A 48 ans, Alain Evrard est obligé de retourner habiter chez sa mère. Cohabitation forcée qui fait ressurgir toute la violence de leur relation passée. Il découvre alors que sa mère est condamnée par la maladie. Dans ces derniers mois de vie, seront-ils enfin capables de faire un pas l'un vers l'autre ?
Pour traiter de la fin de vie, il faut beaucoup de simplicité et d’intelligence, et le film de Stéphane Brizé en a toutes les qualités. Même si on peut parfois regretter qu’il n’aille pas forcément assez loin dans le mécanisme qui consiste à l’acceptation de la maladie et la perspective que l’heure de la mort a sonné. Un processus inévitable pour accepter le fait de contrôler l’heure de sa mort, et à travers cela, faire accepter aux autres la séparation définitive.
Et Le réalisateur l’a bien compris, car il film avec beaucoup de pudeur, ces silences presque assourdissant entre la mère et son fils. Un fils qui lutte pour donner un sens à sa vie et une mère qui lutte pour donner un sens à sa mort. Tous les deux s’enferment dans une logique de survie incontrôlable, qui fera ressurgir les blessures du passé, mais offrira à chacun un moment de rédemption. Le scénario garde une logique pudeur dans tout cela. Pas de grands discours, ils n’auraient fait qu’alourdir le propos, mais une intelligence dans l’écriture dans laquelle les scénaristes ont puisé tout ce qui rend le discours crédible. Le masque d’Yvette qui préfère ne pas parler de sa maladie comme une fierté ou comme une pudeur mal placée, les colères du fils ignorant, qui petit à petit va se laisser submerger par l’échéance qui s’approche et qui devra trouver un hypothétique courage pour accompagner sa mère au dernier soupir.
La force du scénario est de ne pas rechercher le spectaculaire, car contrairement aux idées reçues, la mort n’est pas un spectacle vivant. La fin de vie est un instant en suspension, où tous les sentiments s’entremêlent : La colère, la tristesse, l’ignorance et le doute. C’est un moment de la vie qui se vit intérieurement, à sa manière, avec tout ce qu’il y a d’introspection à mener. Stéphane Brizé et Florence Vignon, gardent une distance remarquable avec le sujet afin de mieux imprégner le spectateur dans le parcours qu’Yvette et Alain auront à suivre jusqu’au bout. Un parcours qui se repose aussi sur le soutient de Monsieur Lalouette, le voisin, qui d’un œil extérieur devient volontairement ou non le trait d’union, la passerelle qui permettra à Yvette de prendre le contrôle de son destin et à Alain de la soutenir à hauteur du besoin qu’elle nécessite.
Comme d’habitude la composition de Vincent Lindon (Mademoiselle Chambon) est à la hauteur du rôle. Un personnage à la fois perdu dans ses errances, qui tente de trouver une raison à ses ambitions. Mais c’est Hélène Vincent (La vie est un long fleuve tranquille) qui capitalise tous les regards. La comédienne joue avec beaucoup de pudeur et de simplicité son personnage d’Yvette, femme blessée et fier par une vie qui ne lui a fait aucun cadeau, dont elle ne rougit pas, mais dont elle n’éprouve pas de fierté non plus. Une raison suffisante pour qu’elle contrôle la fin de son existence.
En conclusion, « Quelques heures de printemps » est un film sobre et intelligent, réalisé avec beaucoup de finesse par Stéphane Brizé qui en signe aussi le scénario. L’ensemble, en l’associant aux compositions précises et impeccables des comédiens principaux, font de ce film une véritable réussite.