La sirène du Mississippi

L'histoire

Louis Mahé est un riche propriétaire d'une plantation de tabac et d'une fabrique de cigarettes établi à la Réunion. Il accueille chez lui Julie Roussel, une jeune fille dont il a fait la connaissance par l'intermédiaire d'une petite annonce publiée dans les rubriques rencontres. Louis tombe immédiatement amoureux de Julie qui ne ressemble en rien à la photo envoyée. Sous prétexte de timidité, Julie avoue avoir fait parvenir celle d'une voisine. Le mariage est rapidement célébré, et le jeune homme accorde toute sa confiance à celle qui, un beau jour s'enfuit, du domicile conjugal avec toute la fortune de Louis. Louis comprend alors que Julie n'est pas celle qu'elle prétend être, et engage un détective pour retrouver celle qu'il soupçonne d'avoir tué la véritable Julie Roussel.

 

 

Critique subjective

Deux ans après "la mariée était en noir", François Truffaut porte à nouveau à l'écran un roman de William Irish alias Cornell Woolrich, l'un des maîtres du "roman noir" américain, dont les œuvres ont inspiré bon nombre de cinéastes. Alfred Hitchcock s'est servi du roman "It had to be a murder" d'Irish pour en faire "Fenêtre sur cour", en 1954. Le réalisateur des "quatre cents coups" n'en est pas à sa première incursion dans le polar, puisqu'il avait déjà tourné "Tirez sur le pianiste", "Vivement dimanche" et "La mariée était en noir", adaptés d'auteurs de la "Série noire".

 

L'ombre d'Alfred Hitchcock plane sur "La sirène du Mississippi". Truffaut, en grand admirateur du maître, dont il tire les leçons, réalise un polar dans lequel on peut sentir les influences du réalisateur de Psychose et de Vertigo, tant dans la mise en scène et la manière de mener son histoire que dans le traitement de ses personnages. Le héros de la "Sirène du Mississippi" est aux prises avec une blonde énigmatique, dont il tombe amoureux, une femme fatale qui n'est pas ce qu'elle prétend être. Abusé par la mystérieuse Marion, qui usurpe l'identité de Julie Roussel, Louis tombe dans le piège de la séduction. Truffaut, par une mise en scène très maîtrisée, donne un rythme soutenu à cette histoire, appuyé par la musique d'Antoine Duhamel. Le réalisateur cultive l'art de l'ellipse, nous emmène, de la Réunion à la métropole, sur les traces de Julie/Marion, après que la belle s'est volatilisée, emportant avec elle la fortune de son mari.

 

"La sirène du Mississippi" en étant un polar, est aussi l'histoire d'amour du couple Louis – Marion, et Truffaut, en se concentrant sur ses deux personnages, explore habilement les sentiments qui unissent les deux amants. Marion, la voleuse, la manipulatrice, qui provoque la déchéance de Louis dont la haine et les espoirs de vengeance disparaissent devant l'amour qu'il porte à cette femme, le conduisant à commettre des actes irréparables. Les sentiments de Louis triomphent et lui font perdre le sens des réalités, celui-ci se lance à corps perdu dans une aventure sans retour. Marion et Louis, c'est le couple Deneuve Belmondo à l'écran, dont la superbe interprétation donne à leurs deux personnages des élans de sincérité. Truffaut retrouvera la comédienne en 1980 pour le tournage du "dernier métro".

 

"La sirène du Mississippi", dédicacé à Jean Renoir mérite toutes les attentions, et s'il n'est pas un élément majeur de la filmographie de François Truffaut, n'en demeure pas moins une excellente réalisation.

A l'heure où beaucoup d'éditeurs font d'énormes efforts pour restaurer de grands classiques du cinéma, et nous proposer une image sans défaut, celle de "La sirène du Mississippi" fait peine à voir. C'est à partir d'un master qui n'est plus de toute première jeunesse que s'est effectué le transfert vidéo. L'image est trop souvent constellée de griffures, taches, points blancs. Le pire exemple se trouve à la cinquantième minute du film, plus exactement à 50'40, lorsque louis attend Marion à son hôtel, caché dans le noir, de superbes bandes vertes déchirent l'écran verticalement au milieu d'un festival de points blancs qui constellent une image aux noirs incertains. Les couleurs sont quant à elles bien souvent trop pâles aux noirs qui manquent singulièrement de profondeur. La grain de la pellicule est très présent dans les scènes aux faibles éclairages, et on note beaucoup de fourmillements dans les arrières plans. Décidément, ce film n'a pas trouvé ici d'édition à sa mesure et aurait mérité un peu plus d'attention.

C'est la bande son d'origine en mono qui est disponible sur ce DVD. Malheureusement, si l'image est de piètre qualité, on peut également reprocher au son d'être d'un niveau plus que moyen. Les dialogues manquent par moments singulièrement de clarté et ne se détachent pas suffisamment de l'ensemble, obligeant à dresser l'oreille pour saisir les voix. Le son subit régulièrement des baisses d'intensité, à tel point qu'il faut attendre un bon quart d'heure avant d'avoir pu trouver un niveau de réglage du volume correct. Là encore, la déception est de taille.

Edition minimaliste, le DVD ne comporte que le film, hormis la bande annonce d'une minute trente en anglais.