L’histoire :
A l’article de la mort, Jigsaw n’a pas dit son dernier mot et entreprend de sonder la capacité à pardonner d’un homme dont le fils a été accidentellement tué.
Critique subjective :
Petit retour en arrière. Le 22 novembre 2006, Saw III débarque dans les salles de l’hexagone, assorti d’une interdiction aux moins de 18 ans. La nouvelle est tombée peu de temps avant la diffusion du film en France. Explication ? « La violence et le sadisme incessant et insoutenable de scènes s’apparentant explicitement à des tortures physiques et morales justifient pleinement cette décision d’interdiction ». Rappelons que le 12 juillet 2001, un décret avait restauré la possibilité d’interdire un film non pornographique aux moins de 18 ans. Deux cas de figure : des scènes de sexe trop explicites ou une violence extrême. Saw III sera le premier film interdit aux mineurs pour la seconde raison. Doit-on considérer cette jurisprudence comme la marque d’un durcissement de la censure, voire même d’un retour à un certain ordre moral ? Un élément, au moins, laisse à penser que oui : la classification française est plus sévère que le visa américain. Un fait rarissime. Réputée pour son conservatisme, la MPAA (Motion Picture Association of America) n’a classé le film « que » R, soit interdit aux moins de 17 ans non accompagnés. Voilà qui n’est pas sans rappeler, aussi, une sombre époque où, en France, des films comme Massacre à la tronçonneuse, Zombie ou Mad Max se voyaient flanqués d’un visa X infâmant.
Quid de la violence dans ce troisième volet de Saw ? Des scènes très graphiques, il y en a bien quelques-unes unes mais nous ne sommes certainement pas en présence du film gore ultime. On relève un passage relativement impressionnant, sévice à base d’anneaux dans le corps reliés à des chaînes, ainsi qu’une opération (consentie) du cerveau autrement plus sanguinolente qu’une recette de Joël Robuchon, mais rien d’insoutenable ou de traumatisant pour le commun des mortels (ou alors vous avez votre carte chez Familles de France et là, on ne peut vraiment plus rien pour vous). Toutes ces séquences de violence sont qui plus est grandement désamorcées par un montage frénétique (procédé employé sur Saw I pour contourner la censure et réutilisé par la suite afin de contenter un public qui avait apprécié la chose !) ainsi qu’un côté résolument « train fantôme ». Pas bien plus corsé que ses deux prédécesseurs (pourtant sortis eux aussi après le décret de 2001), Saw III a donc écopé d’un visa qui, non content d’être exagéré, s’avère également incohérent.
Sorti sur les écrans en 2004, Saw (James Wan), thriller horrifique malin, avait créé l’événement. Porté sur le sadisme et sous bonnes influences (le titre s’inscrivait notamment dans l’esprit de certains gialli italiens), Saw premier du nom entérinait définitivement la fin d’un second degré « screamesque », démontrant que l’horreur gore et premier degré pouvait encore s’attirer les faveurs d’un très large public. Le film ayant engrangé une petite montagne de billets verts, le studio mît rapidement des suites en chantier. C’est ainsi que virent le jour un Saw II réalisé par Darren Lynn Bousman en 2005 et ce fameux Saw III, signé du même réalisateur (troisième volet qui ne sera pas le dernier titre de la franchise, loin de là …). S’inscrivant dans un « univers Saw » désormais bien jalonné (voir la superbe séquence avec les porcs en putréfaction), ce troisième opus se montre assez redondant. On y retrouve cette immuable construction narrative : un enchaînement de tortures et de pièges parachevé par un inévitable twist final. La trame n’apporte rien de bien nouveau (elle aurait même plutôt tendance à regarder en arrière à travers moult flash-backs) et la mise en scène n’évolue guère (on déplore encore et toujours ce montage ultra-cut inapproprié). Supérieur à un mauvais Saw II (c’est indéniable), ce troisième opus n’en demeure pas moins un titre moyen, autant dire que l’on est loin de la flamboyante série B qui ouvrait la saga.
Verdict :
Distillant un message faussement profond sur le pardon, Saw III est réduit à une simple succession de sévices (réussis) se terminant par un rebondissement final (à tendance involontairement comique … « Il avait tout prévu »). Le premier Saw allait au-delà de ce schéma basique. A la vue de ses deux suites, variantes qui ne renouvellent jamais le concept global, on est donc en droit de se poser cette question : le film de James Wan ne se suffisait-il pas à lui-même ?
N.B. : En France, la Director’s cut de Saw III est identique à la version salles.