L'adversaire

Nicole Garcia est une cinéaste rare. Après plusieurs années d'absence (en tant que réalisatrice) elle revient avec l'Adversaire, évocation de l'affaire Jean-Claude Romand et adapté du roman éponyme d'Emmanuel Carrière traitant lui aussi du cas.

 

Tous les jours, Jean-Marc Faure part travailler à OMS où son poste est d'importance. Bénéficiant d'avantages fiscaux, il propose même à parents et amis de lui confier leurs économies pour les en faire profiter. En réalité, Jean-Marc Faure n'est pas médecin, il ne travaille pas à l'OMS, il ne travaille même pas du tout. Ses journées, il les passe sur une aire d'autoroute, dans un hôtel, ou même à l'OMS, en tant que simple visiteur. Pour faire vivre sa famille, il utilise l'argent qui lui confie ses amis. De plus en plus, les doutes apparaissent, Jean-Marc Faure est au pied du mur et au bout de son secret.

 

Le film se garde bien de porter quelque jugement que ce soit sur le personnage, il expose des faits, se focalise sur ce qu’était sa vie, son mensonge, sa souffrance et sa solitude au quotidien. Fataliste, le film débute sur un  constat, Jean-Marc Faure (équivalent de Jean-Claude Romand et interprété par un impeccable Daniel Auteuil) rentre chez lui après avoir commis l'irréparable. Durant cette journée il ressassera des souvenirs d'une vie torturée par le mensonge.

 

La cas Jean-Marc Faure

Aussi incroyable que cela paraisse, L'adversaire est inspiré d'un fait divers réel. Au lieu de nous raconter cette histoire à la façon d'un film policier, ou d'un thriller, Nicole Garcia prend le parti(judicieux) du réalisme. C'est la vie, le quotidien, la souffrance, les angoisses et la solitude de Jean-Marc Faure/Jean-Claude Romand auxquels nous assistons. Lent, nostalgique et triste, le film prend des allures fatalistes, les choses sont ce qu'elles sont, les faits sont les faits, reste à comprendre l'inexplicable. Le scénario du film reprend très fidèlement la structure du livre de Emmanuel Carrière, Daniel Auteuil/Jean-Marc Faure est de presque tous les plans et tous le film est basé sur son point de vue.

 

Un aspect psychologique occulté

Un autre partit pris surprenant décidé par Nicole Garcia est le refus de toute explication des motivations du personnage. Pourquoi ment-il depuis tout ce temps? Pourquoi a t-il commencé? Un début de réponse se retrouve malheureusement dans les scènes coupées. Malgré les brillantes qualités du film, on peut tout de même regretter ce manque d'explication.

 

La construction du film est faite sous la forme de flash-back, que ce soit lors des souvenirs que s'évoque le personnage de Daniel Auteuil, ou des interrogatoires de police des ses amis. Cette construction permet aussi au film de se libérer des questions que le spectateur pourrait se poser sur l'issue de l'histoire et de le concentrer sur les faits uniquement.

 

Une affaire d'ambiance

L'immersion est l'une des grandes qualités du film, que ce soit au niveau de la photographie, avec ses tons froids, de la mise en scène, ou jeu des acteurs tout est fait pour que le spectateur ressente une sensation de malaise dès les premières images qui ne le quittera qu'à la fin.

 

Un mot enfin sur la musique, qui est l'un des facteurs essentiels de l'ambiance si particulière du film. Composée par le très talentueux Angelo Badalementi, elle se révèle selon le cas envoûtante, angoissante, mélancolique et triste. Une grande réussite. 

 

En conclusion

Réussite visuelle, doté d'une impeccable réalisation particulièrement adaptée au sujet qu'il traite l'Adversaire est film qui ne déçoit pas. Ses interprètes se révèlent tous parfaits, particulièrement Daniel Auteuil, habité par le personnage, prouve une fois encore qu'il est bien l'un des acteurs français les plus talentueux. Le film n'a pas de défauts majeurs, et pèche uniquement par un manque d'explications. L'adversaire est un film doté d'une ambiance particulière très prenante à côté duquel il serait dommage de passer.

 

 

L'image du film est d'une précision exemplaire, les tons froids de la photographie du film sont très bien rendus. Cependant, si au niveau de la compression il y a peu de choses à reprocher à l'Adversaire, on regrettera les fourmillements trop visibles lors des scènes nocturnes et de certains gros plans.

 

Pour ce qui est des bonus, c'est nettement moins brillant. les scènes coupées sont présentées dans un autre format que celui du film (en 4/3), et leur compression est plutôt médiocre. L'interview de l'expert en psychologie souffre d'un grain omniprésent et très prononcé, la vision en est fortement gênée. 

L'adversaire n'est bien sur pas le film qui mettra à mal votre installation. La piste 5.1 dont bénéficie le film installe avant tout une ambiance. Tout à tour discrète, mettant les dialogues en avant, elle passe à des scènes où vos arrières seront eux aussi sollicités (principalement les scènes où Daniel Auteuil est seul, sur une aire d'autoroute, à l'OMS) ou à d'autres scènes encore où c'est l'excellente et envoûtante musique du compositeur Angelo Badalamenti qui est mise en valeur.



 



 

 

L'adversaire est présenté sur un DVD9 contenant le film et les bonus. Sont donc présents :

 

 

- La bande-annonce : identique à celle projetée en salle (1:32)

 

- Les scènes coupées: au nombre de sept, elles sont présentées en format 4/3 et chacune est introduite par un commentaire écrit de Nicole Garcia. Ces scènes, hormis peut-être celle expliquant l'origine du mensonge, ont été bénéfiquement écartées du film (8:44)

 

- Les filmographies de Daniel Auteuil, Nicole Garcia, Géraldine Pailhas, François Cluzet, Emmanuelle Devos, François Berléant composées chacune de plusieurs écrans

 

- Un album photo du tournage, composé d'une vingtaine de photos, certaines sont commentées par Nicole Garica

 

- Un entretien mené par Michel Ciment réunissant les scénaristes et la réalisatrice du film ainsi que Emmanuel Carrière auteur du livre ayant inspiré le film (18:38)

 

- Un entretien réunissant Nicole Garcia et un expert en psychologie, il s'agit en fait d'une tentative d'explication du fait divers servant de base au film (6:24)

 

Tous ces suppléments s'avèrent intéressants et instructifs, on peut néanmoins regretter qu'ils soient trop peu nombreux.