L'histoire
Dans une ville d’amour et de prospérité, d’espoirs perdus et de morts prématurés, l’inspecteur chevronné Hei (Tony Leung) est exposé à tout : douleur, désespoir, horreur. Lorsque son beau-père est assassiné, il contacte son ex-partenaire Bong (Takeshi Kaneshiro) devenu détective privé. Peu après avoir accepté l’offre, Bong réalise combien les apparences sont trompeuses. Le crime est aussi monstrueux que parfait : les indices l’amènent sur une piste insoupçonnée déclanchant une périlleuse chasse à l’homme …
Critique artistique
Confession of pain débute dans une ambiance de fête de noël qui laisse très vite place à une discussion entre l’inspecteur chevronné Hei et son partenaire Bong à propos des problèmes de couple de ce dernier avant que ne commence une filature dans Hong kong. La ville apparaît dès le début comme un élément central du film qui nous la fait découvrir en scope (2.35:1 sur le master original), de nuit, en voiture et grâce à des vues aériennes exceptionnelles prises depuis un hélicoptère (l’équipe a obtenue des autorisations spéciales pour tourner de nuit). Non sans stupeur, on découvre que les enquêteurs menés par Tony Leung passe à tabac un pervers sexuel pris en flagrant délit ; démarche scénaristique qui remémore inévitablement la scène d’exécution d’un tueur de flic dans le captivant polar SPL (2005) de Wilson Yip (Bullets over summer). Dans ces polars hongkongais, le combat entre le jour et la nuit n’est jamais bien loin contaminant totalement le personnage de Tony Leung et jusqu’à celui de Takeshi Kaneshiro sombrant dans l’alcoolisme. La citée des douleurs abrite des anges déchus d’avoir trop de peines dont la source remonte à l’enfance dans le cas de l’inspecteur Hei. On a très vite la sensation que Confession of pain est un polar existentiel, un polar « d’un genre ennuyeux » comme Prab Da Yoon, scénariste de Vagues invisibles de Pen-ek Ratanaruang qualifiait (non sans humour et autodérision) le genre de science-fiction qu’il tente de mettre à l’œuvre dans ses films. La bande originale concoctée par Chang Kwong Wing parvient justement parfaitement à servir la dimension existentielle et les états d’âmes des personnages de Confession of Pain dont la musique est l’une des qualités qui évitent de le faire sombrer totalement.
En dépit de la distribution étoffée de Confession of Pain, le film ne parvient jamais à nous emporter complètement principalement à cause d’une intrigue très discutable. En effet, le scénario à force de vouloir entretenir un suspens autour de l’identité du tueur tout en laissant penser que l’inspecteur Hei incarné par Tony Leung serait ce tueur – un des intérêts du projet était de voir Tony Leung incarné un méchant à l’écran – finit par enfoncer des portes ouvertes, installant ennuis et incompréhension. Quand SPL nous dévoile directement les pratiques criminelles des policiers Hongkongais tout en continuant à susciter un grand intérêt grâce à une enquête pour arrêter le parrain incarné par Sammo Hung, Confession of Pain semble bégayer autour de différentes options que l’on devine pratiquement toutes. Pourtant, le film a de nombreux atouts en sa faveur à commencer par son équipe expérimentée, sa distribution où l’on compte au moins quatre acteurs connus car hormis Shu Qi (Storm Riders, Millennium Mambo, Three Times) et Chapman To (Men suddenly in black, la saga Infernal Affairs, Initial D) qui ont une certaine reconnaissance en Asie, Tony Leung Chiu-wai (Une balle dans la tête, Chungking express, Happy Together, In the mood for love, 2046, Infernal affairs) et Takeshi Kaneshiro (Chungking express, Les anges déchus, Le secret des poignards volants) sont des acteurs confirmés et adulés.
