Le Film
Critique de Christophe Gauthier
Editeur
Edition
Standard
Label
Zone
2
Durée Film
160 min
Nb Dvd
2
LE PITCH
Kris Kelvin, psychologue, est envoyé en mission sur la station Solaris, en orbite autour de la planète océane du même nom. Ceci afin de résoudre une double problématique : quelles sont les raisons ayant poussé son ami, le physicien Gibarian, au suicide? Et dans ces conditions, la recherche sur Solaris doit elle être poursuivie ou abandonnée? Kelvin part donc enquêter sur le comportement de ses collègues scientifiques, victimes d'hallucinations trop réelles pour être prises à la légère. Il doit alors démêler le vrai du faux en faisant appel à tout son sens du raisonnement. Mais lorsqu'il rencontre sur la station sa femme décédée 7 ans plus tôt, la raison s’efface et fait place à la nostalgie d’un amour déchu. La planète Solaris tente d’entrer en contact avec lui …
LE FILM, OBSCUR OBJET DU DESIR
A l’origine nacquit le roman éponyme de Stanislas Lem (1961), ouvrage littéraire SF posant les fondements d’une vision spéculative sur l’altérité. Tarkovski, sortant alors d’Andrei Roublev, trouva dans ce roman un point d’appui à ses préoccupations identitaires, largement teintées de mysticisme et résolument tournées vers l’Autre. Le réalisateur apporta ainsi sa touche personnelle, préférant détailler un contenu davantage psychologique que scientifique, ceci au détriment de la solaristique propre à Lem.
La mémoire comme mode de relation à l'altérité
Dans cette œuvre, sont brassés pêle-mêle les thèmes chers à Tarkovski, comme la culpabilité et la nostalgie. Mais la fusion d’un propos SF en drame psychologique aboutit encore plus loin et nous interroge sur les conditions d’une relation à l’altérité. C’est par le biais de la mémoire et de la conscience, ainsi que de leur communication, que peuvent être établies des approches visant à faire contact au corps étranger et à cette forme de vie supérieure que constitue Solaris, gigantesque planète océane. C’est bien ici aussi que se concentrent les préoccupations de Tarkovski : de son idéal de liberté, alors contrarié par le système politique soviet de l’époque ; du chemin restant à parcourir à l’humanité vers une connaissance de soi salvatrice ; d'une réflexion introspective devant mener aux limites de la connaissance humaine et faire lien avec une forme de vie étrangère, extérieure. Dans ces conditions, on imagine mal alors que la potentialité subversive de Solaris ait échappée aux censeurs, ces derniers jugeant le genre SF « conforme » (réalisant leur erreur, ils couperont tout de même plus de 30 scènes du montage, dont la plupart sera rétablie au sein de cette même édition)
"What will survive of us is love", Phillip Larkin, An Arundel Tomb, 1974.
C’est aussi de la culpabilité de survivre à l’être aimé, ainsi que de la nostalgie de l’Amour et du Divin dont il est question ici. L’amour entre deux être humains et sa survivance par delà la mort (à travers la mémoire) constituent alors un double trait d’union. D’abord entre les deux amants, ensuite de l’ipséité à l’altérité : du même à l’autre. On serait tenté de ne voir qu’une fable moralisatrice sur l’amour et ses enjeux, mais c’est aussi par ailleurs une critique de l’épistémé scientifique, alors en plein essor sous le joug de la guerre froide. L’être humain en proie à sa finitude et aux limites de la rationalité s’incrit en contrepoint d’une époque dominée par la raison scientifique et achève de consacrer une connaissance intuitive non-médiane, toute empreinte de poésie et de non-dit. Voilà donc toute la pertinence de l’œuvre de Tarkovski, à la fois double et métisse, comme peuvent l’être deux corps étrangers, vision magnifiée par le remake de Soderbergh sacralisant amour et poésie au sein d’un même absolu nostalgique.
Le final de l’œuvre nous donne à voir les dangers potentiels du dogmatisme. Si l’exclusivité accordée au schème scientifique dans l’analyse de Solaris est vouée à l’échec, la pertinence d’une échappatoire mystique est aussi remise en question. La possibilité de la perte identitaire au sein d’une entité étrangère est ainsi dénoncée. C’est aussi par extension toute la lucidité de Tarkovski qui est valorisée, venant par la même renforcer toute la valeur de son œuvre - merveilleuse, intemporelle.
