Le Film
Critique de Maxstar
Editeur
Edition
Standard
Label
Zone
2
Durée Film
118 min
Nb Dvd
2
Des étrangers en provenance de Téhéran arrivent pour un court sejour à Siah Dareh, un village du Kurdistan iranien. Les habitants ignorent la raison de leur venue. Les étrangers flanent surtout dans l'ancien cimetiere et font croire aux villageois qu'ils sont à la recherche d'un trésor. Mais ils sont là pour faire ce qui semble être un reportage sur un enterrement. Seulement la vielle dame qui doit mourir a décidé de rester en vie encore quelques temps...
Le vent nous emportera n'est pas facile d'accès, c'est une certitude... Plus encore que dans ses précédents films, Abbas Kiarostami met en abîme son cinéma, joue avec le temps, regroupe une bonne partie des thèmes qu'il avait abordé jusque là et les transcende. Film somme et probablement, à l'instar d'un Intelligence Artificielle chez Spielberg, film tombeau dans la filmographie du metteur en scène iranien, Le vent nous emportera a effectivement beaucoup a donner, mais la forme sous laquelle il délivre ce qu'il a à dire va demander une certaine attention, voire peut-être même une certaine "pratique" (loin de moi cependant l'idée d'élitisme sous une forme ou sous une autre). Et je pense, autant le dire clairement, qu'il suffit de regarder le film un jour où l'on est fatigué ou toute autre chose qui nous mènerait à ne pas y être préparé, pour s'ennuyer et définitivement passer à côté d'une richesse livrée brute, sans explication. Il sera peut-être même parfois difficile de ne pas relâcher son attention, même entraîné, dans le sens où le film lui-même nous plonge, en même temps que ses personnages, dans l'attente, dans l'expectative même, d'une mort qui n'arrivera que très tard. Une fois que l'on arrive à dépasser ce sentiment, les questions que vient poser Kiarostami deviennent évidentes; le temps et les détours que fait le réalisateur s'expliquent alors naturellement, et les questions irrésolues ne sont plus un réel problème.
Si Kiarostami se refuse à expliquer ses films, où plutôt à y insérer trop d'éléments de compréhension, trop d'éléments terre à terre, rassurants, que semble exiger le spectateur contemporain, je vais peut-être devoir, de mon côté, me garder d'en faire autant. A film obscur, difficile de parler en termes clairs, difficile également avec la mise en abîme appliquée ici de ne pas en arriver à parler de soi plus que d'un film qui pourtant s'adresse autant à une conscience collective qu'à l'individu dans tout ce qu'il a de plus personnel. Enfin voilà, "nous y sommes", dirait Kubrick. Deux choses essentielles, il me semble, viennent donc s'imposer au fil des plans. La première, c'est cette idée d'un film somme, aboutissement ultime dans la carrière d'un réalisateur, et qui va se trouver être chez Kiarostami son dernier film avant un revirement de l'extrême (on va le voir plus loin). On se demande d'ailleurs vers où le metteur en scène aurait pu se tourner après un tel film, s'il avait voulu rester dans la continuité... Quoiqu'il en soit, on retrouve donc dans ce film plusieurs éléments (la plupart, probablement) qui font partie des thèmes de prédilection du réalisateur. Si avec Ten la femme va devenir le point de repère principal de son cinéma, c'est l'enfance qui aura jusqu'à ce Vent nous emportera, donc, porté une bonne partie de ce qu'avait à dire Kiarostami. Ici, l'enfant devient un guide que l'on suit, que l'on écoute. L'oeil est neuf, mais pourtant éclairé. A chaque plan, pendant toute une partie du film, on sent indéniablement la présence de cet enfant, habitué aux lieux, et qui contraste avec ces "étrangers", clairement d'un "autre monde", que la population observe, étonnée voire inquiète... Ces étrangers, d'ailleurs, qui sont-ils? Et notamment ce réalisateur/photographe, ce "Monsieur l'Ingénieur" que tout le monde ici semble voir comme tel, qui est-il? Est-ce que, à la manière de son cinéma où la mise en scène s'accompagne toujours d'une part importante de réalisme, ce personnage ne serait pas, plus ou moins, un Abbas Kiarostami en train de remettre son propre statut en cause? C'est probablement une idée à suivre...
