L’histoire :
Désormais employé de la chaîne Mooby burger, Dante Hicks s’apprête à se marier, un soupçon d’hésitation à l’esprit.
Critique subjective :
Lorsqu’il réalise Clerks (son premier long-métrage) en 1994, Kevin Smith signe un film indépendant à tout petit budget, tourné en noir et blanc, dans lequel il recycle des anecdotes récoltées alors qu’il travaillait comme caissier dans une épicerie du New Jersey. Depuis, le bonhomme a fait du chemin. Réalisateur (citons Dogma et Jay et Bob contre-attaquent, sûrement ses deux films les plus connus du grand public dans l’hexagone), scénariste (il œuvre pour le cinéma, la télévision et le comic book), producteur (il a notamment financé Will Hunting), monteur (sur ses films) et acteur (on l’a vu dernièrement dans Die hard 4), Smith accumule les casquettes et, accessoirement, bénéficie d’un capital de sympathie énorme auprès de toute une frange de la communauté cinéphile. En 2006, le réalisateur surprend son monde en mettant en scène une suite de Clerks (Clerks II) qui survient donc douze années après le titre fondateur de sa filmographie.
Avec ses toutes premières minutes en noir et blanc, cette suite tisse un lien très fort avec le film de 1994. On continue dans ce même esprit en retrouvant Dante Hicks (Brian O’Halloran, fidèle au poste), qui est passé de caissier au Quick stop (emporté par les flammes) à employé de la chaîne de fastfood Mooby’s (« We are eating it »). Dante est toujours flanqué de son fidèle acolyte, Randal (Jeff Anderson rempile) et, non loin de là, on peut apercevoir Jay et Silent Bob (Jason Mewes et Kevin Smith) en train de dealer de l’herbe, adossés à leur mur. Dante est aujourd’hui tiraillé entre sa fiancée (qu’il doit épouser sous peu) et sa patronne, un personnage attachant campé par une nouvelle venue dans la bande de Smith : Rosario Dawson (qui crève l’écran).
Dans Clerks II, on retrouve tout le style de Kevin Smith, son univers. On commence avec des dialogues au cordeau, toujours drôles et parfois très crus. C’est parti pour des diatribes où l’on débat de l’ass-to-mouth ou du mariage et au détour desquelles Smith, en bon réalisateur sevré à la pop culture, fait souvent des clins d’œil à ses pairs, les geeks (références aux Transformers, au Silence des agneaux, comparaison houleuse et hilarante entre les sagas Star Wars et Seigneur des anneaux). Situations trash (Kinky Kelly et son show érotique inter-espèces !), caméos sympathiques (Ben Affleck, Jason Lee) et bande originale qui vous fait taper du pied sont aussi de la partie. Le gros tour de force de Clerks II reste ce mélange parfait entre pertinence du propos (sujets évoqués : l’amitié, la relation amoureuse, les grands tournants de l’existence) et impertinence de la forme (humour transgressif et souvent régressif qui nous fait rire comme des otaries), un art précis dans lequel excelle Kevin Smith.
Verdict :
Si, dans l’absolu, l’entreprise pouvait paraître quelque peu saugrenue, cette suite de Clerks évite tous les écueils et s’impose comme une comédie fort réussie. Dotée de plus de moyens, la « franchise » ne perd pas son âme pour autant (Clerks II conserve un côté film de potes). Un troisième volet dans douze ans ? On vote pour !