Noé entre en 6ème en même temps qu’il découvre une nouvelle ville et une nouvelle maison dans laquelle il vient d’emménager avec son, père, Marc. Coaché par ce dernier, Noé assume un entraînement intensif de sport de combat. Et Marc n’hésite pas à le mettre en situation d’attaque. Ils sont en danger et il doit être prêt à répondre à la moindre agression.
Edouard Baer dans un film sombre mettant en scène un père et son fils, plongés dans une histoire qui semble les dépasser, ne manque forcément pas d’intérêt, surtout lorsque le rôle que tient le comédien, met en avant beaucoup ses silences que la verve, qui a fait sa réputation. Quand en plus, le réalisateur est déjà responsable du très réussit « Les mauvais joueurs», on redouble d’intérêt. Et la suite nous donne raison, car « Un monde à nous » est un film sombre sur l’errance de la culpabilité, et sur la gestion du deuil. La père et le fils se retrouvent pris dans un tourbillon où l’un entraîne l’autre au cœur de ses propres démences, jusqu’à toucher les frontières du non retour. Un film sombre disais-je, mais surtout solide et parfaitement mesuré pour susciter l’intérêt du spectateur, et ainsi le plonger dans un thriller où une petite lumière tente inexorablement de percer.
En cela le film est intéressant, car son scénario s’efforce de ne garder que l’essentiel, pour ne pas embrumer le spectateur par des détails dont on se fiche finalement totalement, à savoir le travail de Marc, depuis combien sont-ils en errance ? Le scénario de Frédéric Balekdjian et Fabien Vehlmann plonge au plus profond d’une paranoïa dont on n’arrive jamais réellement à savoir si elle est justifiée ou non. Suffisamment pesante, la trame ne laisse jamais l’esprit du spectateur au repos, bien au contraire, elle le force à chercher les indices qui amèneront à une fin, un peu pataude certes, mais finalement assez logique.
La grande surprise réside tout de même, dans la composition impeccable et saisissante du duo que forment Edouard Baer (Le bison et sa voisine, Astérix et Obélix Mission cléopatre) et le jeune Anton Balekdjian, fils du réalisateur. Les deux comédiens se complètent aisément et donnent un duo incroyable de tendresse et de tension. Edouard Baer, magnifie son personnage de père paranoïaque, rongé par le deuil, toujours à la limite de la folie. Le comédien se détache totalement de ces personnages précédents à la verve facile, au sourire malin et la présence volée. Ici, il donne une composition tout en retenue. Pas de mots pour renforcer le charisme de son personnage, pas de grands gestes, juste un corps qui montre la souffrance d’une vie que son esprit lui impose. Une vie de crainte et de stress permanent. Edouard Baer offre ici sa plus belle prestation. Quand au jeune, Anton Balekdjian, sa composition laisse présager, une carrière incroyable, car le jeune garçon fait preuve d’une maîtrise surprenante pour son âge et d’une grande justesse dans sa composition.
En conclusion, « Un monde à nous » est une réussite à tous les niveaux, qu’il est bon de découvrir, si cela n’a pas déjà été fait.