Jacques Audiard (Les Olympiades) ou encore chez Cédric Jimenez (Novembre). L’acteur est ici irritant, tendre, repoussant de méchanceté gratuite et grandiose de fidélité. Le comédien expose une grande palette de son talent et nous arrive en plein visage comme un éclair, tant la perfection de son interprétation nous embarque dans une multitude de nuances de sentiments contradictoires.
Avec « Chien de la casse », nous découvrons un réalisateur sensible et précis dans son écriture et dans sa mise en scène. Pas forcément technicien mais à l’œil particulièrement avisé qui sait donner une couleur à ses histoires. C’est aussi la révélation d’un talent brut : Raphael Quenard et la confirmation de deux acteurs touchants : Anthony Bajon et Galatea Bellugi (Réparer les Vivants).
Côté Bonus, Un entretien avec le réalisateur Jean Baptiste Durand qui revient sur son parcours et sur la manière dont il a écrit son scénario et dont celui-ci à évoluer.
Le court Métrage à l’origine de tout : « Il Venait de Roumanie » avec Johan Libéreau (Les Témoins) et Damien Jouillerot (Les Aiguilles Rouges)
« L’acteur » court métrage, réalisé par Raphael Quenard et Hugo David, dans lequel le comédien joue de son image durant le tournage de « Chien de la casse » et invite ses amis réalisateur et comédiens à en jouer également.