Patrick et Rémy ont un point commun, ils sont roux. Elément suffisant à leurs yeux pour déclencher une guerre contre tous ceux qui ne sont pas comme eux. Ensemble ils vont se lancer dans une croisade très personnelle. En passant à l’acte, ils deviennent des monstres et crachent leur haine au monde.
Après s’être fait un nom par des réalisations de clips particulièrement sujets à controverses, le fils de Costa-Gavras : Romain Gavras se lance dans le long-métrage. Avec un goût pour le choc des images qu’il partage avec son acolyte Kim Shapiron (Dog Pound) avec qui il a monté le collectif Kourtrajmé, le réalisateur décide de traiter du racisme et de la quête d’identité, en suivant le parcours de deux personnages que tout oppose, mis à part la couleur de cheveux : Ils sont roux. Parti de là, Romain Gavras plonge le spectateur au cœur d’un road movie étrange où le racisme anti-roux est mis en exergue tout au long du parcours de nos deux héros.
Seulement voilà, aussi intéressante que soit l’histoire, elle déconcerte plus qu’elle ne passionne, et l’humour utilisé par le réalisateur ne semble que le concerner. On hésite d’ailleurs entre un film personnel pour réalisateur égocentrique ou simple délire de jeunesse d’un auteur plein de talent. On optera, par complaisance peut-être, pour la deuxième solution, mais le constat est tout de même présent : Le spectateur reste au bord de la route et ne parvient jamais à réellement s’impliquer dans l’odyssée de ces deux âmes en vadrouille. En effet le parcours de ces deux personnages se suit avec beaucoup de distance et le réalisateur, a tendance à enfermer son sujet dans son propre délire, un peu comme une bande de copains qui partagent un gag qu’ils sont seuls à comprendre. La parabole est intéressante, mais elle arrive un peu trop tard dans le récit pour totalement faire adhérer le public.
Et la cause de ce malaise se situe certainement dans le scénario de Romain Gavras et Karim Boukercha qui tente souvent de faire des clins d’œil aux cinéma qui les ont façonné comme celui de Kubrick ou encore celui de David Lynch avec des personnages qui apparaissent pour matérialiser un sentiment ou une idée (La petite fille rousse) et des paysages reconnaissables mais tout autant fantasmagoriques qui deviennent prétextes à une histoire métaphorique mais en même temps totalement réelle d’une quête d’identité et de terre. On peut d’ailleurs facilement faire un parallèle avec Israël, et trouver à ce moment un intérêt dans le scénario. Car la souffrance d’être exclus de la société pour son apparence, son appartenance ethnique ou pour sa religion, est mise en évidence avec beaucoup de brio. Dommage alors, que cette bonne idée ne soit gâchée par un mise en scène un peu trop distante.
Côté distribution, on saluera la prestation rayonnante et impeccable d’Olivier Barthélémy (Sheitan) qui se révèle ici comme étant un comédien plus que prometteur, sur lequel il faudra compter. L’acteur est particulièrement saisissant et trouve la parfaite tonalité qui fait de son personnage une subtile alchimie entre tendresse et violence. Et le duo qu’il forme avec Vincent Cassel (Mesrine) se retrouve être d’une force rarement atteinte dans un film. On regrettera seulement que Vincent Cassel ne fasse qu’une énième interprétation de ses rôles durs et sans concession qu’il a pris l’habitude d’incarner sans beaucoup d’originalité. L’acteur est identique à lui-même et sa prestation en devient parfois pesante.
En conclusion, « Notre jour viendra » est une bonne idée de départ mais le film sombre très vite dans une sorte de délire qui ne semble concerner que son réalisateur. A noter tout de même l’impeccable interprétation d’Olivier Barthélémy.