Le Film
Critique de Christophe Bonnet
Editeur
Edition
Collector
Label
Zone
2
Durée Film
104 min
Nb Dvd
2
L'histoire :
En marge de la société depuis toujours, Aileen Wuornos (Charlize Theron) parvient à survrivre en se prostituant. Un soir, alors qu'elle touche le fond, elle rencontre dans un bar gay Selby (Christina Ricci), une jeune lesbienne pour laquelle elle a le coup de foudre. Eprises d'un amour fou, les deux femmes ne peuvent plus se quitter mais Aileen doit continuer à se prostituer pour subvenir à leurs besoins. Un soir, embarquée dans une voiture, elle est violée par le client mais elle parvient à le tuer pour se défendre. Ce premier crime est alors le point de départ d'un terrible et meurtrier engrenage ...
La critique :
La réalisatrice
Patty Jenkins a d'abord réalisé deux courts métrages en 2001 ("Just Drive" et "Velocity Rules") puis, en 2003, elle dirige des épisodes d'une série TV ("Arrested Development"). Avec Monster, elle se lance dans le grand bain cinématographique, non seulement en tant que réalisatrice mais aussi comme scénariste.
Quand le titre résume tout
Comment qualifier les meurtres de cette tueuse en série autrement que par des actes monstrueux ? Maintenant est-ce que cela fait de Aileen Wuornos un monstre pour autant ? Oui, aux yeux de la presse qui, à l'époque, n'a eu de cesse de présenter cette femme ainsi. Forte de ces constats, la réalisatrice s'est attachée à revenir sur ces faits qu'elle nous présente sous un nouvel angle comme si elle nous tendait une loupe pour percevoir des aspects qui nous auraient échappés.
L'histoire
Injustement présentée par le FBI comme la première tueuse en série, Aileen Wuornos a défrayé la chronique par ses sept meurtres commis entre 1989 et 1990 mais aussi par sa personnalité. Jugée et condamnée à mort plusieurs fois, elle était encore vivante lorsque Patty Jenkins a décidé de lui consacrer un film. Les deux femmes ne se sont pourtant jamais rencontrées mais la meurtrière a autorisé la réalisatrice à lire les 7000 lettres qu'elle avait écrites dans le couloir de la mort. De nombreux livres, reportages et documentaires (comme celui du disque 2) ont également permis d'étoffer les recherches.
Le film commence alors qu' Aileen est sur le point de se liquider mais elle décide avant de passer à l'acte de dépenser les quelques pièces au fond de ses poches en allant dans un bar. Là, elle rencontre Selby, une jeune lesbienne en quête d'écoute. Très rapidement, la relation amicale se mue en amour et il paraît évident à chacune que leurs destins sont liés. Pour pouvoir vivre cette passion, Aileen continue à se prostituer, même si elle aimerait bien sortir de ce milieu social défavorisé qui la prive d'avenir. Son passé d'enfant abusée et son présent de prostituée se rejoignent lorsqu'un client la viole sauvagement et l'oblige à commettre son premier meurtre (dont le caractère de légitime défense ou de nécessité n'a jamais été reconnu). S'en suivent ses tentatives pour s'insérer dans la société dite "normale" qui sont aussi maladroites que pathétiques. La suite des évènements, traités chronologiquement dans le film, ne sera qu'une série d'actes dramatiques. La frontière entre la vie et la survie se fera de plus en plus ténue, tout comme celle entre le bien et le mal. La passion amoureuse d' Aileen n'aura d'égal que sa haine viscérale envers les hommes. Selby, quant à elle, ne parvient pas à s'émanciper physiquement de sa maîtresse mais elle réussit psychologiquement à s'extraire de ce flot de désespoir auto-destructeur. A l'issue du film, on s'interroge sur le sort réservé à cette "maquerelle lesbienne" à l'encontre de laquelle aucune charge n'a été retenue.
Le casting
Il est indéniable que dans la carrière de Charlize Theron ("Braquage à l'Italienne", "The Yards" ...) ce rôle de serial killer figure au sommet de ses prestations. On peut bien sûr souligner l'effort physique de l'actrice qui s'est pliée à l'exigence d'une prise de poids de 15 kgs, à un radical changement de regard au moyen de lentilles sombres, au port d'un dentier ou encore à la vaporisation sur son visage de latex liquide pour donner à sa peau une texture plus rugueuse. Vous l'aurez compris, son interprétation passe aussi et beaucoup par les expressions de son visage, sa démarche, son allure générale. La voix n'a pas été oubliée puisqu'elle a dû travailler sa diction sur un savant mélange d'accent du Middle West et du Sud .Elle réussit donc ici à sortir de son style glamour immanquablement inspiré par son physique de top-model.
