Une quinquagénaire surinvestie dans l'humanitaire est mise en concurrence dans le centre social où elle travaille. Elle va alors embarquer ses élèves en cours d'alphabétisation, avec l'aide d'un moniteur passablement foireux, sur le hasardeux chemin du code de la route.
La solidarité, l’abnégation envers ceux qui en ont besoin, voilà un thème dont on entend régulièrement parler au cinéma, mais plus souvent sur le ton de la comédie légère ou sur le drame que sur le satyre social. Avec « les Bonnes intentions », le réalisateur Gilles Legrand se propose de nous faire partager le quotidien, à la fois mouvementé et radicalement opposé d’une femme qui s’investie à corps et âmes dans l’humanitaire au point d’en oublier les fondamentaux que sont sa famille et ses amis. Toujours à fleur de peau, cette quinquagénaire ne se voit pas glisser lentement vers l’exclusion dans son propre cercle familial. A force de se donner aux autres elle finit par s’oublier elle-même et son mari qui ne la comprend plus ou ses enfants qui ne trouvent plus leur place dans le cœur de leur mère.
Loin de vouloir porter un regard négatif sur ces personnes bénévoles qui se donnent sans compter, et cherchent à toucher du doigt l’hypothétique rêve d’un monde meilleur, le réalisateur parle de ceux qui n’ont pas de limite dans l’abnégation aux autres, ceux qui ont une telle soif d’idéal qu’ils finissent par en oublier les fondements : « Il n’y a pas de meilleur engagement que celui qui n’oublie pas de se ménager ». Avec un scénario soigné qui tisse petit à petit son intrigue autour de cette femme, mais aussi de ces personnes qui ont fuit un pays et qui doivent trouver un emploi pour s’insérer dans une société française qui ne sait plus où donner de la tête pour répondre à son credo multi centenaire : « France terre d’accueil ». Alors que beaucoup ont encore en tête ces hommes et ces femmes qui ont œuvré pour aider leurs prochains qu’ils soient réfugiés ou simplement SDF, cette abnégation n’est pas forcément l’affaire des plus simples. Et dans le film de Gilles Legrand, Isabelle dont le cœur déborde de générosité et de révolte face à cet abandon ou à cette injustice dont sont souvent victimes les plus fragiles, elle ne se rend pas compte qu’en voulant faire face à l’exclusion de ces personnes étrangères, elle exclue sa propre famille qui ne semble pas comprendre son obstination et ses colères.
A
vec une mise en scène soignée, le réalisateur livre une réflexion pas forcément subtile mais intelligente sur la générosité, sur la famille et sur les combats de ces anonymes qui veulent faire bouger les choses. Il arrive même à provoquer une scène en clin d’œil à l’un des comédiens les plus en colère de France : Philippe Torreton. Jamais dans la bonne phrase gratuite ou dans le plan indélicat, le réalisateur nous entraîne dans une histoire à la fois tendre, drôle, parfois à grand renfort de clichés, mais surtout un film touchant que cette lutte personnelle pour trouver un équilibre intérieur lorsque que l’on est aveuglé par la misère extérieure.
Côté distribution, Agnès Jaoui (Place Publique) est évidemment l’actrice qu’il fallait pour ce rôle, ou l’inverse. La comédienne est littéralement habitée par ce personnage fort, haut en couleur, qui se laisse déborder par sa colère de l’injustice et ne voit plus ce qui pourrait être sa priorité : Sa famille.
En conclusion, « Les Bonnes Intentions » est un film efficace, drôle et émouvant, même si parfois nous pouvons noter l’utilisation de quelques clichés, mais il a le mérite de mettre en lumière ceux qui vouent un combat sans limite et sans compter pour que les autres puissent vivre simplement dignement.