Plus loin ...
D'un point de vue historique, l'analogie (pourtant malheureuse mais persistante) entre Solaris et 2001, nous interroge quand à la possibilité d'existence d'une substance pensante autre qu'humaine dans l'univers. A.C.Clarke fut l'un des premiers écrivains à spéculer quant à la présence de vie sur Europe. Cette théorie fut validée bien des années plus tard par l'ensemble de la communauté scientifique mondiale, soulignant ainsi toute la pertinence d'une SF spéculative et avant-gardiste.
L'image
Couleurs
Définition
Compression
Format Vidéo
16/9 anamorphique couleur
Format Cinéma
2.35:1
Le master est en tout point identique à la version autorisée par le Russian Cinema Council (Ruscico), édité précedemment chez Film Office. Pour une oeuvre aussi datée (1972), la qualité est plus que satisfaisante. A signaler, une instabilité parfois récurrente de l'image, plus précisément visible à l'amorce de certains plans. Belles couleurs, mais du fourmillement et une compression parfois défaillante malgré la scission de l'oeuvre en 2 DVD. A noter aussi une alternance couleurs et N&B de bon aloi.
Langue
Type
Format
Spatialisation
Dynamique
Surround
Français
5.1
Russe
5.1
Un mixage 5.1 suffisamment riche et détaillé vient agrémenter Solaris. Pour la plupart, les effets surround nous permettent de localiser les personnages au sein de la station. La musique bénéficie par ailleurs d'une ampleur conséquente. Le 5.1 russe est à l'avenant de son homologue français. Précisons que les scènes supplémentaires réintégrées au corps du film basculent en VOSTFR, de sorte que le mixage natif paraitra plus naturel.
Les Bonus
Supléments
Menus
Sérigraphie
Packaging
Durée
19 min
Boitier
Digipack
Une édition 2 DVD dont on peut questionner la pertinence, Film Office ayant précedemment édité le même master. On se retrouve ici en possession d'une copie conforme qui n'apporte rien de plus, sinon une distribution plus large à l'attention du grand public.
Le 1er disque comprend :
Une galerie comptabilisant une dizaine de photographies, toutes très belles et extraites du film
Les filmographies d'Andrei Tarkovski (réalisateur), Friedrich Gorenstein (scénariste), Vadim Ioussov (directeur de la photographie), Mikhail Romadine (décorateur) et Edouard Artemiev (compositeur), toutes agrémentées de photos d'identité respectives.
Une section archive incluant deux pages de biographie sur Andrei Tarkovski, une interview de deux minutes avec la soeur de ce dernier, ainsi que trois pages bibliographiques, celles-ci dévolues à Stanislas Lem.
Sur le 2nd disque, vous trouverez :
Une autre galerie de dix photographie, toutes N&B, prises lors du tournage.
Les filmographies de Donatas Banionis, Natalia Bondartchouk, Youri Jarvet, Dvorjetski Vladislav, Nikolai Grinko et Anatoli Solonitsyne, les acteurs du film.
Un documentaire de dix minutes, à l'honneur de l'acteur principal Donatas Banionis, guère passionnant.
Cerise sur le gâteau, sont proposées en bonus cachés quelques bandes-annonces de films réalisés par Tarkovski.
Dans l'ensemble, la présence de jolis menus rend la navigation pour le moins attrayante. Mais au bout du compte, pas grand chose à se mettre sous la dent. En regard du potentiel "science-fictionesque" de l'oeuvre, il eut été souhaitable d'établir des pont littéraires et philosophiques, voire psychologiques. Solaris est un biais au travers duquel se soulève tout un pan réflexif sur l'humanité et son positionnement face à l'altérité. Il y avait donc matière à nous amener ailleurs, loin des sentiers battus pratiqués par les biographies et autres éclaircissements historiques. Ce sera pour une prochaine édition peut-être ...
Bonus

Livret

Bande annonce

Biographies

Making of

Documentaire

Interviews
Com. audio

Scènes sup

Fin alternative

Galerie de photos

Story board

Multi-angle

Liens internet

Interface Rom

Jeux intéractifs

Filmographies

Clips vidéo

Bêtisier

Bonus Cachés

Court Metrage