La vie des autres

Titre Original
Das Leben der Anderen
Genre
Pays
Allemagne (2007)
Date de sortie
jeudi 25 octobre 2007
Durée
137 Min
Producteurs
Max Wiedemann
Scénaristes
Florian Henckel von Donnersmarck
Compositeur
Gabriel Yared
Format
Dvd 9
Informations
Complémentaires

La Stasi, diminutif de Staatsicherheit (sécurité de l'état), fut créée le 8 février 1950, afin de satisfaire à des missions d'intelligence : renseignement, espionnage, contre-espionnage. Elle fut surtout détournée à des fins politiques pour surveiller et mettre sous pression tout opposant au régime politique. Elle cessa toute activité et existence officielle avec la chute du mur de Berlin, en 1989.

Critique Cinéma
Langues
PCM
Label
SS.Titres Film
SS.Titres Bonus
SS.Titres Commentaire
Allemand
Non
Non
Non
Français
Oui
Oui
Oui
Le Film
Critique de Christophe Gauthier
Editeur
Edition
Standard
Label
Zone
2
Durée Film
137 min
Nb Dvd
1

SYNOPSIS

 Georg Dreyman (Sebastian Koch) est un dramaturge est-allemand reconnu par ses pairs et le régime politique. Il vit avec l’actrice Christa-Maria Sieland (Martina Gedeck), parfois associée à ses pièces. La vie du couple est secrètement scrutée par Wiesler (Ulrich Mühe) , un agent de la Stasi chargé d’enquêter à charge contre Dreyman, jugé trop honnête par le pouvoir. De son poste, Wiesler perçoit chaque mot, chaque parole partagée. Il voit aussi qui partage l’intimité du ménage. Méticuleusement, il en rapporte la vie privée et mondaine jusque dans ses moindres détails. A première vue, il ne semble y avoir aucun motif justifiant cette surveillance. C’est alors qu’Albert Jerska, ami de Dreyman, se suicide.

LA CRITIQUE

 C’est désormais un fait avéré : le cinéma allemand retrouve toute sa consistance avec l’avènement d’une nouvelle vague de réalisateurs. Tout auréolé de noms aussi prestigieux que Murnau, Fassbinder, Herzog, Wenders et autres Schlöndorff, le cinéma allemand peinait à retrouver son souffle. C’est néanmoins le succès de films comme Cours Lola, Cours, La Chute ou Head-On qui a infirmé ce déclin, à notre plus grand plaisir.

 Pour son premier long métrage, Florian Henckel von Donnersmarck s’est ainsi attelé à un projet ambitieux. Traitant de la Stasi sous la RDA, l’originalité du projet a consisté à injecter de l’humain à cette sombre période, à peindre en clair-obscur les motivations de ces hommes et femmes de l’ombre. Désireux de s’affranchir des clichés inhérents au thème qui le préoccupe ici, le réalisateur a traqué pendant sept ans le moindre détail. La difficulté fut de poser le cadre de son film dans un Berlin aujourd’hui disparate et polycentré, tout comme il fallut redonner un aspect terne à des rues berlinoises bien plus bigarrées et vivantes que notre inconscient ne le laisse au premier abord supposer. Ce souci de vraisemblance aura par exemple nécessité la mise au rebut de nombreux signes de signalisation. De l’évacuation des rues de Berlin à l’investissement des locaux de la Stasi sur la Normannenstrasse, tout a ainsi été fait pour traduire un sentiment d’oppression et de désertion. Par extension, c’est aussi la vacuité de la vie des agents de la Stasi qui transparaît à travers l’indigence de leurs attributs, en contraste avec la vie autrement plus trépidante de ceux qu’ils observent.

 Le film joue ainsi sur les nuances et refuse de céder au manichéisme. Les cordes et ficelles utilisées par le pouvoir sont exposées sans détours, mais de manière très subtile. Wiesler est ainsi un personnage complexe. Tenu au secret, il s'ouvre à mesure du récit aux « autres ». Or, cette ouverture coincidera quelques années plus tard avec la chute du mur de Berlin. Par une triste ironie du sort, l’impersonnalité des rapports humains sous la Stasi cèdera sa place à la banalité et l’anonymat des relations sociales au sein d'une Allemagne en rémission. Un simple « bonjour » à l’adresse d’un libraire reste ainsi sans réponse, et ce silence même nous renvoie au cœur de la problématique. Car c’est bien de ce rapport à l’anonymat dont il est question ici. De tous ces agents furtifs de la Stasi qui auront, dans un sens ou l’autre, influé sur le cours de l’Histoire. Implicitement, la dédicace faite par Dreyman dans sa « Sonate des Hommes Bons » est un hommage à tous ceux réduits aujourd’hui à l’état d’archives. Pour la postérité, Wiesler ne sera guère plus qu’une fiche sujet indexée à l’entrée HGW XX-7, mais il restera dans le cœur de Dreyman comme un homme de grande bonté.

Par ailleurs, le film évite de sombrer dans le piège du voyeurisme. Bien que le spectateur s’identifie à Wiesler et observe lui aussi l'intimité du couple, les scènes les plus difficiles nous sont épargnées, et cette "vie des autres" se révèle finalement bien plus insinuée que littéralement jetée en pâture. On pourra toujours questionner cette retenue, arguant que l’ambiguïté des personnages favorise une vision nostalgique de la RDA.  Tout comme La Chute rendait la figure d’Hitler beaucoup plus humaine, on serait presque tenté de plaindre tous ceux qui ont été instrumentalisés par un système impitoyable. Pourtant, contre toute attente, le parti pris du film fait mouche, et c’est bien la compassion qui l’emporte, que l’humain dame le pion à la déraison et au cynisme. L’écueil du film, qui résidait dans cette trop forte empathie avec l’agent Wiesler, est alors évité.

