Capricorn One

En 1977, moins de 10 ans après le premier pas de l'homme sur la lune et tandis que la planète entière rêvait déjà de conquête spatiale américaine, Capricorn One est sorti sur les écran en dressant un tableau tout particulier d'une éventuelle mission américaine sur Mars. Le film controversé au scénario antipatriotique nous est proposé maintenant en édition DVD par Opening.

Le plus grand mensonge de tous les temps
Le premier vol habité vers mars est sur le pas de tir au centre spatial de Houston au Texas. Les yeux du monde entier et les vœux de l'humanité toute entière accompagnent les trois astronautes de cette mission prestigieuse pourtant boudée par le président américain. Au sommet de l'état, en cas d'échec, on assure que le programme spatial tout entier de la Nasa pourrait être abandonné. Un enjeu qui contraint la Nasa à faire un sans faute, quels que soient les moyens à mettre en oeuvre. C'est ainsi qu'à leur grand étonnement et à quelques secondes du décollage les trois astronautes sont évacués de la fusée et du pas de tir dans le plus grand secret, juste avant qu'elle ne s'élève dans le ciel. Les trois hommes sont acheminés dans un endroit secret, aménagé en studio. Un endroit d'où ils devront simuler le succès de leur mission sur mars s'il veulent que leur familles respectives ne soient pas mises en danger. La gigantesque mystification et en route, jusqu'à ce que les événements dérapent...

La plus grande manipulation de l'histoire dépeinte dans ce film sombre mais crédible, n'est pas sans rappeler les théories de la conspiration qui ont de tout temps entaché les missions américaines sur la Lune. Un scénario haletant qui met en évidence la faiblesse du pouvoir qui choisit sans hésiter de travestir la réalité pour s'assurer un succès immérité. Le spectateur, plongé immédiatement au cœur de la conspiration, assiste impuissant au déroulement de l'arnaque et de la façon dont elle est menée par les autorités qui n'hésitent pas à broyer une poignée d'individus dans une machinerie machiavélique parfaitement orchestrée. Si le casting n'est pas des plus prestigieux, les acteurs y gagnent en réalisme. Elliott Gould, James Brolin, OJ Simpson, Sam Waterson et Brenda Vaccaro y interprètent correctement leurs personnages pour traduire tantôt l'héroïsme, tantôt le cynisme des situations. Un film dont l'antipatriotisme absolu est finalement le point fort, car tant il est rare au cinéma de voir un scénario mettant si généreusement le doigt là où ça fait mal dans l'univers démagogique et technocratique dépeint.

Réalisé par Peter Hyams (Outland, La Fin Des Temps), ce thriller mêle habilement enjeux politique et science fiction pour nous dresser le tableau d'une gouvernance comploteuse, n'hésitant pas à annuler une mission de prestige, manipuler l'opinion public tout en tenant la nation en haleine et prêt à sacrifier des vies humaines avec l'appui des services secrets. Le réalisateur n'est pas dans le peloton des meilleurs, mais le fait qu'il fut journaliste au Vietnam pour couvrir les événements sur le terrain lui a donné le temps de vérifier que ce que dit le gouvernement n'est pas toujours ce qui se passe en vérité. Son travail de réalisateur sur Capricorn One bénéficie de cette expérience et il nous livre une dénonciation dans les règles à travers une œuvre désormais considérée comme un grand classique du cinéma américain dont le transfert sur DVD est très propre.

Le transfert MPEG2 est des plus réussis avec une image du DVD très propre et plutôt surprenante en considération de l'âge du film. Les couleurs restent naturelles et bien dosées et les éclairages des nombreuses scènes tournées en studio son cohérents. On retrouve la photographie de Bill Butler (Grease, Rocky II, Rocky III, Rocky IV) et des trucages d'époque qui amusent un peu de nos jours avec notamment des maquettes d'hélicoptères que la restitution DVD de l'image trahit généreusement. Le transfert sur DVD est de bon aloi, loin des ratages granuleux parfois observés sur des filmes de cet âge.

Le film datant des années 70, la bande son n'est disponible qu'en stéréo pour la version originale. C'est d’autant plus rageant qu’aux US une édition spéciale est sortie avec une VO en DD 5.1. Même en stéréo, elle est assurément plus détaillée que la version française, proposée uniquement en mono. Pas de quoi faire vrombir une installation home cinéma au décollage. La partition musicale clairsemée, signée Jerry Goldsmith, est reconnaissable dès les premières mesures et dramatique à souhaits. Elle donne au film un caractère grave et sérieux en faisant la part belle aux cuivres et aux cordes avec une rythmique parfois tribale qui n'est pas sans rappeler la musique du même compositeur pour le film la planète des singes. Dommage que l'équilibrage dialogues/musique soit faussé à cause d'une piste musicale trop présente et saturée. Côté dialogues, on retrouve avec nostalgie les fameuses voix des acteurs de doublage en VF de l'époque (Jacques Balutin, Alain Dorval, etc.).

Assez pauvre en bonus, on remarque l’absence de commentaire audio ou de making of.  Dommage. Le DVD nous propose simplement un film annonce 3’07 et un documentaire « Flights of Fancy : enjeux politiques et paranoïa autour du film Capricorn One » de 17’16 avec les témoignages de Peter Hyams (réalisateur), Steven J.Ross (historien à l’université de Caroline du Sud) et Michael Shermer (éditorialiste scientifique & rédacteur en chef du Skeptic Magazine). Les différents intervenants reviennent sur le scénario du film en faisant le parallèle avec le scepticisme et le cynisme qui a encadré les dernières missions Apollo. A noter un menu des plus désuet et un packaging décevant graphiquement en comparaison avec ce qui s’est fait à l’étranger pour le même film.