Ancien braqueur fiché au grand banditisme, Michel Vaujour a toujours préféré la fuite à la prison, l’aventure à la soumission, la liberté à la loi. En l’espace de 30 ans, il aura passé 27 ans en prison, dont 17 en cellule d’isolement et sera parvenu à s’en échapper à cinq reprises avant d’obtenir une libération conditionnelle en 2003. Si cette vie l’a souvent exposé au pire, elle l’a aussi confronté à un incroyable face-à-face avec lui-même. Avec le temps, cette fuite en avant est devenue une ascension intérieure, une esquisse de philosophie où il lui a fallu vaincre une certaine idée de soi, de la vie et des autres. C’est à ce voyage initiatique que nous convie le film.
« Ne me libérez pas je m’en charge » est un film intriguant sur le passé de ce bandit de grand chemin qui préféra passer ses jours dans la fuite plutôt que de les passer en prison. Troublant, parce d'autant qu’il exerce une sorte de fascination autour de ce personnage hors norme, qui toucha la mort du plus prêt, qui ne voyait en la liberté que l’unique moyen de vivre. Emouvant, parce que l’homme qui se cache derrière le bandit, fait preuve d’une véritable intelligence et pose un regard sans concession sur son passé. Surtout lorsqu’il se retrouve face à ses neveux qui lui parle de son passé comme de faits de guerre, Michel Vaujour se fait moins idyllique et évite consciencieusement de grossir le trait de quelques manières que ce soit.
La réalisatrice d’ailleurs, ne semble pas vouloir aller dans l’exceptionnel, ni dans l’apologie, elle préfère emmener l’ancien braqueur dans une réflexion plus philosophique et spirituelle, sur ce qui a été sa vie, pour ne pas plonger le spectateur dans une ambiguïté qui pourrait s’avérer malsaine. Interviewant les proches, provoquant des dialogues (Entre Michel Vaujour et sa mère, ou sa sœur) déterrant des secrets de famille, tout y est pour faire du sensationnel et il n’en n’est rien. Car la réalisatrice tient à garder une certaine distance et préfère laisser parler les êtres pour mieux nous aider à les comprendre, en toute pudeur et dans le plus grand respect.
Quand à Michel Vaujour, on apprécie évidemment le discours sincère et juste sur un passé qu’il ne peut renier, qu’il assume au contraire avec beaucoup de nuance, sans jamais sombrer dans « le donneur de leçon un peu facile ». L’ancien braqueur garde son passé comme une leçon de son histoire, ne se dédouane jamais et porte un regard intéressant sur l’avenir. L’homme semble avoir repris le pas sur le bandit et son regard n’est jamais caricatural, bien au contraire.
Le documentaire, par un montage souple et linéaire, devient vite hypnotisant, on se laisse facilement aller à la passion pour la réflexion et pour le parcours de ce bandit, qui finit par trouver le repos dans la spiritualité, et qui en garde toujours une grande force. Au-delà d’une leçon de repentir, on assiste finalement médusé à une véritable leçon de vie.
En conclusion, « Ne me libérez pas je m’en charge » est un documentaire passionnant autant qu’intriguant sur le parcours et la rédemption d’un ancien braqueur.