L'histoire :
Une petite fille avec une capuche rouge, un loup, une mère-grand, une chevillette, une bobinette, un panier avec une galette... Vous pensez connaître cette histoire ? On ne vous a pas tout dit. Toute la forêt est en émoi depuis qu'une enquête confronte tous ces personnages...
Critique artistique :
La véritable histoire du petit chaperon rouge (2005) a bénéficié de manière tout à fait opportune (l’avocate de l’équipe leurs révèle qu'elle connaît la femme de Robert Rodriguez qui parle du film aux frères Weinstein) de l’appui des frères Weinstein, les créateurs de Miramax pour en assurer la distribution. Il s’agit là d’une des premières acquisitions de leur nouveau groupe multimédia, the Weinstein Company ce qui semble être une revanche après leurs déboires avec Disney. En dépit d’un niveau technique nettement en dessous des productions similaires, La véritable histoire du petit chaperon rouge annonce une volonté d’innover en usant d’un mode narratif qui fait référence notamment à The Usual suspects (1995) avec l’utilisation de flash back et exploite le point de vue du loup, de Rouge, de la grand-mère et du bûcheron. Comme Schrek l'avait inauguré avec succès, les scénaristes ont choisit de détourner une comptine très populaire avec irrévérence et fantaisie. Il faut aussi avouer que le film compte une belle série de personnages aux caractères assez définis ce qui permet grâce aux voix originales et françaises d’obtenir une intrigue équilibrée. Certains personnages secondaires s’avèrent très importants comme le bouc chantant, l’enquêteur grenouille et surtout l’écureuil Secousse (tous les studios devraient avoir leur écureuil hyperactif ?). En rajoutant une importante succession de gags de niveaux inégaux à cette très riche galerie de personnage, on obtient un film perfectible mais attachant et dont on a envie de voir prolonger l’univers par une autre réalisation plus travaillée et mieux soutenue sur le plan technique (ce qui est prévu).
Avec le personnage Secousse, l’écureuil devient l’un des personnages du cinéma d’animation récurrents les plus appréciés puisqu’on a suivit avec malice et plaisir les folles aventures de Scrat, l’écureuil de
L’age de glace 1 (2002) et
2 (2006), ou celles de Zamy, l’écureuil de
Nos voisins, les hommes (2006) qui était en production à peu près en même temps que La véritable histoire du petit chaperon rouge. Il y a une inspiration commune évidente entre l’écureuil de La véritable histoire du petit chaperon rouge et celui de Nos voisins les hommes ; tout les deux sont particulièrement hyperactifs et cette particularité va être utilisé dans les deux films. L’écureuil va boire du café et se transformer (on pense aux transformations occasionnées par la potion magique dans Astérix) en un super écureuil se déplacent à la vitesse de la lumière (effet flow mo à la
Matrix, temps ralenti) ce qui grâce à des moyens supérieurs, va donner lieu à une superbe scène dans nos voisins les hommes.
Avec un budget très réduit pour ce type de production, un condensé de trouvailles et une débauche d’inventivité à tous les étages de la fusée, La véritable histoire du petit chaperon rouge arrive à se hisser au niveau des films d’animation qu’il faut voir et qui annoncent comme
L’âge de Glace (qui était plus abouti tout de même mais avait aussi bénéficié de solutions logiciels maison pour le rendu notamment) l’avait fait en son temps, une suite qui se présente sous de très bons augures. En effet, avec un budget de 15 millions $US, l’équipe de production a réussit à produire un film d’animation indépendant qui tient la route bien que techniquement en dessous de la qualité de réalisation des grands studios tel que
Pixar,
Disney ou
Dreamworks dont les productions bénéficient la plupart du temps de budgets rarement en deçà de 60 millions $US. On peut relativiser ces chiffres en citant le cas du film d’animation français
Renaissance (2006) signé par Attitude Studio qui a nécessité deux ans de réalisation pour un budget de 14 millions d'euros ou
Immortel (ad vitam) (2004) de Bilal réalisé pour 20 millions d'euros par la société
Duran. Ces deux réalisations n’ont cependant pas nécessité le même travail de production puisqu’elles comportent un important travail d’animation par motion capture (capture des mouvement d'acteurs appliqués à des personnages synthétiques) ce qui permet de réduire la quantité d’animation en keyframe (animation image par image) à produire par les animateurs.
Les grands studios d’animation Hollywoodiens ont l’avantage de disposer d’une avance artistique de plusieurs dizaines d’années pour Disney et de plusieurs films pour Pixar et Dreamworks. On sait que Pixar dispose de leurs propres solutions techniques pour le rendu par exemple (
renderman est une référence dans le domaine du rendu numérique) , que Nos voisins, les hommes a pu réutiliser Emo et Squatch and Stretch pour l’animation et le Wig system pour la fourrure, des logiciels maisons développé chez dreamworks pour … Fourmiz (1998) et
Schrek2 (2004) notamment. De leur côté,
BlueSky (
L'age de glaçe, Robots (2005) ) dispose de la suite CGI Studio™ et d'une expérience importante à mon sens avec la réalisation par
Chris Wedge du court-métrage Bunny (1998). On pourra aisément imaginer la difficulté qu’il y a à superviser une équipe de création 3D à distance puisque les images ont été créées dans les studios d'animation de Manille aux Philippines où des animateurs suivaient les instructions que Cory Edwards avaient mis à leur disposition soit une centaine de pages détaillées, 3000 dessins et des minis films où il s'était filmé reproduisant les mimiques des personnages. Pendant ce temps, Todd Edwards supervisait la réalisation depuis Los Angeles avant d'enregistrer la bande son à Nashville, Tennessee. La création d’image de synthèse en trois dimension nécessite la maîtrise technique d’outils logiciels qui ne servent pas à grand chose sans un important et essentiel travail de pré-production dédié à la recherche artistique (ce en quoi Disney ou Pixar excellent).
On obtient donc un film à la facture un peu rugueuse ce qui se traduit par une modélisation rigide, un graphisme peu développé et une animation brusque qui n’atteint pas la subtilité et la finesse des animations des films de Pixar ou de Dreamworks. Il suffit de comparer l’animation de l’écureuil de Nos voisins les hommes et celle de Secousse dont les expressions s'enchaînent brutalement. Le lighting (le travail des lumières) et la qualité de la profondeur atmosphérique sont très nettement inférieurs au travail de recherche qu'un studio comme Pixar est capable de fournir sur Finding Nemo (2004) ou
Cars (2006) par exemple. Le rendu un peu brute de décoffrage, ce qui veut dire trop proche du rendu permis par les logiciels du commerce est à la base "du manque de cachet" qui fait défaut à ce film contrairement à des films comme
Madagascar (2005) ou
Les indestructibles (2004) par exemple.. Bref, on peut voir ce film vraiment comme un essais pour avoir accès à plus de moyens.
Verdict :
La véritable histoire du petit chaperon rouge est un film perfectible mais attachant et dont on a envie de voir prolonger l’univers par une autre réalisation plus travaillée et mieux soutenue sur le plan technique ce qui se traduit souvent pour l’animation de synthèse par plus de recherche artistique. On peut le compter dans la catégorie des films d’animation sympathiques à voir et à posséder en DVD.