Avril est une jeune novice élevée dans un couvent. Elle s’apprête à prononcer ses vœux perpétuels, lorsqu’on lui révèle l’existence d’un frère jumeau. Elle part à sa recherche et se retrouve en Camargue pour deux semaines de vacances avec trois garçons.
Il y a des films qui, par leur résumé, inquiètent ou dérangent. Des films qui sentent un peu trop le film d’auteur particulièrement schizophrénique ou au contraire, totalement nombriliste. Et puis il y a des films, où le résumé interpelle doucement, où l’intrigue questionne et ramène sans cesse à des références cinématographiques. Des films, qui sentent la douceur et le respect, la sensualité et la beauté. Toute une palette particulièrement jouissive à bien des égards.
« Avril » de Gérald Heustache-Mathieu (Peau de vache) est un peu de tout cela. C’est un film dont le titre ne dit rien ou presque tout au point de créer une réelle confusion dans nos esprits. Pourtant, après quelques minutes de film, on est comme happé par la singularité de l’histoire, passionné par la justesse du ton, hypnotisé par la beauté de la jeune Sophie Quinton (Qui a tué Bambi ?) qui dès les premiers plans illumine l’écran.
Si le ton est un peu austère, on ne le serait plus dans l’enceinte d’un couvent, la présence qu’instaure Miou-Miou (Mariages ! La science des rêves) et la jeune comédienne devient vite captivante. Leurs dialogues nimbés de tristesse transperce le cœur du spectateur et semble soudainement éperonner notre attention. Les deux femmes s’opposent autant que l’une protège l’autre et lorsque commence le parcours initiatique d’Avril, on se retrouve alors dans une intrigue passionnante de tendresse et de sensualité.
Et de sensualité et de désir, il en est beaucoup question dans ce film, mais avec une pudeur bien trouvée et surtout bien pesée, qui ne sombre jamais dans la caricature. Car ce voyage initiatique est à la fois mental et charnel. Avril, jeune fille élevée d’une vie de rien, doit subitement apprendre à posséder un frère, à découvrir une vie d’insouciance, de tout et de rien en même temps, connaître des plaisirs simples mais nécessaires à la construction d’une vie nouvelle. Et l’intelligence de la sensualité du film ne réside justement pas dans les actes amoureux, mais au contraire dans l’utilisation des éléments pour réveiller tout l’érotisme des corps, humains ou non. La scène, où Avril découvre les joies de l’eau de mer sur sa peau en glissant doucement dans cet élément indomptable est un bijou de sensualité.
Mais il serait injuste de ne pas parler des comédiens masculins et de ce trio étrange et logique que forment Clément Sibony (Ze Film, Déjà Mort), Nicolas Duvauchelle (Petit Voleur, Poids léger) et Richaud Valls ( Les Brigades du tigre). Les trois comédiens sont incroyables de justesse, et la tendresse est si communicative que l’espace d’un instant, on se sent faire partie de cette petite troupe improbable au milieu d’une Camargue envoûtante.
En conclusion, un petit moment de cinéma qui nous ramène aux grands instants de plaisirs que l’on a pu ressentir devant une toile. « Avril » est un film envoûtant et passionnant à bien des égards, une sorte de petit film avec des allures de grands chefs-d’œuvre. Une histoire intime dévoilée avec beaucoup de pudeur qui mérite beaucoup plus qu’une simple pause.