Breakfast on Pluto

Patrick « Kitten » Braden, a quitté son Irlande natale en quête d’une nouvelle vie dans le tourbillon Londonien des années 70 En quête d’identité sexuelle, il devient travesti et côtoie le monde haut en couleur de la prostitution. Au grès de ses errances et de ses rencontres, « Kitten » va rapidement se trouver mêler à un complot de l’IRA visant la capitale Britannique.

On le savait déjà depuis « 28 jours plus tard » du réalisateur Danny Boyle, mais Cillian Murphy est un comédien hors norme sur qui il va falloir compter. Acteur caméléon, il nous offre une composition tout en douceur et en nuance de son personnage de travestie insolite.

Avec une aisance incroyable et une facilité déconcertante, il parvient à nous entraîner dans l’ambiguïté de son personnage. Et justement l’ambiguïté ne semble pas être uniquement sexuelle et physique, elle touche aussi le mental du personnage, car « Kitten » devient en quelques minutes le symbole même de l’Irlande et de sa lutte armée. Car sa recherche d’identité dans un monde qui le rejette, s’apparente aisément à celle de l’Irlande des années 70, opprimées et blessée de ne pas être reconnue. La marginalisation de « Kitten » devient celle de l’Irlande, et les rencontres du jeune homme ne font qu’accroître ce rapport tant les personnages s’approchent, se sourient, mais jamais ne se lient. Les seuls liens que finit par tisser « Kitten », sont ceux qui le mèneront au terrorisme.

C’est aussi la meilleure idée de Neil Jordan (Mona Lisa, Entretient avec un vampire). En unissant le destin du jeune Kitten à celui de l’Irlande, le réalisateur renforce son discours sur la lutte de ce pays pour sa reconnaissance. Sans jamais excuser le terrorisme, il en donne une explication sans concession. Celle d’un peuple blessé d’une appartenance à un pays qui ne le comprend pas et le laisse à l’abandon. Le combat intérieur de Kitten pour ne jamais se plier à l’ironie des autres, ressemble à s’y méprendre à celui de cette petite île voisine d’une géante qui semble l’oublier souvent.

« Breakfast on Pluto », aurait pu être une œuvre sombre et oppressante, elle n’en ai rien, et c’est la deuxième meilleure idée de Neil Jordan. Pour amener son discours sur un terrain pacifique, il choisit de nous présenter des personnages hauts en couleurs, à la poésie saisissante, mais à l’obscurité intérieure indéniable. Patrick Braden en tête, travers le film de bout en bout avec une insouciance et un décalage qui donne le vertige. Avec une voix faussement féminine, il contraste forcément avec l’univers glauque et sombre de la prostitution. Mais bien plus qu’un contraste, l’ensemble des personnages devient autant d’aphorismes que d’hymnes aux droits à la différence.

En conclusion, un film d’une grande poésie, mais qui cache une véritable réflexion sur les rapports entre l’Irlande et l’angleterre. On en retiendra un très bel exemple de maîtrise et une composition hors du commun de l’acteur principal.

Une belle image, bien que quelque peu granuleuse. Les couleurs un peu fades de l’Angleterre des années 70, ne se prêtant pas à l’euphorie, ce petit défaut est très facilement remarquable et parfois même dommageable. A part ça, pas de quoi fouetter une grand-mère avec des orties.

De bonne qualité, le son souffre surtout d’un doublage français en dessous de la prestation des acteurs originaux. La piste sonore 5.1 reste suffisamment efficace pour nous offrir une immersion totale dans ce film en décalage totale avec la production actuelle.

Un making of intéressant sur le travail du réalisateur, mais aussi de toute son équipe, nous permettant ainsi de mieux cerner le cheminement de Neil Jordan, pour créer son histoire. Puis une interview passionnante de Cillian Murphy, où il nous explique comment il a créé son personnage de Patrick « Kitten » Braden. Des scènes coupées, et enfin pour finir une galerie de photos.