L’histoire
En 1933, l’administration du Président Roosevelt, qui vient de lancer le New Deal, ordonne la construction de plusieurs grands barrages dans le Tennessee où, depuis toujours, de nombreuses crues provoquent d’importantes inondations. Jeune ingénieur,
Chuck Glover (Montgomery Clift) est envoyé sur les lieux afin de persuader
Ella Garth (Jo Van Fleet), une vieille femme, de céder sa terre …
Elia Kazan et l’inspiration des souvenirs
Réalisateur engagé et passionné par les écrivains de son époque, Elia Kazan a également été très marqué par son enfance d’émigré grec au cours de laquelle ses parents et lui ont vécu la période du New Deal, symbole par excellence du rêve américain. D’un voyage dans le Tennessee, au milieu des années 30, Elia Kazan a ramené une certaine fascination pour la nature sauvage de cette région, en même temps qu’un dégout pour la discrimination envers les noirs qui allait à l’encontre de son idéal d’amitié entre les hommes hérité de ses sympathies communistes.
Après avoir écrit pour le théâtre et fondé l’Actor Studio en 1947, Elia Kazan s’est tourné vers la réalisation de film, devenant mondialement célèbre en 1955 avec « East of Eden » (à l’est d’Eden) (Voir la critique du
DVD sur DVDcritique.com), un film qui dévoile le brillant James Dean dont Elia Kazan a su transcrire les émotions avec une touchante sincérité. En 1960, le réalisateur décide de faire un film en s’inspirant de ses souvenirs du Tennessee. Après avoir tenté, sans succès, d’écrire le scénario seul, il se fait aider par Paul Osborn qui s’inspire largement des œuvres de Borden Deal et William Bradford Huie. Mais la trame et les idées développées sont bien de Kazan !
Le rêve américain
Fidèle à ses thèmes fétiches, Elia Kazan développe ici sa vision du rêve américain. Fasciné par la volonté de progrès affichée par Franklin Roosevelt avec son New Deal, le réalisateur oppose ici un jeune agent du gouvernement, incarné par un Montgomery Clift fragile et ‘civilisé’, à une vieille femme attachée à sa petite île qui sera bientôt submergée par les eaux du barrage. Tout au long du film, le réalisateur hésite à prendre véritablement le parti de la modernité face à un attachement à la nature qui le fascine également.
En revanche, il développe bien la passion qui va se nouer entre un Montgomery Clift complexé et sensible (à la vie comme à l’écran à la suite d’un terrible accident de voiture en 1957 dont il se remet difficilement) et une femme forte et passionnée, brillement incarnée par Lee Remick. Elia Kazan évoque aussi de façon particulièrement marquante la ségrégation des noirs et cette mentalité du Sud des Etats-Unis dont les habitants ont oublié (volontairement) la raison de la guerre de Sécession.
Critique subjective
Malgré ces thèmes assez forts, ce film est loin d’être le meilleur de Kazan. Certaines parties du montage sont un peu maladroites, comme la scène du relogement de la vieille dame qui semble vraiment de trop. On regrette aussi la trop grande passivité de Montgomery Clift à certains moments du film (face aux émeutiers par exemple). « le fleuve sauvage » est donc largement en dessous de « A l’Est d’Eden », mais reste
toute de même un film agréable qui donne une image assez réaliste d’une certaine Amérique, raciste, arrogante et intolérants qui trouve des reflets bien inquiétants dans l’actualité récente !