Montréal, le jour de Noël, Maia et sa fille, Alex, reçoivent un mystérieux colis en provenance de Beyrouth. Ce sont des cahiers, des cassettes et des photographies, toute une correspondance, que Maia, de 13 à 18 ans, a envoyé de Beyrouth à sa meilleure amie partie à Paris pour fuir la guerre civile. Maia refuse d’affronter ce passé mais Alex s’y plonge en cachette. Elle y découvre entre fantasme et réalité, l’adolescence tumultueuse et passionnée de sa mère dans les années 80 et des secrets bien gardés.
Certains films sont là pour nous rappeler que le passé ne fut pas toujours glorieux et que certaines blessures sont encore difficiles à panser. C’est le cas de « Memory Box » qui revient avec douceur mais sans concession, sur les ravages de la guerre au Liban. Durant plus de 15 années, cette guerre dont la complexité reste un cas d’école, tant elle prit plusieurs sources, entre l’instabilité du Moyen-Orient avec le conflit Israélo Palestinien, les tensions religieuses internes et les crises économiques qui ne cessent de se succéder. Le pays sombre dans le chaos et la jeunesse qui doit se construire ne connaît que le bruit des bombes, le rythme des courses effrénées pour se mettre à l’abri, mais également, les traumas de l’exode qui pousse environs un million de personnes sur les routes à la recherche d’une vie de paix et de sécurité.
C‘est dans ce contexte les amitiés se trouvent compliquées par les choix des uns et des autres, mais peuvent faire naitre des histoires remarquables comme celle que vécu la réalisatrice, dont le scénario est inspiré. Cette dernière entre 13 ans et 18 ans entretint une correspondance avec une amie partie vivre en France. Comme dans le film elles s’envoyaient des cassettes, des cahiers et des photos, puis le temps faisant son office aidé par la distance elles se perdirent de vue. Loin d’être un film autobiographique, « Memory Box » reprend la base de cette histoire pour lever un voile sur une guerre qui semble bien lointaine mais que l’actualité du moment rappelle à nos souvenirs, le scénario signé des deux réalisateurs Khalil Joreige (A Perfect Day) et Joana Hadjithomas (Je Veux Voir) et de Gaelle Macé (Les Anarchistes)nous plonge dans une mémoire qui ne veut pas se réveiller pour ne pas raviver les blessures de ce conflit et nous expose ainsi la vie au cœur de ce conflit entre engagement, peur et résignation, mais surtout une envie furieuse de survivre et de garder l’espoir de voir renaitre son pays de ses cendres.
La mise en scène ne herche d’ailleurs pas à accumuler de scène choquante, mais plutôt à garder une touche d’optimisme qui puisse donner espoir aux autres populations plongées dans la guerre. En mélangeant parfois des techniques, et en limitant les effets spéciaux, excepté lorsque cela sert la narration, comme les scènes où l’image semble fondre sou l’effet de la chaleur du projecteur, les réalisateurs donnent à leur film une consistance presque artisanale qui vient servir le choix de faire dans la simplicité. A travers cette mise en scène les réalisateurs choisissent de parle de leur pays durant un conflit où la jeunesse s’y forge une volonté et les plus anciens restent farouchement attachés à leur terre, à leur pays et tentent par tous les moyens de participer à faire revenir la paix, même si le danger est toujours présent. Les réalisateurs privilégient les personnages et les subjectivités plutôt que le choquant ou le voyeurisme d’usage dans ce type de sujet. Privilégiant les couleurs chaudes, les plans rassurants et une narration plus en souplesse pour ne pas plonger dans le film de guerre pur jus, ils donnent une vision différente de ce confit et permettent de garder toujours une vision positive de la destinée de chacun des personnages. Quels que soit le choix de chacun dans ce conflit, ils finissent tous par trouver la voie qui les destinait à sortir de ce conflit coute que coute.
« Memory Box » est un film touchant, qui lève un voile que les « millénaires » ont certainement oublié dans des livres d’histoire, mais qui reste marquant dans l’histoire du Moyen Orient. Sans sombrer dans le film de guerre choquant pour choquant, le film aborde le conflit sur l’angle des liens humains, de l’amitié, de la jeunesse et apporte un discours où l’espoir reste toujours présent, même s’il est accompagné par la peur et le drame.