Le film est plombé par trop de révélations faites dès la première demi-heure ce qui aurait pu être le prétexte à développer une enquête pour découvrir les motivations des protagonistes comme on le voit dans Fulltime Killer de Johnnie To par exemple où l’intérêt en plus de la compétition entre les deux tueurs réside dans la révélation progressive du drame personnel du tueur à gage Tok (Andy Lau). Mais il est vrai que Johnnie To a souvent une longueur d’avance pour gérer autant les films d’actions que les films à ambiance quand il ne s’agit pas tout simplement de tordre la grille des genres en les mélangeant allègrement et avec la liberté et l’agilité qu’il manque au duo de Confession of Pain. Andrew Lau et Alan Mak ont à leur avantage de toujours réussir une photographie très forte, souvent intéressante mais Johnnie To aussi y parvient sur le même terrain comme dans PTU ou Judo Throw Down dont la photographie renouvelle la géographie électrique de Hong Kong. Confession of Pain y parvient également de manière très attractive qu’il n’est cependant pas possible d’estimer pleinement avec le format rogné de cette édition DVD, amputant l’image et le cadre d’origine de telle sorte que la sensation de flottement spatial dans les intérieurs que le scope accentue terriblement à cause de l’importante largeur du format, est atténuée. La scène où Bong revit mentalement l’assassinat du beau-père de l’inspecteur Hei est d’ailleurs très intéressante à cause du contraste étrange entre les images mentales en noir et blanc à la luminosité fluctuante qu’il imagine et son personnage en couleur qui semble explorer le film des événements de manière totalement extérieure.
La déception est d’autant plus forte que ce film qui était très attendu arrive après la très réussie trilogie des Infernal Affairs par laquelle le scénariste Felix Chong et ses deux compères réalisateurs, Alan Mak et Andrew Lau, ont déclenché, la nouvelle vague du polar noir de Hong Kong. Les infiltrés (2006), l’adaptation des infernal affairs par Martin Scorsese a raflé 4 statuettes aux derniers Oscars ce qui explique sans doute pourquoi Hollywood a déjà prévu de faire un remake de Confession of Pain. Alors que le trio à l’origine d’un renouveau du polar hongkongais après l’exploration des nouveaux territoires du polar made in Hong Kong titube sur le genre avec cet opus voulu sombre, plusieurs Polar Hongkongais comme SPL (2005) de Wilson Yip, Dog Bite dog (2006) de Pou Soi Cheang, Exilé (2006) de Johnnie To ou Invisible Target (2007) de Benny Chan ont marqué l’actualité récemment en enfonçant le clou. Inévitablement, celui des réalisateurs hongkongais qui surnage grâce à sa capacité d’invention et sa société de production Milkyway Images, est Johnnie To dont ont a pu découvrir récemment sur grand écran, les deux volets du diptyque Election, confirmation qu’il y a un maître hongkongais en marche depuis quelques années à Hong kong, un grand styliste de l’image, preuve que sa présence dans le trio de réalisateur Ringo Lam, Johnny To, Tsui Hark, à l’origine du projet Triangle (2007) n’est pas un hasard.
Verdict
Après avoir suscité beaucoup d’attentes suite à la réussite de la saga des Infernal Affairs, Confession of Pain le dernier opus du trio Felix Chong, Alan Mak et Andrew Lau ne parvient pas à se hisser au même niveau en dépit d’une distribution étoffée et de conditions économiques favorables. Bien que très moyen et directement distribué en édition DVD et sur VOD qui plus est avec une image rognée sur l’édition DVD Mk2, Confession of Pain à quelques qualités dont sa photographie récompensée par l’Award de la meilleure photographie au Hong Kong Film Awards 2007, une bande originale typée et quelques stars.