A la manière d'une certaine angoisse que l'on peut éprouver en se rendant compte qu'un film, on ne peut évidemment pas le découvrir deux fois (le monde est quand même mal fait ^_^) parce que notre regard a changé entre temps (et ce que renvoie le film a également changé, par ricochet), Kiarostami a peur; peur d'oublier le premier regard qu'il a porté sur une plaine, un village, un arbre, une population ou bien sur un ami de longue date; peur de montrer avec sa caméra une vision qui n'est plus celle qu'il avait eu lors de sa première rencontre avec un lieu, une personne. Cette volonté d'offrir au spectateur une vision neuve, manipulée au minimum, de l'environnement dont il veut parler, s'accompagne depuis 30 ans d'une recherche permanente de l'épure cinématographique. Se refusant totalement à tout effet "marqué" de mise en scène, sa caméra est donc souvent fixe (les seuls mouvements "permis" étant ceux liés au panotage). Un exemple intéressant : il préfère un simple panoramique pour suivre deux personnes qui marchent à une caméra placée sur rails qui se déplace en même temps que les personnages et qui met le décor en mouvement : "Ca n'est pas réaliste", s'exclame-t-il, "je n'aime pas ce plan, c'était pour ne pas démotiver mon équipe.". Cette économie de mise en scène n'empêche pas Le vent nous emportera d'être visuellement extraordinaire. Comment ne pas succomber face à la beauté de ces champs de blé aux couleurs quasi surréalistes à perte de vue, face à ces paysages à la profondeur de champs impressionnante (pour ne pas dire vertigineuse), ou bien au contact de ce premier plan évocateur qui pourrait à lui seul résumer le film?
Ce premier plan, parlons en... Une voiture suit une route sinueuse, s'éloigne puis se rapproche, au fil des virages, de sa destination. Ce chemin torturé, de toutes les hésitations, est celui qu'emprunte Kiarostami depuis ses débuts en tant que cinéaste. Toute oeuvre humaniste que puisse être Le vent nous emportera (je n'en parlerai plus ici, il faudrait un article séparé), le film d'Abbas Kiarostami est peut-être, avant tout, un film sur le cinéma, un questionnement sur son propre cinéma. On l'a vu plus haut, si "Monsieur l'Ingénieur" n'est pas Kiarostami lui-même, ses maladresses, les sonneries frénétiques de son téléphone portable (quel douloureuse retombée sur Terre lorsque l'on a commencé à s'habituer à ces lieux hors du temps!), les moments d'attente, de doute, etc.. viennent souligner les très fortes interrogations que peut se poser le réalisateur quant à sa place au sein d'un film. Plus loin, quelques minutes avant la fin, le réalisateur se fera même déposséder de sa voiture, contraint à rester à côté de l'action, à s'en éloigner un maximum pour ne plus l'influencer. Deux films plus tard, là aussi, c'est avec Ten où "l'action" se déroule entièrement dans l'habitacle d'une petite voiture que Kiarostami quittera complètement ses acteurs. Coïncidence? Pas sûr... C'est aussi en ça que Le vent nous emportera est un film tombeau. Non seulement dès son film suivant, ABC Africa (pas vu à l'heure où j'écris ces lignes), il adoptera une technologie radicalement différente pour faire ses films (la caméra DV), pour se rapprocher toujours un peu plus de son "deux mots" à lui, mais il marque ici un terme à une certaine façon de filmer, et va choisir de se mettre beaucoup moins en avant sur ses films suivants, laissant la place à un peu plus de réalisme et moins de dirigisme.
Face à la puissance des images, il semblerait que tout travail d'écriture critique soit plus ou moins vain. De part la forte abstraction dont fait preuve Le vent nous emportera, à tous les niveaux, on se rapproche des oeuvres de Tarkovsky (je pense notamment à Stalker) voire de Kubrick et son odyssée métaphysique, bien que les sujets traités ne soient pas vraiment les mêmes (quoique...). Dans tous les cas, les clés ne sont pas données, ou plutôt elles ne sont pas clairement énoncées, et il faudra aller les chercher dans l'image (essentielle, dans Le vent nous emportera), dans la musique (2001, expérience sonore et musicale par excellence, pour un film quasi muet) ou bien dans les dialogues (Ten, la cuvée Kiarostami 2002). Les réponses aux interrogations que laissent filtrer ces films au fil des plans, voire mieux, au fil des visions, ne sont pas plus