V pour Vendetta

L'histoire

Dans un Londres où la liberté est balayée par une dictature politique oppressante ,V, un terroriste, convainc Evey, une jeune femme de la classe ouvrière, d'oeuvrer à ses côtés pour mettre en oeuvre un projet destiné à faire exploser le parlement et à faire soulever la population toute entière. 

 

L'après Matrix pour les frères Wachowski

1999, Matrix sort sur les écrans du monde entier alors que tout le monde ne parle que du nouvel épisode de Star Wars. Si le film de George Lucas gagne assurément la manche au niveau du succès commercial, il en est tout autrement auprès du public. Les délires de Jar Jar Binks sont dans une très large mesure totalement rejetés par les fans de Star Wars et de science fiction qui jettent finalement leur dévolu sur ce "petit" film de sf qu'est Matrix, lâché dans l'arène des sorties de l'été pour ne pas dire sacrifié. Le succès est pourtant là, pas un hit en puissance mais un score solide et surtout une réputation du feu de dieu. Les mois qui suivirent et surtout la sortie DVD evenementielle (bonus innovants pour l'époque, ventes très importantes) finirent de donner à ses deux créateurs, les frères Wachowski, un statut de génies et de réalisateurs cultes. Peu après, l'annonce de la mise en chantier de deux suites tournées simultanément est officielle.

La sortie de Matrix reloaded est effectivement un des événements marquants de l'année cinématographique. Présentation à Cannes, sortie mondiale, excellent démarrage, très bon score (quoi que en dessous des prévisions)... Pourtant le film devient rapidement un pétard mouillé et souffre d'une assez mauvaise réputation. Creux, sans fond, sans âme, simple enchaînement de scènes d'action entrecoupées de philosophie de comptoir... on aura tout entendu sur le second opus de la trilogie matrixienne alors que tout le monde semble avoir oublié qu'un troisième film se fait encore attendre, censé répondre aux questions et boucler la boucle (d'où son nom). Matrix revolution arrive en effet quelques mois plus tard sur les écrans et surprend tout le monde... par sa qualité plus que douteuse. Les sceptiques deviennent indifférents, les fans deviennent hostiles (pour la plupart) en bref tout le monde est déçu, et pas qu'un peu. Le film, qui à coûté une fortune, devient une véritable bérézina financière au score indigne des espoirs placés en lui et fini sa faible carrière avec un score inférieur à celui du premier opus de 1999 de plusieurs dizaines de millions de dollars. Les Wachowski se murent alors dans un silence de plomb, parait-il fort énervés de l'accueil défavorable, tant critique que public, réservé à leur film. Ils iront même jusqu'à énoncer la possibilité de ne plus jamais réaliser (annonce sur laquelle ils sont d'ailleurs revenus depuis...).

Se consacrant désormais à la production, les frères mettent en oeuvre un projet de longue date. Grands fans de la bande dessinée de Alan Moore V pour Vendetta ils en tirent un scénario et engagent un réalisateur, James McTeigue, premier assistant sur la trilogie Matrix. Pas très étonnant de les voir intéressés par le personnage et l'univers de V tant ceux-ci entretiennent des points communs avec celui de Matrix. Un peuple régit par un contrôle et un homme se dressant contre ce même contrôle.

 

James McTeigue, un homme de paille ?

On est en effet en droit de se poser la question. James McTeigue a beau posséder un CV des plus honorables (premier assistant réalisateur sur de nombreux films dont les trois Matrix et Star Wars episode 2) V pour vendetta porte avant tout la marque des réalisateurs de Bound. Non seulement les frères produisent le film, ce qui leur vaut déjà un contrôle important sur la production, mais ils l'ont également écrit. On peut par ailleurs aisément deviner qu'ils ont mis le nez dans toutes les étapes de la production et par exemple supervisés les story-boards et par là même la mise en scène du film.

James McTeigue est assurément un bon technicien. Et s'il n'avait été que cela sur le film ? D'ailleurs quand on parle de V pour vendetta les premiers noms qui viennent à l'esprit sont ceux des Wachowski et le film porte indiscutablement leur patte. Visiblement véritablement échaudés par la mauvaise expérience de l'accueil de Matrix revolution les frères, qui ne sont pas connus pour leur modestie et leur faible opinion d'eux même, ont-ils fait preuve des qualités que l'on est en droit d'attendre de cinéastes en se repliant de la sorte dès le premier désaveux ? Il reste bien sûr la possibilité qu'ils n'avaient simplement pas envie de réaliser ce film. Mais cette théorie est assez peu crédible... Quand on porte un projet depuis tant d'années (le premier script date du milieu des années 90, avant même Matrix) il est étonnant d'en donner les rênes à un autre...

 

Critique subjective

"Ce n'est pas au peuple d'avoir peur de son gouvernement, c'est au gouvernement d'avoir peur de son peuple !"

Cette phrase, prononcée par V dans le film, résume bien l'idéologie véhiculée par V pour vendetta. L'adaptation du pamphlet signé Alan Moore encourage en effet la révolte en masse d'un peuple quand celui-ci est oppressé comme solution conduisant à la liberté. Comme on va le voir, le comic est sans concession, le film plus inoffensif.

