Coffret Kenji Mizoguchi II

Dans Mademoiselle Oyu, ce film très noir nous dépeint l’histoire d’Oyu qui ne peut en raison de son veuvage vivre une histoire d’amour avec Shinnosuke. Dès lors cette dernière convainc sa sœur cadette d’épouser Shinnosuke, cette dernière accepte permettant ainsi aux deux amants de vivre leur liaison dans l’ombre. Bien évidement le piège de cette relation clandestine se refermera, implacable, sur les trois protagonistes les menant au sacrifice.

 

Dans la vie de O-Haru, femme galante, ce dans sont les mémoires d’une prostituées à l’automne de sa vie que nous entrons. Film très subtil et introspectif, O-Haru est considéré comme le chef d’œuvre de Mizigochi, et il est vrai que ce n’est pas usurpé. L’histoire est réellement envoûtante, la destinée de cette femme brimée et noble est émouvante, nous sommes évidement à 100 lieues des clichés cinématographique type « mère courage ». Qui plus est la réalisation est très fine, le réalisateur insufflant un érotisme ambiant notamment à l’aide des jeux d’ombres au travers les paravents et les bougies. En tout état de cause un grand film.

 

Les contes de la lune vague après la lune est le film le plus original du coffret. En effet, cette histoire de deux villageois quittant les tensions dans leur région nous transporte aux frontières du fantastique. Les deux villageois auront des destins différents, le premier prisonnier dans le palais d’une princesse énigmatique. L’autre devenant un guerrier cruel abandonnant sa femme. Ce film reprend une nouvelle fois les thèmes de l’héroïsme et de la piètre condition des femmes, mais cette fois sur un ton différent qui en fait à nos yeux, un des films les plus intéressant de ce coffret.

 

Les musiciens de Gion est un film sur la prostitution. Il conte l’histoire d’une Geisha et de son apprentie (maiko). L’intérêt de ce film est qu’il expose de manière subtile le clash intervenant entre la tradition (le monde des geisha) et la disparition de pans entiers de la société traditionnelle japonaise au profit de la modernité. Cette évolution de l’histoire étant mise en abîme par la relation entre les deux générations de prostituées. L’une soumise et l’autre cherchant à s’affranchir de la tutelle des hommes. Toutefois, chez Mizoguchi, cet affranchissement n’est que rarement autorisé et passe souvent par le sacrifice physique. Un film oppressant, claustrophobique dont la réalisation nous fait comprendre rapidement qu’il n’y aura pas d’échappatoire possible.

 

Le dernier film, la rue de la honte, nous plonge dans la crasse et l’horreur des lupanars glauques des quartiers pauvres. Le décor du quartier est un labyrinthe sordide dans lequel les personnages évoluent, prisonniers de leur condition. Film d’ambiance par excellence, la rue de la honte nous narre l’histoire de cinq prostituées. Ce film est plus noir et violent que les autres. Le destin de ces femmes n’a véritablement rien d’enviable et nous illustre parfaitement comment ces personnages s’enferment eux-mêmes dans des existences de souffrance et de déconsidération. Un film sombre, mais pas racoleur qui nous plongera en apnée dans un univers sordide ou l’argent est le maître.

Ce second coffret se compose de cinq films en noir et blanc.. L’image est plus que satisfaisante. Les films on tout de même plus de 50 ans !! Evidement ce n’est pas de la haute définition, mais les films sont agréables à regarder, l’ambiance créée par le cinéaste qui joue énormément sur les lumières et les effets d’ombres y est pour beaucoup. Qui plus est sur un plan strictement technique les masters sont de qualités et il n’y a pas de décalage qualitatif sensible entre les différents films proposés dans ce coffret.

Les films de ce coffret sont tous en mono d’origine. Pour être franc cela ne pose aucun problème sur ce type de film. Qui plus, aussi modeste soit-elle, la partie son reste correcte, les dialogues sont suffisamment clairs pour mettre le spectateur dans l’ambiance. La présence d’un recodage en 5.1 n’aurait en fait que peu de sens pour ce type d’œuvre. Le service minimum assuré étant ici en l’occurrence de bonne facture.

Les bonus sont dans ce deuxième coffret un peu plus léger que dans le premier. Toutefois, chaque film est introduit par Noël Sismolo qui place le film dans l’œuvre du réalisateur, nous explique brièvement les tenants et aboutissants de l’histoire. Ces introduction sont finalement très utiles pour entrer dans certains films.  Le critique Jean Douchet propose quant à lui des analyses plus approfondies sur deux titres (Rue de la honte et contes de la lune). Dommage que ce travail intéressant n’ait pas été fait pour les cinq films. En conclusions nous pouvons toutefois affirmer que si vous aimez le cinéma de Kurosawa, vous pouvez sans hésiter plonger dans ces deux superbes coffrets.