Pat est interné dans un hôpital psychiatrique, depuis qu’il a été diagnostiqué Bipolaire, à la suite d’une agression dont il fut l’auteur. Il tente alors de se reconstruire, et au hasard d’une rencontre avec une jeune femme meurtrie par la vie, ils vont, ensemble chercher le bonheur.
Des comédies intelligentes sur les troubles psychiatriques, on n’en voit pas tous les jours et il faut parfois attendre une décennie pour y arriver. Souvent parce que les scénaristes ne peuvent s’empêcher de forcer le trait sur la pathologie, et donner ainsi à leurs personnages des allures d’handicapés mentaux profonds qui les font sombrer du même coup dans la caricature. Pour son film, qu’il a voulu comme une sorte de thérapie justement, pour avoir vécu l’enfer des troubles du comportement chez son fils aîné, le réalisateur s’est inspiré du roman de Matthew Pick : « The Silver Linings Playbook ». Une œuvre qui a l’intelligence de dépeindre un personnage, en course permanente pour le bonheur sans pour autant parvenir à le toucher. Le personnage n’est jamais dans la caricature, bien au contraire, le réalisateur a su trouver toute la matière nécessaire pour décrire un trouble du comportement handicapant, parce qu’il peut pousser à tous les excès par des crises de colères incontrôlables.
En ciselant son personnage avec beaucoup de tendresse et de justesse, David O’Russell (Fighter) signe là un film drôle et émouvant, où la pathologie de son héros, s’entrechoque avec les angoisses, les tendresses des autres qui gravitent autour pour finalement faire face à une idée différente du bonheur, une vision qu’il n’avait pas envisagé, celle où l’on chute pour mieux se relever. Pat ne voyait qu’une issue dans une reconstruction qui englobait son ex-femme Nikki, il va découvrir une autre voie. Et c’est là toute la force, la maladie devient porteuse d’un message idéalisant qui tend à prouver que le bonheur reste à la portée de mains de celui qui trouve la force de regarder à côté de lui.
Et la mise en scène de David O’Russell est particulièrement ciselée, elle emmène le spectateur dans une histoire sobre et hors du commun avec beaucoup de tendresse et une humilité qui fait du bien à voir. Il sort de tous les pièges de la caricature pour que son message passe avec suffisamment de subtilité pour ne pas sombrer dans la démagogie, ni dans la comédie sentimentale balourde.
Pour cela il s’appuie sur une distribution dont il parvient à tirer d’abord le meilleur, notamment le couple Bradley Cooper (Very Bad Trip) et Jennifer Lawrence (Hunger Games). En effet le comédien sort radicalement de son image de « beau gosse » ténébreux transgressif, pour donner une composition toute en nuance et en subtilité de son personnage. Comme Leonardo Di Caprio avant lui dans « Gilbert Grape », Badley Cooper a compris que son personnage souffrait d’une pathologie mentale, handicapante, mais pas caricaturale et que son combat nécessite toute une palette de sentiments pour lui donner corps. Et sa palette notamment comprend la réciprocité, avec sa partenaire qui fait preuve d’un talent remarquable pour une jeune fille de son âge. La comédienne cisèle sa prestation pour être l’exact complément de Cooper. Mais le réalisateur a surtout réussit à entraîner Robert De Niro (Raging Bull) dans l’une de ses plus émouvantes prestations. Tout au long du film, l’acteur cristallise son jeu, explore un registre qu’il avait rarement abordé et libère une force émotionnelle rarement atteinte jusqu’ici.
En conclusion, « Happiness Thérapy » est un superbe leçon de cinéma, tant du côté de son réalisateur et scénariste, qui signe là une œuvre très éloignée des caricatures habituelles, mais aussi une mise en scène rigoureuse qui tire le meilleur de sa distribution et touche même aux instants de grâce. A voir absolument !