L'histoire :
Tueurs à gages au service des Triades de Hong Kong, Tung, Po, Yung et Mantis ont une manière bien particulière d’exécuter leurs combats. Contrairement aux autres professionnels du crime, ils ne tuent qu’à l’arme blanche. Mais le temps passe, ils vieillissent et aspirent à vivre une existence normale. Leur rêve de sérénité et de calme s’écroule lorsqu’un gang rival les provoque. Dès lors, Tung, Po, Yung et Mantis vont reprendre les armes et faire ce qu’ils savent faire de mieux : tuer.
Critique subjective :
Killer démarre sur une scène d’introduction aussi brève qu’esthétique où l’ont assiste à une exécution dans les règles de l’art du Dao Shou (titre original du film), le tueur dans les Triades. Il s’agit d’une exécution au sabre dans la pénombre et un éclairage bleu nuit. La fonction de Dao Shou existe réellement dans les gangs ce que Simon Lui (coscénariste et acteur incarnant Po dans Killer) a voulu montrer car il préfère tourner des choses qui existent réellement. Le réalisateur Billy Chung a aussi participé à ce scénario aux côtés de Simon Lui et de Pang Ho-cheung.
Killer met en avant Jordan Chan et Simon Lui, deux acteurs dont il faut remarquer la prestation et qui ont déjà à leur actif de très nombreux films. Jordan Chan avait été découvert avec son deuxième film, Twenty something (Wan 9 zhao 5, 1994 de Teddy Chan) où figure également
Valerie Chow (la très jolie petite amie hôtesse de l’air dans
Chungking Express (1994) , The Blade (1995) de
Tsui Hark) ou Moses Chan (The Blade (1995), Young and Dangerous 2,
Gen-X Cops (1999)). Jean-Pierre Dionnet rappelle à ce titre que ce film révélateur de talent est à mettre en correspondance avec Taps (1981) de
Harold Becker où l’on découvrait
Tom Cruise et
Sean Penn et que l’on peut aussi rapprocher de Shiri (1999) où l’on découvre la nouvelle génération d’acteurs coréen dont Kim Yoon-jin (Gingko Bed 2,
Yesterday (2002),
Lost la série TV),
Choi Min-sik (Ivre de femmes et de peinture,
Old Boy,
Lady Vengeance) ou
Song Kang-ho (Sympathy for Mr Vengeance,
Memories of murder).
Les scènes où ils s’apprêtent à tuer quelqu’un sont assez esthétiques et ne montrent finalement que l’avant et l’après sans focaliser sur l’acte proprement dit comme pour magnifier une activité sordide mais nécessaire dans l’économie des Triades. Il faut dire que le rôle de tueur est à l’instar de celui jouer par le Crying freeman (1995), d’une grande importance à l’instar de ce que des films d’actions américains décrivent avec les personnages de tueurs à gages qui doivent tenir ce rôle jusqu’à ce qu’ils cherchent à décrocher. Le scénario nous ménage donc une autre exécution en groupe et aux sabres, en musique et cris sous l’éclairage électrique des néons où l’hésitation peut être fatale. Finalement la part d’humanité des tueurs et leur pire ennemi lors d’une exécution ce qui pourtant les rend attachant à suivre.
Frère Tung correspond à la figure du grand frère de la bande qui s’inquiète pour les plus jeunes et distraits de la bande comme Frère Po qui en dépit d’une épouse et d’un intérêt pour les affaires à un mode de vie libérée qui se semble pas correct à Frère Tung. Comme dans Jiang Hu the Triad Zone (2000), on découvre la vie intime et sociale des Triades à travers un groupe restreint en même temps que les contraintes spécifiques de leur mode de vie. Ces deux films partagent d’ailleurs également une scène de viol de l’épouse d’un des membres du groupe par un autre clan mais que Jiang Hu the Triad Zone (2000) traite plutôt sur le ton de la comédie. Dans Killer cette scène du viol de la femme de Mante et la revanche des frères d’armes de Mante aurait pu devenir encore plus sordide que celle où les deux héros de
As tears go by (1988) de
Wong Kar-wai se font passer à tabac et il faut le dire pratiquement violer (bien que l’on en voit moins la scène est déjà assez rude). Les scénaristes ont sans doute voulu rester dans les limites de l’acceptable afin que le film ne soit pas plus violent que son sujet ne le laisse penser.
Killer nous rend les personnages des Dao Shou sympathiques au point que la survenance de leur mort nous rend triste en particulier parce que les hommes des Triades sont peut-être des tueurs mais n’en sont pas moins des hommes qui ont une vie intérieure intense et aiment leurs familles ou leurs petites amies. On voit vivre un petit groupe de tueurs autant dans le cadre de leur activité criminelle que dans leurs relations personnelles voire sentimentales puisque le personnage incarné par Jordan Chan va entretenir une relation avec la femme de Simon Lui (Frère Po) que ce dernier à tendance à délaisser. Une franche camaraderie est au cœur de ce groupe d’hommes dont émerge le calme du personnage posé incarné par Jordan Chan. Des amis d’enfance dont la grande complicité les conduit à la mort à la vie vers leur destin de mafieux tueurs à l’arme blanche.
Verdict :
Killer est un film sur les Triades à Hong Kong que l’on peut rapprocher de ce polar hongkongais qui a cherché à s’enrichir en explorant des nouveaux territoires soit en introduisant une dimension sociale ( Bullets over summer) ou sentimentale (As tears go by, Jiang Hu the Triad Zone) par exemple. Par extension on peut dire que cette tendance s’inscrit aussi dans le processus de création original d’une partie de la production de metteurs en scène comme Johnnie To avec Breaking News ou même le plus ancien Running out of time où flic et voyous ont à la fois en compétition et admiratifs l’un de l’autre, en devenant pratiquement amis.