Comment surmonter une tragédie sans sombrer dans la haine et le désespoir ? L’histoire vraie d’Antoine Leiris, qui a perdu Helene, sa femme bien-aimée, pendant les attentats du Bataclan a` Paris, nous montre une voie possible : a` la haine des terroristes, Antoine oppose l’amour qu’il porte a` son jeune fils et a` sa femme disparue.
Les attentats de 2015 ont laissé une trace indélébile dans l’esprit des Français. On se souvient tous de ce que nous faisions ce soir de novembre où les terroristes ont frappé Paris en plusieurs endroits faisant des centaines de victimes innocentes. Et particulièrement cette tension dont nous fumes saisis en entendant qu’une prise d’otage avait eu lieu au Bataclan. Difficile d’avoir des mots pour exprimer ce que nous pouvions ressentir à ce moment précis et ce qui durent vivre les familles des victimes ou de ceux qui étaient aux abords des lieux ciblés par l’attaque. Pourtant, un journaliste, Antoine Leiris, dont la femme fut une des victimes du Bataclan, posta un texte à l’attention des Terroristes, un texte empreint de douleur et de dignité, dont le « Vous n’aurez pas ma haine ! » résonna longtemps, au point d’être partagé des milliers de fois.
Un an plus tard Antoine Leiris se livra dans un livre qui avait pour but de lever un voile sur les désastres collatéraux d’un tel drame. Des familles brisées, des vies à reconstruire, des traumas en culpabilité, tout y apparaissait avec une simplicité désarmante et touchante. Surtout, nous découvrions, les dessous d’une vie bouleversée par le drame mais également par l’impact de cette lettre ouverte, qui changea la vie d’Antoine, mais provoqua également des moments d’incompréhension et de discorde autour de cette façon faire son deuil et de gérer sa vie, avec tous les changements avec tous les remous que ces deux plaques tectoniques provoquaient en se fracassant l’une contre l’autre. Alors comment mettre cela en image ? Comment raconter une telle histoire sans la pervertir par un regard personnel ou une expérience privée identique ? le journaliste accepta qu’un réalisateur Allemand : Killian Riedhof (Sa Dernière Course), en se disant qu’il aurait suffisamment de recul pour ne pas être trop imprégner de ressenti personnel.
Et c’est bien le cas, le réalisateur avec ses deux co-auteurs Jan Braren (Homevidéo) et Marc Blöbaum (Sa dernière course) livrent un scénario tout en douceur et en puissance qui suit les pas de ce journaliste qui doit faire avec ces bouleversements, avec les attitudes et les réactions parfois ou souvent maladroite de ceux qui l’entourent ou le croisent. On y voit une famille, meurtrie par le deuil qui ne sait pas comment exprimer sa douleur, que ce soit par la colère, par les mots ou plus simplement par les gestes. Et puis il y a l’enfant, ce tout petit qui n’a pas l’âge de comprendre mais qui pourtant exprime sa peine, l’absence de sa maman, et ce père qui doit créer une bulle autour d’eux pour le protéger, pour l’aider pour l’accompagner qui a suscité l’incompréhension ou la distance. Les auteurs posent les bonnes questions et gardent une certaine distance pour que le sujet ne soit pas les attentats, mais les victimes.
La mise en scène de Kilian Riedhof est souple et toute en simplicité, utilisant même les arrières plans pour exprimer des choses, des attitudes et des maladresses. Il peut se reposer sur l’acteur Pierre Deladonchamps, impeccable de justesse et de précision dans un rôle difficile dans lequel le comédien doit, avant tout, exprimer toute cette dualité qui habite son personnage, la tristesse qui le ronge, le besoin presque viscéral de faire cette bulle autour de son fils et de lui. S’adapter aux gens, répondre aux demandes des médias et réagir vite à ce que l’on a envie de repousser au maximum tant il est brisant et cruel : Choisir le cercueil, le type de funérailles, etc….