En 1925, le football américain professionnel n’est encore qu’un sport de brutes, sponsorisé par des entrepreneurs locaux. Fautes de règles, les matches tournent le plus souvent au pugilat, mais personne ne s’en plaint puisque les tribunes sont désertes. Un constat amère, d‘autant plus les stades universitaires font se déplacer les foules. Dodge Connolly, capitaine des Bulldogs, a décidé d’y remédier et décide d’associer son équipe aux talents du jeune Carter Rutherford.
Pour son troisième film en tant que réalisateur, George Clooney (Ocean's Eleven, Good night and Good Luck) s’attaque donc à la naissance d’une passion nationale : Le football américain. Pour être plus précis à la naissance de National Football League. Et une fois de plus la star s’illustre et fait preuve d’une incroyable technique de narration et d’un indiscutable talent de réalisateur. Très inspiré par les frères Coen (O’Brother, Intolérable cruauté), George Clooney ne fait pas que raconter une histoire sur la naissance d’un sport national, il transcende son sujet en insufflant ce qu’il faut de dérision, de tendresse et d’acidité pour mettre en avant les travers et les valeurs de cette société des années 30, qui sans le savoir allait être la décennie des naissances des fondations de notre société actuelle. A travers son sujet, Clooney parvient à faire une critique du capitalisme dans ce qu’il a de pire et de meilleure. L’argent peut être utilisé avec vice, mais lorsque le malin sait s’en servir, il parvient à donner corps aux passions. Oscillant constamment entre caricature et ressemblance, le réalisateur n’hésite pas le jeu à la Jerry Lewis pour mieux appuyer la dérision et à s’auto parodier pour mieux renforcer sa satyre d’un système naissant.
En grand amateur du sport qu’il décrit, Georges Clooney offre surtout une œuvre tout en tendresse, et en simplicité, où le charme et peut-être même un brin de nostalgie sont les maîtres d’œuvres. S’appuyant sur des dialogues particulièrement savoureux et des gags « bon enfant » mais toujours à la hauteur de nos attentes, « Jeux de dupes » nous plonge dans une véritable avalanche de gags et de tendresse, au rythme soutenu avec beaucoup de brio. Il ne s’agit, certes, pas du meilleur film de Clooney, mais c’est certainement celui qui lui ressemble le plus : détaché et tendre.
Aidé en cela par l’interprétation complice de Renée Zellweger (Le journal de Bridget Jones, Appaloosa), l’acteur s’amuse et sa complice ne boude pas non plus son plaisir et se laisse aller allègrement au jeu de la séduction et de la dérision. Les deux comédiens se complètent et les scènes qui les réunissent sont particulièrement savoureuses. L’alchimie fonctionne à merveille et l’on prend un réel plaisir à les regarder s’opposer. Mais il serait, bien sur, injuste de ne pas saluer les prestations des autres comédiens tels que John Krasinski (Dreamgirls, Smiley face) ou encore Jonathan Pryce (Demain ne meurt jamais, Pirates des Caraïbes) qui arrivent à faire un véritable contrepoids au couple de stars. Les comédiens imposent un jeu naturel diamétralement opposé à celui de Clooney et Zellweger pour apporter cette touche de crédibilité qui permet au réalisateur de ne pas faire sombrer son film dans la farce inconsistante.
En conclusion, « jeux de Dupes » est un film drôle et satyrique sur un système naissant dans une Amérique sans relief réel, constamment à la recherche d’une identité propre. Une réussite à n’en pas douter !