Christina Ricci ("Sleepy Hollow") est très différente physiquement du personnage réel. La réalisatrice avoue lui donner au travers de Christina, un physique plus avantageux, pour ne pas tomber dans la représentation d'un "couple boîteux" qu'un trop grand nombre aurait considéré caricatural. Mais ce petit travestissement de la réalité ne nuit pas à l'oeuvre, la comédienne donne parfaitement la réplique à Charlize.
La réalisation
Pour un premier long métrage, elle est très mature. Le choix d'un récit linéaire contribue à ce résultat. Patty Jenkins n'a pas fait appel au flash-back pour ne pas donner au film une touche trop hollywodienne. Le passé est évoqué dans les dialogues, aucune image ne vient l'illustrer, on ne pourra pas reprocher à la réalisatrice une quelconque justification des faits, elle échappe parfaitement à ce piège. On peut peut-être regretter le choix de la réalisatrice (et scénariste) qui a voulu traiter les faits uniquement en focalisant l'histoire sur la meurtrière. On n'apprend que trop peu sur l'histoire de Selby, un personnage pourtant clé. De la même façon, les victimes n'ont pas d'autre représentation que celle de leur "transaction" avec la prostituée et leur mort qui en résulte. Elles sont en quelque sorte un petit peu déshumanisées. Le rythme, sans être trop lent, souffre parfois de passages un peu longs. Les scènes de meurtres sont filmées avec un incroyable réalisme superbement souligné par les compositions de BT et le judicieux emploi de samples de vielle à roue. La photo, un peu sombre, s'adapte fort bien aux lieux de tournages dans cette partie de Floride si éloignée du luxe clinquant habituel. Les rares effets visuels retenus sont des accélérations d'images qui symbolisent efficacement la compression du temps.
En conclusion :
Ce film est troublant car, grâce à une réalisation de qualité, il humanise une meurtrière présentée comme un monstre. La "demoiselle de la mort", comme elle a été surnommée, méritait-elle ce sombre destin ? Chacun appréciera au travers de cette oeuvre qui ne justifie rien, n'excuse rien, mais tente simplement d'ouvrir nos yeux, nos consciences, pour nous alerter quant aux risques de passer à côté de la réalité d'une vie, aussi misérable soit-elle, en ne retenant que les faits monstrueux qui y ont mis un terme par une exécution. On retient dans l'interprétation magistrale de Charlize Theron autant d'amour que de violence, mais c'est cette dernière qui condamnera son personnage. Les bonus, par leur qualité, leur quantité mais surtout leur parfaite complémentarité font de ce Collector un titre digne d'intérêt.
A noter : certaines scènes sont susceptibles de heurter la sensibilité du jeune public (interdit aux moins de 12 ans lors de sa sortie en salle).
L'image
Couleurs
Définition
Compression
Format Vidéo
16/9 anamorphique couleur
Format Cinéma
1.85:1
Le traitement vidéo est parfaitement adapté au film. La sobriété prévaut, tout particulièrement en ce qui concerne les couleurs qui restent nuancées sans pour autant "exploser" : la photo du film ne s'en porte que mieux. Les nombreuses scènes dans l'obsurité restent toujours lisibles même si parfois quelques plans sont affectés d'un grain prononcé. Aucun défaut de compression à signaler.
Langue
Type
Format
Spatialisation
Dynamique
Surround
Français
5.1
Anglais
5.1
VO et VF bénéficient du Dolby Digital 5.1. Le résultat est à la hauteur avec une excellente gestion des surround. La dynamique réveille les membranes des enceintes au bon moment, les passages calmes restent toujours audibles avec une reproduction des voix très réaliste. Aucune des deux versions ne prend réellement l'avantage.
Les Bonus
Supléments
Menus
Sérigraphie
Packaging
Durée
186 min
Boitier
Amaray
DVD 1 :
Des vignettes animées avec des images du film constituent le menu général, agrémenté de quelques notes de musique.
- Le film : lancement du programme principal.
- Les langues : choix de l'une des deux versions clairement présentées. A noter que les sous-titres sont imposés sur la VO.
- Les chapitres : vignettes animées, titres, numérotation et sonorisation aboutissent à un superbe chapitrage parfaitement lisible.
- Les suppléments : tous en VO S/T Fr et DD 2.0.
* Le making of (14 min41) : sans réelle surprise, il reste efficace en montrant parfaitement la pesante ambiance lors des tournages. Le travail de préparation et de recherche correspond au professionnalisme américain mais il semble ici revêtir une plus grande importance, tant la réalisatrice et l'actrice principale voulaient "s'imprégner de la vie" d' Aileen.
* Les interviews : Charlize Theron (17min30) et Patty Jenkins (10min09).