identifiées que ne l'étaient les questions. Longtemps après la projection, on y repense; c'est alors que des idées très personnelles viennent répondre à des énigmes tout aussi intimes que l'on a pu se poser à un moment ou à un autre en voyant (ou revoyant) ces longs métrages. C'est, aussi, ce qui marque une différence fondamentale avec ces films "dans le vent" que sont Fight Club ou pire, une bonne partie des derniers Soderbergh, et consort; ces films qui se permettent de dire au spectateur, avec toute la prétention dont peuvent faire preuve ces metteurs en scène "auteuresque-superstars", la "formule magique" aujourd'hui banalisée, standardisée, et même devenue une marque de fabrique voire une carte d'éligibilité au titre de chef d'oeuvre : "Réfléchissez!".
Le vent nous emportera, tout comme ses pairs (spirituels), ne nous impose pas cette réflexion, il ne fait que la suggérer, dans toute la simplicité que cela induit. Tout ça pour ça? Vous l'avez dit... Ne lisez plus sur Kiarostami, à plus forte raison encore s'il s'agit du Vent nous emportera. La seule chose que l'on peut conseiller, c'est de le voir; le voir un jour où l'on est en forme.
L'image
Couleurs
Définition
Compression
Format Vidéo
16/9 anamorphique couleur
Format Cinéma
1.85:1
Une image absolument sublime... La définition est excellente, la compression maîtrisée comme on aimerait le voir plus souvent, et les couleurs respectent parfaitement une photographie déjà exceptionnelle... Désolé d'abuser de superlatif, mais pour un film finalement peu porteur, on aurait pu redouter le pire. Heureusement, oh oui, heureusement que ce film soit tombé entre les mains de MK2. Merci beaucoup les gars...
Langue
Type
Format
Spatialisation
Dynamique
Surround
Kurde
2.0
Une piste sonore très correcte. Le film est en stéréo d'origine. Le principal, à savoir les dialogues, sont parfaitement rendus sans être trop en avant. Les différentes ambiances sonores sont là aussi plutôt bien spatialisées...
Les Bonus
Supléments
Menus
Sérigraphie
Packaging
Durée
180 min
Boitier
Amaray
Interview : La leçon de cinéma de Abbas Kiarostami (52 minutes)
Longue et tout à fait passionante intervention du metteur en scène, qui vient faire la lumière sur plusieurs thèmes et éléments techniques de son film. L'ensemble est tellement riche en informations qu'il en viendrait presque à donner mal à la tête ^_^ Il est divisé en 5 sections elles-mêmes subdivisées : Comment trouver le chemin?, Comment habiter le village?, Comment trouver les liens?, Comment construire la réalité cinématographique?, Comment appréhender la mort?
Documentaire : A week with Kiarostami (90 minutes)
Long et souvent très intéressant ce documentaire sur le tournage du film, réalisé par le cinéaste japonais Yuji Mohara, ne se presse pas mais a le mérite de nous faire rentrer sur ce tournage. Les plans sont longs, à l'image du film, on peut se rendre compte des discussions, du travail des uns et des autres. Ca n'est peut-être pas une mine d'or parce que le but n'est pas ici comme ailleurs de tout expliquer sur tout, mais il reste plutôt captivant. Ce doc est divisé en 8 sections qui correspondent à autant de chapitres.
Bandes Annonces : Une section plutôt bien fournie comme vous allez pouvoir le voir : Bande annonce du film en VOST. Bandes annonces de la collection Truffaut : Le 400 coups, Tirez sur le pianiste, Jules et Jim, La peau douce, Farhenheit 451, Baisers Volé, Domicile Conjugal, Les deux anglaises, L'amour en fuite, Le dernier métro, La femme d'à côté, Vivement dimanche. Bandes annonces de la trilogie Kieslowski : Trois couleurs. Bandes annonces de films de Haneke : Code inconnu, La pianiste. Bandes annonces de Mazeppa et de Chamane, de Bartabas - Bandes annonces d'Hotel du nord de Marcel Carné, Remorques de Jean Grémillon, du bon plaisir, de Bagdad Cafe. Bandes annonces de l'Inspecteur Lavardin, Masques, Une affaire de femmes, Madame Bovary, Betty, L'enfer, La cérémonie, Rien ne va plus, Au coeur du mensonge, Merci pour le chocolat de Claude Chabrol. Ouf ^_^
Bonus

Livret

Bande annonce

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Making of

Documentaire

Interviews
Com. audio

Scènes sup

Fin alternative

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