L'histoire :
Au 16ème siècle, les hauts dignitaires coréens sont victimes d’assassinats perpétrés par un sabreur mystérieux et sanguinaire. Le chef de l’armée, Gyu-yeop, suspecte que ces exécutions sont l’œuvre de Ji-hwan, un ancien ami de l’école militaire qu’il a lui-même assassiné des années plus tôt !
Critique subjective :
Sword in the moon propose une distribution plutôt intéressante puisqu’on y retrouve deux très bons acteurs coréens. Cho Jae-hyeon qui incarne Gyu-Yeop est un habitué du cinéma de Kim Ki-duk, l’un des plus grands cinéastes actuels avec lequel il a tourné 5 films (Crocodile (1996), Wild animals (1996), l’étrange L’île (2000), le formidable Adresse inconnue (2001) et
Bad Guy (2001) qui aborde la rencontre amoureuse que
Locataires (2004) traite de manière magistrale). A ses côtés on retrouve
Choi Min-su, un des acteurs coréens les plus demandés qui a connu son premier vrai succès avec la comédie romantique A marriage Story (1992) déjà avec le réalisateur Kim Eui-suk et que l’on a pu voir récemment dans
Yesterday (2002),
Phantom the submarine (1999) ou My wife is a gangster (2001).
Il y a peu de films de sabre où éclate de façon aussi réaliste la force brutale et lyrique des guerriers qui s’affrontent. Sword in the moon est de ceux-là et ça n’est pas la seule qualité d’un film dont la singularité n’a pas échappé à Jean-pierre Dionnet et à
Tsui Hark qui lui a confié que c’est dans cette direction qu’il souhaitait aller pour son prochain film de sabre (
Seven swords, 2005) qu’il voulait teinter de plus de gravité et d’authenticité. Ce film de sabre coréen est à l’opposé de
Légende of Zu car tourné en décors naturels sur le sol coréen et reposant sur des combats authentiques menées par quelques-uns des meilleurs cavaliers et sabreurs de Hong kong et de Corée. Il n’y a donc pas d’effets particuliers à base de câble pour créer des déplacements aériens des combattants et point de comportements contre-nature à part peut-être une fois où Ji-Hwan le sabreur renégat incarné par Choi Min-su accomplit un saut un peu suspect.
Sword in the moon c’est le film de sabre réel qui semble s’inscrire dans la filiation des 7 samouraïs loin des extravagances du Wu Xia pian câblé de Hong Kong notamment. On se rapproche aussi de
L’empereur et l’assassin fresque historique et pendant réaliste de l’unification des 7 provinces de Chine dont l’histoire a également été relatée dans Hero de manière plus extravagante. Dans cette optique réaliste, on remarque qu’une attention particulière a été portée sur les costumes et les armes utilisées dans Sword in the moon. Il s’avère que la production a fait fabriqué spécialement 261 armures dont les matériaux donnent une forte présence aux combattants, 44 sabres en acier, 100 arcs et plus de 7000 autre engins de destruction.
Si Hero (2002) et
L’empereur et l’assassin (1999) narraient l’unification des 7 provinces de Chine et donc la création de la Chine, Sword in the moon parle aussi de la situation politique des deux Corées comme de nombreux films sud coréens l’abordent. The President’s Last Bang (2005) de Im Sang-Soo (
Une femme coréenne en dvd chez Arte vidéo) abordait ce thème de manière carrément burlesque,
Frères de sang (2004) de Jae-Gyu Kang met le pied dans le plat en retraçant la guerre fratricide entre les deux Corées mais aussi entre deux frères que les évènements politiques vont amener à devenir ennemis. Sword in the moon parle aussi de la fin d’une amitié entre deux amis inséparables qu’un complot politique va pourtant détruire. Le moteur historique de la division de la Corée repose sur des luttes politiques intestines opposant les amis d’hier que le cinéma sud coréen n’a de cesse de vouloir réconcilier en tournant des films à toute vitesse comme par peur des lendemains incertains et d’un régime nord coréen belliqueux.
La scène finale (à partir d’1 heure 27) est d’une certaine beauté en particulier lorsque de nombreux soldats tournent autour de Ji-Hwan qu’ils encerclent. Il y a là une chorégraphie et une mise en scène qui renforce à la fois l’isolement du guerrier rebelle face à la horde du dictateur. Les deux anciens amis ont un destin incertain mais les guerriers meurent debout.
Verdict :
Sword in the moon est le film de sabre de qui vient en contrepoint de La Légende de Zu de Tsui Hark, film de sabre halluciné où le réalisateur s’affranchit des effets à base de câble pour ceux plus vastes des effets numériques. Kim Eui-suk a produit un film qui n’est pas un chef-d’œuvre mais qui va dans le sens de ce qu’envisageait Tsui Hark pour son récent film de sabre Seven Swords. Un film qui remet à l’honneur les combats aux sabres au sol et les regards fermés des guerriers que l’on sent contenir une fureur dissimuler.