Charlize nous livre une sincère analyse de son rôle, sa prestation mais, par-delà, elle parle d'Aileen avec humanité. Elle ne soutient pas ici une thèse en sociologie mais ses propos sont lucides quant à la vie de la meurtrière et la façon dont la société perçoit ce type de personnage. Elle évoque également ses difficultés à persuader les réalisateurs sceptiques face à son physique avantageux. Enfin, elle est convaincue que l'hostilité des professionnels face à ce projet et surtout face à elle même et à Patty leur a donné une incroyable motivation tout en les rapprochant : une des clés du résultat ...
En ce qui concerne Patty Jenkins, à la vue de cette interview, il est très difficile de penser qu'elle a réalisé avec Monster son premier film. Elle aborde la génèse du projet et décrit son travail de façon très pointue, très analytique. Elle n'oublie pas pour autant la sensibilité lorsqu'elle parle des victimes et de l'héroïne. Elle admet que ce film a des faiblesses, ce qui est intellectuellement très honnête, mais s'avoue rassurée d'être parvenue à son terme "sans aucune faiblesse morale". Si Patty Jenkins garde cette intégrité artistique, ses prochaines réalisations seront à surveiller ...
* Les entretiens :
- Patty Jenkins et le compositeur B.T (15min42) : ce jeune compositeur qui s'est fait remarqer avec son travail sur Fast & Furious explique comment il a intégré l'environnement surround dans sa création. L'emploi des sonorités d'une vielle à roue est surprenant ce qui confère à la musique un rôle de "catalyseur d'émotions". Les interventions de Patty Jenkins, même si elles ont de l'intérêt, monopolisent quelque peu la parole. On regrette également le trop petit nombre d'extraits musicaux pour illustrer les propos.
- Patty Jenkins et Stéphane Bourgoin (22min09) : la prestation de Stéphane Bourgoin est une petite déception car, ce grand spécialiste français des sérial killers, reste ici cantonné à un rôle de journaliste pigiste. Certes il donne son avis, émet même une critique mais il pose surtout les questions alors qu'on aurait aimé qu'il nous livre les réponses, la réalisatrice s'étant déjà exprimée dans les suppléments. Pour autant, l'entretien est de qualité, Patty Jenkins est intarissable sur son film avec des propos clairs et parfois très directs (par exemple lorsqu'elle donne son avis sur la famillle de Aileen).
* Les filmographies : elles concernent Charlize Theron, Christina Ricci et Bruce Dern.
* Matériel promotionnel
- La galerie de photos : 33 clichés en couleur dont le choix, les dimensions et la qualité sont décevants.
- La Bande-Annonce en VO ou VO S/T Fr (2min19).
- Lien @ : présentation du site officiel chez MetroFilms.
DVD 2 :
Même présentation aussi aboutie que celle du premier DVD
- Le Documentaire (DD 2.0 - 1h24min) : Nick Broomfield a réalisé ce documentaire à l'époque des faits, avec des images d'actualité et ses propres interviews. Il s'est attaché à suivre la meurtrière au fil des différents procès mais sans revenir sur les faits. Aileen Wuornos est vue tau ravers de ses contacts avec son avocat "atypique" et avec ses "parents adoptifs" tardifs. Sans complaisance, il met au jour la cupidité des uns et des autres qui entremêlent justice, idéologie et religion pour se justifier. Pour couronner le tout, les enquêteurs et les majors d'Hollywood ont eu des contacts qui sont présentés comme également intéressés. L'ensemble est le constat criant de l'exploitation sordide de cette affaire qui n'a fait que desservir l'intéressée. Ce documentaire est à voir car il fait naître un sentiment de gêne et d'écoeurement qui incite à se poser des questions ...
- Les chapitres : là encore une section efficacement présentée.
- Les scènes coupées : cinq scènes pour une durée totale de 16 min 37 avec la possibilité d'opter pour le commentaire audio de la réalisatrice. Les scènes en elles-mêmes n'ont qu'un intérêt limité (en dehors du superbe passage des adieux en attendant le bus). En revanche, les explications de Patty Jenkins témoignent d'une réflexion poussée sur les personnages tant son analyse est pertinente. Elle va à l'essentiel et ne s'embarrasse pas de compliments surfaits ou de paraphrasage.
- Bonus caché : intervention supplémentaire de la réalisatrice (3min).
L'interactivité de ce Collector est riche. Les suppléments, assez peu redondants, explorent profondément l'histoire, la personnalité de la meurtrière et le film en lui-même. A l'image de ce dernier, les suppléments font l'impasse sur le passé d' Aileen Wuornos, c'est un choix délibéré que vous comprendrez quand vous les aurez visionnés !
Bonus
Livret
Bande annonce
Biographies
Making of
Documentaire
Interviews
Com. audio
Scènes sup
Fin alternative
Galerie de photos
Story board
Multi-angle
Liens internet
Interface Rom
Jeux intéractifs
Filmographies
Clips vidéo
Bêtisier
Bonus Cachés
Court Metrage