La société Muller organise une réception à l’occasion du lancement d’un nouveau produit. Au cours de la soirée, on découvre qu’il s’agit, en réalité d’un exercice de coaching pour les cadres de l’entreprise. Progressivement, les rumeurs sur le rachat prochain de la société vont bon train et chacun se retrouve à tenter de sauver sa place.
Le sujet de la société qui organise un évènement pour cacher un plan de licenciement, n’est pas nouveau, il suffit pour cela de regarder « Que les gros salaires lèvent le doigt », avec Michel Piccolli et Daniel Auteuil, où lors d’un Week-end à la campagne, un PDG organise un jeu de chaises tournantes pour désigner les cadres de son entreprise qu’il va licencier. Ici, le réalisateur Mathias Gokalp (Le tarif de Dieu), met en situation ses personnages en utilisant un scénario croisé. Avec une première scène en forme de vue d’ensemble, puis chacun des éléments détaillés sous forme de chapitres.
Et si l’ensemble a du mal à passionner au départ, il n’en demeure pas moins vite intéressant, pour ne pas dire captivant. Car, la mise en scène froide et distante du départ, devient plus intime avec les personnages, le réalisateur jouant les cartes de la tendresse et du cynisme. Il mène son histoire parfois avec froideur, et parfois avec chaleur, comme en jouant sur les regards effrayés de Mélanie Doutey (RTT) ou de Denis Podalydès (Neuilly sa mère) lorsqu’ils voient leurs mondes vaciller, ou la froideur du jeu de Jean-Pierre Darroussin (Dialogue avec mon jardinier) toujours aussi bon dans le jeu distant.
Et c’est encore de la distribution que vient toute la qualité du film car, si l’histoire ne brille pas forcément par une originalité débordante, elle n’en demeure pas moins portée par ses acteurs. Notamment Denis Podalydès, touchant en cadre de direction, délégué syndical actif, touché au cœur de ses idéaux. L’acteur sait être touchant et parvient, comme toujours, à toucher la sensibilité du public. On pourrait même dire que l’une des plus belles réussite de ce film tient au duo entre Denis Podalydès et Jean-Pierre Darroussin, qui sans jamais marcher dans le surjeux viennent d’un seul coup, par une retenue bien pensée, embarquer le spectateur dans cette aventure.
Et même si le scénario n’évite pas toujours le piège de la grande tirade, parfois un peu mélo, la mise en scène subtile du réalisateur parvient à ressortir toute l’intelligence de cette histoire et cette réflexion sur la bataille permanente des cadres pour garder leur emploi jusqu’au bout et ne pas se laisser dépasser par les nouvelles formes de management, qui se soucient constamment du profits, mais pas assez de l’humain. Ce film à cela de différent de celui de Denys Granier-Deferre, qu’il ne joue pas la carte de l’humour noir ou de l’absurde, mais il utilise les clichés pour mieux faire transpirer la réalité d’un monde du travail, où la productivité prend le pas de l’humanité, et où les cadres sont souvent les grands oubliés des négociations salariales.
En conclusion, « Rien de Personnel » est un film qui amène le débat, et qui y répond avec une justesse de ton de ses comédiens principaux, plutôt bienvenue. Le film souffre malgré tout d’un début un peu austère.