WEST SIDE STORY raconte l’histoire légendaire d’un amour naissant sur fond de rixes entre bandes rivales dans le New York de 1957.
Il y a toujours quelque chose de fascinant dans le cinéma de Steven Spielberg, que ce soit dans ses succès ou dans ses échecs, c’est la maestria permanente et l’audace visuelle dont le réalisateur ne cesse de faire preuve, sans jamais se délaisser de l’humanité qui nait toujours de son œuvre. En adaptant « West Side Story », le réalisateur se heurtait à un obstacle de taille / Faire oublier la précédente version cinématographique signée Robert Wise et ses 10 Oscars. Était-ce le signe d’un échec inévitable ? Pas si sûr ! Car si l’adaptation de Spielberg fut un échec cuisant lors de sa sortie (Un échec que l’on peut attribuer à la conjoncture sanitaire et à la concurrence féroce de « Spider-man No Way Home »), il n’en demeure pas moins une œuvre foisonnante de bonnes idées, d’audace visuelle et de maitrise d’un maitre du cinéma qui n’a de cesse de nous étonner.
Pour sa version de ce monument du « Musical », Spielberg a d’abord cherché avant tout à coller au plus près à l’histoire de la ville, de ses quartiers et particulièrement ces quartiers touchant l’Upper West Side : Lincoln Square et San Juan Hill. Deux quartiers dans lesquels évoluaient les descendants des immigrés qui forgèrent l’Amérique. D’un côté les descendants d’émigré venus d’Europe, de l’autre une communauté Portoricaine, souvent mise aux bancs de la société. Jusqu’en 1950, date à laquelle Robert Moses, Commissaires aux Travaux Publics de New-Yok, décida de raser ces deux quartiers, ces deux communautés se voisinaient mais pas forcément en bonne amitié. La destruction du quartier exacerba les tensions et finit par chasser les habitants. La mise en scène de Steven Spielberg prend le parti pris de resituer dans son contexte géopolitique l’action de la comédie musicale, créant ainsi encore plus de tensions dans ces combats que se mènent les deux gangs.
Passionné et inventif, le réalisateur offre des moments de grâce absolu en jouant des ombres, des lumières et des silhouettes, comme cette incroyable scène (Déjà présente dans la bande annonce) où les deux gangs se retrouvent dans un hangar en face à face et où les ombres se transforment sous nos yeux en lames tranchantes qui vont s’entrechoquer silencieusement. Dans ce « Roméo et Juliette » tragique, les drames et les incompréhensions ne sont jamais loin et c’est ce que Spielberg va chercher, va illustrer avec brio, comme lorsque Bernardo va tuer Riff et que tout logiquement prendre une tournure beaucoup plus tragique. Spielberg cherche avant tout à renouveler et à ouvrir la comédie musicale sur son message premier. Il va d’ailleurs pousser justement le curseur en tournant à New-York et en engageant un casting entièrement Latino-Américains pour incarner les Sharks. Une cohérence payante qui permet également de retrouver Rita Moreno, déjà présente dans le rôle d’Anita dans la version de 1961.
Pour donner également une texture bien particulière à sa version, le réalisateur s’est adjoint les services du chorégraphe Justin Peck (Red Sparrow). Ce dernier a décidé en collaboration avec Spielberg de créer intégralement de nouvelles chorégraphies qui puisse immerger complètement les interprètes dans leurs personnages et surtout dans la signification des chansons. Visuellement époustouflante, l’association du réalisateur et du chorégraphe donne des scènes d’une beauté et d’une énergie renversante qui feraient pâlir les plus grands scénographes de la scène New-Yorkaise. A l’instar de « Dance on the Gym » qui nécessita 60 danseurs, plus de 150 figurants et une Spidercam (Caméra suspendue avec des cables), les scènes musicales se succèdent, chaque fois plus inventives, plus spectaculaires, sans jamais oublier le but premier qui est de mettre en valeur et en scène cette histoire dramatique, « Roméo et Juliette » moderne, qui n’a jamais parue si contemporaine.