Deux jeunes hommes de la tribu Oglala Lakota vivent dans la réserve de Pine Ridge, dans le Dakota du Sud. Bill, 23 ans, cherche à joindre les deux bouts à tout prix. Matho, 12 ans, est quant à lui impatient de devenir un homme. Liés par leur quête d’appartenance à une société qui leur est hostile, ils tentent de tracer leur propre voie vers l’âge adulte.
« War Pony » est, peut-être, le film que nous n’attendions plus ! Celui qui va lever un voile qui masquait la honte des réserves indiennes, laissées à l’abandon par un état qui ne semble pas se soucier de ce qu’il s’y passe. Des réserves où la pauvreté règne en maitre et où chacun doit lutter pour sa propre survie. Une situation qui offre peu de perspectives à ses habitants qui en ont même perdu, pour les nouvelles générations, leur culture, leur langue, pour se laisser aller à l’errance d’une existence sans lendemain lumineux. Sur un scénario signé d’abord par Franklin Sioux Bob et Bill Reddy deux natifs de Pine Ridge et faisant partie de la tribu des Sioux. Le duo s’est nourri de leurs propres souvenirs pour dépeindre leur quotidien et ceux de leurs familles et de leurs amis faisant parties de ces minorités exclues du « Rêve Américain » par un état qui semble avoir oublié leur rôle et surtout leur place. Natifs, Ces tribus enfermées dans ces réserves sont abandonnées alors qu’elles sont les origines de cette terre que foulent des millions d’américains et de touristes venus du monde entier. Des femmes, des enfants, et des hommes effacés de la mémoire collective qui n’obtiendront jamais une part du gâteau qui leur est dû.
Et c’est comme cela que les deux réalisatrices, Gina Gammell (Dixieland) et Riley Keough (Daisy Jones and The Six), qui signent là leur première réalisation, se sont approprié l’histoire et ont remodelé le scénario pour qu’il soit plus cinématographique, mais ont souhaité s’immerger dans l’univers des deux scénaristes en allant régulièrement à Pine Ridge pour en comprendre toute l’errance, mais aussi toute la fierté, car même si les trafics en tout genre sont profusion dans les réserves et si la pauvreté est présente et force chacune et chacun à se débrouiller pour survivre, il reste cette fierté de continuer de vivre, de garder des espoirs et surtout d’être encore porteur de la culture des origines.
Avec une mise en scène qui frôle le documentaire, les réalisatrices vont donc suivre deux héros de deux âges différents et de deux familles différentes, mais aux parcours similaires. Ainsi Bill 23 ans, ère dans la ville pour trouver de l’argent et tout est bon pour cela, prendre une personne en stop, rendre service n’est plus gratuit, mais source de revenus potentiels. Et Puis Matho, 12 ans, qui essaye de faire comme son père, dealer, de se trouver une place dans ce monde et se laisser entrainer dans une spirale de violence. Les réalisatrices ne font aucune concession et mettent en image une réalité difficile à entendre lorsque l’on parle d’un pays tel que les Etats-Unis. Jamais dans le jugement mais plutôt dans le constat, Gina Gammell et Riley Keough vont suivre leurs héros et leur faire rencontrer toute une galerie de personnages (Tous, majoritairement interprétés par des amateurs, souvent natifs de la réserve) et peindre devant nous une société en dérive, en espérant alerter sur leurs conditions (Pas sur qu’elles soient entendues). La mise en scène est précise et le film captivant et touchant, comme un uppercut.
Enfin, nous ne pouvons pas finir cette chronique sans parler des deux acteurs principaux : Jojo Bapteise Whiting et Ladainian Crazy Thunder, deux comédiens issus de la tribu des Sioux dévorent l’écran par une énergie et un naturel confondant dans des rôles que l’on imagine proche d’eux, mais dans lesquels ils parviennent à insuffler juste ce qu’il faut de nuances pour capter l’attention et donner à leurs personnages, plus de subtilité.