PLUS LOIN

 Il en ressort ce constat d’une Allemagne de l’Est exsangue, pillée sans vergogne par de hauts fonctionnaires ayant instrumentalisé leurs concitoyens à des fins sordides. La librairie où Wiesler achète le livre de Dreyman est déserte, tout comme les rues sont dépeuplées. Ce qui prédomine, c’est cette impression de deux pays coupés par un mur, tout autant que d’individus mis en quarantaine et dont on a asséché l’intimité. Mais La Vie des Autres est une oeuvre qui a beaucoup de coeur. Le final du film laisse ainsi entrevoir l’espoir d’une probable reconstruction pour l'Allemagne, d'une possible rédemption pour les individus. Cet espoir, suscité par un mensonge providentiel entre deux écrivains, par le combat tacite de deux amants souillés par le pouvoir, mais aussi par la rétention et le maquillage des faits par Wiesler (éveillé à la responsabilité par ses lectures d'écrivains allemands), fait écho à une période noire qu'il faudra dépasser, mais certainement pas oublier.

La Vie des Autres entremêle ainsi brillamment les genres. Plutôt qu'un film d'espionnage ou historique, la tonalité la plus marquée est bien celle du drame psychologique. 

 Néanmoins, le thème de l’engagement littéraire, toujours impérieux dans un contexte historique difficile, nécessitait peut-être un regard plus abouti. On peut reprocher au cinéaste de brasser large et, sous prétexte de poser un œil panoptique, de ne pas développer davantage le rapport de l’écrit à la liberté. La lutte contre l’asservissement est d’abord intellectuelle lorsque les populations sont surveillées, disséminées. La Vie des Autres pose ainsi un mode d’espionnage fondé sur l’écoute.  Mais c’est pourtant bien l’écrit qui fait acte de liaison et de rassemblement dans un pays déconstruit. Et c’est par extension l’opinion de l’alter-ego occidental qui se trouve prise à partie. Car l’écrit porte plus loin que la voix, il traverse les murs et les époques.

 Ce dernier point pour souligner que, dans la conquête de la liberté, ce sont bien les mots qui sont salvateurs. Citons Paul Eluard à cet égard :

Par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

L'image
Couleurs
Définition
Compression
Format Vidéo
16/9 anamorphique couleur
Format Cinéma
1.85:1
La belle photographie de La Vie Des Autres devait se parer d'un master de premier ordre. L'essai est transformé en beauté avec l'apport d'une colorimétrie nuancée et toujours juste. On bascule ainsi du noir froid et profond des nuits berlinoises aux teintes plus chaleureuses de l'appartement de Dreyman. Excellente image donc.

Le Son
Langue
Type
Format
Spatialisation
Dynamique
Surround
Français
5.1
Allemand
5.1

La partition subtile de Gabriel Yared se voit ici bien mise en valeur par un mixage cohérent. Les pistes allemandes et françaises prennent de l'ampleur sur les sonates tandis que l'équilibre entre ambiances et dialogues est parfait. Petit bémol pour le doublage français, assez artificiel, les voix étant mixées trop haut. De toute évidence, le film est à voir en VO.


Les Bonus
Supléments
Menus
Sérigraphie
Packaging
Durée
0 min
Boitier
Amaray

Le commentaire audio du réalisateur sonne juste. L'exemple même de ce qui se fait de mieux dans le genre. D'ordinaire, les commentaires audio s'embarrassent de fioritures. Ici, l'essentiel est dit. Florian von Donnersmarck nous raconte son projet de A à Z, sans ambages. La touche allemande peut être, très rigoureuse.

Le commentaire audio de l'acteur principal, Ulrich Mühe, est intéressant à plus d'un titre. D'abord, parce que cet acteur, homme de théâtre et de télévision, est décédé l'été dernier (juillet 2007). Ensuite, parce que son histoire personnelle est intimement liée au sujet abordé ici. De 1979 à 1989, il fut ainsi supposément surveillé par une collaboratrice de la Stasi, qui n'était autre que ... sa deuxième femme! L'acteur nous abreuve donc de réflexions plutôt pertinentes, et surtout émouvantes.

Un making of (20") qui pour une fois, ne se résume pas à une simple featurette déguisée. Les intervenants sont nombreux, et leurs commentaires souvent à-propos. Néanmoins, il manque le principal : aucune image du tournage lui-même !

Scènes coupées et commentaire du réalisateur (8"30) : rien d'exceptionnel à signaler.

Documentaire "au coeur de la Stasi" (15") : A la fois très court et très instructif. D'une concision très allemande donc. Déjà auteure de l'ouvrage Une société sous surveillance : les intellectuels et la STASI, Sonia Combe nous propose un regard avisé sur le film, et sur les méthodes bien spécifiques à la Stasi. A voir de toute urgence pour développer des connaissances sur le sujet.

Bonus
Livret
Bande annonce
Biographies
Making of
Documentaire
Interviews
Com. audio
Scènes sup
Fin alternative
Galerie de photos
Story board
Multi-angle
Liens internet
Interface Rom
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