L'adaptation du comic V pour vendetta est à la base un projet risqué et les fans du créateur de From Hell se sont inquiétés dès le début (à juste titre, il suffit de voir le film des frères Hugues qui à totalement dénaturé le comic d'origine) du traitement réservé à l'une des oeuvres les plus fortes et populaires de son auteur. Inquiétudes d'autant plus justifiées que ce sont les frères Wachowski qui s'occupaient alors du scénario et dont le dernier film en date n'avait rien pour rassurer et qui n'ont jamais laisser transparaitre des qualités de scénaristes indiscutables. Inquiétudes encore renforcées quand l'annonce d'un réalisateur inconnu signant là son premier métrage a été faite. De plus, le sujet du comic et son traitement étant plutôt sulfureux et ne cherchant à aucuns moments à amoindrir le propos on ne pouvait qu'escompter un assainissement en règle de la part des studios. Finalement le formatage est bien présent, se fait sentir, mais n'est pas assez appuyé pour totalement annihiler la force du propos et le film est plutôt une bonne surprise... mais pour les connaisseurs de la bande dessinée, le fossé entre les deux reste grand.

Le propos franchement anarchiste du livre est ici clairement édulcoré et devient un simple enjeu de libération du peuple. Au niveau politique également, le film est bien plus simplet Cependant il reste ce parfum de révolution et de soulèvement d'un peuple face à ses dirigeants lui bien fidèle à la bande dessinée. Le film n'oublie pas non plus de se mettre en parrallèle avec les évènements actuels (et passés) et à mettre un point d'interrogation sur le futur que le peuple peut à lui seul déterminer en influant par lui-même et par la force sur ses gouvernements. Même amoindri, le message reste fort, mais bien loin de celui d'origine. C'est là le principal regret.

La réalisation de James McTeigue est soignée et ne mise ni sur les effets faciles (tout juste pourra t'on remarquer un ou deux bullet time complètement hors sujets) ni sur la carte de l'action pure. Bien que son implication et celles des frères Wachowski reste à définir le résultat est là, visuellement le film tient parfaitement la route. Il s'en dégage par ailleurs une ambiance et un style "européen" (le film se déroule à Londres) tout à fait reconnaissable.

Le casting est à l'avenant. Natalie Portman porte efficacement le rôle de Evey (bien que ce dernier soit bien modifié par rapport au comic) et Hugo Weaving offre un grand charisme (et c'était plus que vital pour le film) au personnage de V. Les seconds rôles sont malheureusement beaucoup plus anecdotique et vont du bon au carrément mauvais voir insignifiant. Un défaut amoindri par la quasi omniprésence des deux acteurs principaux à l'écran.

En conclusion

Une belle réussite pour un film risqué. L'adaptation de V pour vendetta était en effet un projet pour le moins casse gueule. Un regret emmerge pourtant, le manque d'audace des cinéastes laisse le film dans la catégorie des pamphlets lights. Expurgé d'une bonne partie de sa force d'origine, V pour vendetta est un brûlot plutôt tiède et manquant singulièrement de mordant. Il reste malgré tout un film par ailleurs réussi (si on oublie le comic), techniquement et narrativement il tient la route et constitue un très bon divertissement. Il aurait pourtant pu être bien plus que cela, dommage.

Une bonne qualité d'image générale malheureusement déficiente lors des scènes sombres. Rien de très grave mais cela reste un problème visible. La colorimétrie quand à elle est tout à fait satisfaisante tout comme le grain de l'image (volontaire) qui donne au film un cachet particulier. La compression ne souffre d'aucun défaut.

Le son de V pour vendetta aurait pu être spectaculaire, les explosions ou combats laissant la porte ouverte à de nombreux effets. C'est pourtant la discrétion qui prime. Un choix discutable sur la forme mais pas sur le fond. V pour vendetta est un thriller politique et non un film d'action. Dommage tout de même de ne pas avoir mis le paquet sur les scènes d'explosions du film (véritable aboutissement des enjeux du métrage) qui auraient par contre justement gagnées à se démarquer de cette charte sonore installée précédemment. Le doublage français est de bonne qualité.

Un second DVD entièrement consacré aux bonus vient compléter cette édition collector. Compléter, c'est vite dit... A noter q'une édition limitée est également disponible comprenant la présente édition ainsi qu'un comic book exclusif de 64 pages.

* Construire le monde de demain : reportage consacré au design du film et à sa conception. Certains décors sont présentés à l'image et leurs responsables commentent leur construction et leurs inspirations (17.15)

* La véritable histoire de Guy Fawkes et la conspiration des poudres : petit court d'histoire avec l'évocation du personnage évoqué dans le film et aux côtés duquel V puise son inspiration, intéressant mais bien court (10.15)

* V pour vendetta et la révolution du comic book : impossible de ne pas inclure un bonus revenant sur l'inspiration du film à savoir le comic book signé Alan Moore. Bien que ce dernier renie totalement le film ce module reste intéressant. Il replace la bande dessinée dans le contexte de sa sortie et les innovations qu'elle à pu apporter. Amusant de voir un reportage à la gloire d'un Moore qui qualifie le film de "complètement idiot" (14.41)

* Le making-of de V pour vendetta : une déception. Bien promotionnel, bien creux et bien vain ce reportage n'apporte rien et est en plus bien court (15.57)

* Cat power : clip musical monté à partir d'extraits du film. On n'y voit jamais la chanteuse, dommage (2.02)

* Infos bande originale du film : une simple page textuelle pour faire la promo de la BO

* Bande-annonce : la bande annonce cinéma du film (2.18)

 

Ce n'est pas que les bonus soient tous inintéressants mais il y a un grand sentiment d'inachevé dans l'interactivité limitée de V pour Vendetta. Le film méritait mieux, c'est dommage.