Le master est très propre et l’image impeccable. L’étalonnage du master pellicule a été correctement restitué contrairement au format d’origine qui est rogné pour passer du format 2.35:1 au format 1.85:1. Les noirs sont profonds et la colorimétrie équilibrée. Une bonne image d’où émerge le bleu électrique de la nuit avec une photo comme nous y a habitué le duo Andrew Lau / Alan Mak (Andrew Lau ayant débuté en tant que Chef-opérateur sur
As tears go By de
Wong Kar-wai notamment) qui met Hong kong en image comme un personnage à part entière parfois filmé de nuit en hélicoptère et toujours baignée des lumières des néons. Le point fort du film est indéniablement sa photo qui nous gratifie de magnifiques couleurs sur les scènes tournées de nuit dans les bars, les intérieurs ou la chambre de développement photo de Jing Lei Xu. De plus on note un gros travail sur le cadrage et les déplacements de caméra qui donnent la sensation de flotter en explorant les espaces exigus des intérieurs. Cependant, à ma grande surprise et contrairement à ce qui est annoncé dans le dossier de presse de Mk2, le format 2.35:1 d’origine n’a pas été respecté et l’image a été retaillée pour passer en 1.85:1. Non seulement le principe est très discutable car injuste pour n’importe quelle production audiovisuelle mais dans le cas des films où la photo et le cadre sont le point fort comme pour Confession of pain qui a reçu le prix de la Meilleure direction de la photographie aux Hong Kong Film Awards 2007 (l’unique prix remporté sur 7 nominations), cela devient scandaleux et incompréhensible. Après les soucis sonores sur deux DVD coréens de Kubik vidéo (
A family,
Springtime), ce problème d’image rognée sur une édition DVD Mk2 qui nous a habitué à mieux, nous laisse penser que certains éditeurs s’emballent en voulant sortir des titres quittes à être moins regardant sur la qualité des éditions...
Bonus
Making-of (15mn) où les choix de distribution sont expliqués tandis que l’équipe de réalisateurs confie avoir pensé confier le rôle de la femme de Tony Leung joué par Jing Lei Xu à Shu Qi. Le côté fofolle de cette dernière a paru cependant plus approprié pour incarner le rôle de la fantasque hôtesse de bar. Confession of pain est un film à casting qui permet de faire jouer Tony Leung et Chapman To à contre-emploi, le premier incarne un méchant contre son image de séducteur et le second doit jouer sérieusement dans un film sombre contrairement à ses rôle comiques comme dans le récent Initial D. Le making-of consacre quelques instants au fonctionnement du trio composé par les réalisateurs Andrew Lau et Alan Mak et du producteur Félix Chong expliquant par ailleurs que leur film est hongkongais, commercial et a mobilisé de nombreuses ressources (par exemple le blocage d’une rue entière ou la reconstitution de la fête de noël). Un document choral à la réalisation soignée qui renferme quelques informations intéressantes sans constitué pour autant un document exceptionnel.
Conférence de presse (10mn) : bon enfant et convivial où les réalisateurs et la distribution principale sont présentés à un public conquis d’avance. L’équipe parle de son rapport au projet et les acteurs aux personnages qu’ils doivent interpréter. Tony Leung explique qu’ils ont beaucoup travaillé sur le passé de son personnage qui est le plus complexe de l’histoire car les motivations sont totalement liées à son enfance.
Interviews exclusives de Andrew Lau, Alan Mak, Tony Leung et Félix Chong(8mn) : où les deux réalisateurs expliquent que Tony Leung voulait incarner le personnage joué par Takeshi Kaneshiro plutôt que celui du méchant à cause d’une appréhension. Il est vrai que Tony Leung a incarné beaucoup de rôle de gentil ou d’amoureux et qu’il a sans doute une crainte de se retrouver face à un aspect sombre de sa personnalité dans la mesure où comme le dit Andrew Lau, il ne joue pas le personnage, il est le personnage. Le rôle a donc été taillé sur mesure ce qui permet à Tony Leung de passer une étape importante en tant qu’acteur en dépit des clins d’œil à Chungking Express que les réalisateurs ont voulu placer dans confession of pain. Le matricule de Tony Leung est le 6336 dans les deux films et ils se plaisent à imaginer que Confession of pain est une suite du destin des deux personnages masculins incarnés par Tony Leung et Takeshi Kaneshiro, devenus célibataires à la fin de Chungking Express. Andrew Lau tente d’analyser sa vision de l’amour et des relations de couple que l’on voit dans le film.
Bandes annonces (2mn 12)
Menus
L’interface a bénéficié d’un effort graphique à l’image de la pochette.