En escale à Barranca, petit port bananier d’Amérique du Sud, Bonnie Lee rencontre les pilotes de l’équipe aéropostale de ce lieu hors du temps, où l’on meurt comme on vit : avec bravoure. D’emblée, l’artiste new-yorkaise est subjuguée par le séduisant et intrépide Geoff Carter, qui dirige la compagnie et n’est pas le genre d’homme à laisser des sentiments interférer dans ses missions et dans son monde, où le danger est omniprésent et où tout peut basculer en un instant, au gré du hasard et des tempêtes…
Certains réalisateurs américains ont marqué le cinéma par leur génie et leur capacité à toucher à tout avec une aisance remarquable. Ce fut le cas d’Howard Hawks dont la carrière commence dès 1926, alors qu’il a déjà atteint la trentaine. Lui, qui fut passionné de livres, fit de sa vie un roman avec parfois des arrangements avec la vérité qui ne gâchèrent en rien, ni son talent, ni son sens de la narration. Issue d’une famille aisée, descendant des premiers immigrés qui façonnèrent l’Amérique, Howard Hawks fut considéré pendant longtemps comme le réalisateur de la Morale Américaine. Lui qui a tourné avec les plus grands, peut-être parfois les plus difficiles comme John Wayne (Rio Bravo), Humphrey Bogart (Le Port de L’angoisse), s’amusa toute sa vie à dérouter son public en s’installant là où on ne l’attendait pas. Il réalise une comédie, la fois d’après un western ou encore s’amuse à réaliser le premier film noir de l’histoire d’Hollywood.
Très influencé par le Cinéma de Murnau, très intéressé par ce qui venait d’Europe, Hawks magnifia son art par un éclectisme désarmant, mais jamais pris en défaut. Passionné par l’aviation et avant de se lancer dans des films de propagande, il réalisa en 1939 : « Seuls les anges ont des ailes ». ce film est un hommage du réalisateur aux aviateur de l’Aéropostale, qui mettaient leurs vies en danger pour pouvoir livrer des missives, personnelles ou professionnelles. Inspiré de sa propre expérience, mais également des témoignages d’aviateurs chevronnés, le scénario que le réalisateur a écrit avec son scénariste Jules Furthman (Le Port de l’angoisse) va intégrer tous les thèmes chers à Hawks : Le Courage, la femme conquérante, l’amitié, l’action comme remède à l’absurdité.
Comme à son habitude, Hawks ne renonce pas à son plaisir de mettre un peu d’ambiguïté, mais sa mise en scène, entièrement réalisée en studio (Cela se remarque, avec le temps), est inventive et précise. Chaque arrivée de personnage est pensée afin que le spectateur puisse immédiatement cerner la personnalité, cela se confirme avec Bonnie Lee (Jean Arthur), dont on comprend immédiatement qu’elle fuit une existence et que son personnage sera trouble. Cary Grant (La Mort aux Trousses) apparait quant à lui, en décalage direct avec ses coéquipiers. Eux qui sont habillé avec des couleurs sombres contrastent avec le blanc immaculé qu’arbore Grant. Et puis l’apparition de Rita Hayworth (Gilda) n’est pas sans marquer les esprits, à tel point qu’elle est immédiatement étiquetée : Femme Fatale.
Nous l’aurons bien compris le cinéma d’Howard Hawks n’est pas le fruit du hasard, le réalisateur pense sa mise en scène et chaque élément concourt à donner une vision de son histoire qui viendra défendre les valeurs et les thèmes du réalisateurs. Avec « Seuls les anges ont des ailes », Hawks rend l’un des plus beaux hommages à une corporation qu’il adule et trouve toute la matière pour mettre en avant le talent de ses acteurs. Si les relations ne furent pas au beau fixe entre le réalisateur et l’actrice Jean Arthur (Mr Smith au Sénat), il eut l’intelligence de la mettre aux côtés d’acteurs confirmés qui la tirèrent vers le haut, et il utilisa les réticences de l’actrice pour mieux la mettre en valeur. Même chose avec Rita Hayworth, l’actrice n’est pas encore la star qui fit chavirer les cœurs, mais son passage chez Hawks dans ce film, vont la révéler au grand public et lui ouvrir les portes de la starification.
« Les Invalides », est un passionnant entretien avec Noêl Simsolo qui revient sur les qualités du film d’Howard Hawks.
« Orgueil et Dépendance », Noël Simsolo revient sur la carrière et la personnalité d’Howard Hawks.
Et enfin un livret de 50 pages que nous n’avons pas pu découvrir.