L'histoire :
Fidèle envers son sauveur Han-tao (Lo Lieh), la belle et intrépide Hsia Yu-yen alias “L’Hirondelle d’Or” (Cheng Pei-pei), voit sa paisible vie rapidement troublée par une série de meurtres où tout semble l’accuser. Le véritable assassin, qui ne s’acharne que sur les brigands, n’est autre que l’impitoyable et haineux Hsiao-peng, surnommé “Phénix d’Argent” (Jimmy Wang Yu). Mais par ses actes de barbarie, ce dernier cherche, en fait, à attirer l’attention de celle qu’il aime…
Critique subjective :
Après Trio magnifique(1966),
Frères de sang(1973),
2 Héros (1974), Wilde Side Video continue à nous gâter avec une version restaurée du film Le retour de l’hirondelle d’or (1968) réalisé par Cheh Chang. On retrouve Pei-pei Cheng l’héroïne de L’hirondelle d’or et de Les griffes de jade (1968) qui reprend du service mais en laissant la vedette à Jimmy Wang Yu (Un seul bras les tua tous) et Lo Lieh (La main de fer).
Wang Yu est réalisateur et acteur né en 1943 à Shanghai. Il a démarré sa carrière avec Chang Cheh qui le fera tourner notamment Un seul bras les tua tous (The one-armed sworsdman, 1967) mais les deux hommes se sépareront. C’est durant cette période que Jimmy Wang Yu part en Corée et tourne The Chinese Boxer (Karaté à mort pour une poignée de soja, 1970) puis le délirant
One Armed Boxer (Le Roi Du Kung Fu, 1971) et un film plus dans la veine des 7 samouraïs de Kurosawa
The Beach Of War-Gods (Le Dieu De La Guerre, 1973). Son destin a été un temps lié à celui de Chang Cheh et les deux hommes renoueront des contacts plus cordiaux plus tard quand il interprétera le rôle du truand "Black Hat" dans Shangaï 13 (1984).
Le destin de Chang cheh est lié au cinéma de Hong Kong. Né en Chine, d'où il avait gagné Taïwan dans les années 1940, Chang Cheh s'était établi à Hong Kong pour y devenir metteur en scène, après avoir débuté en tant que scénariste aux studios de la Shaw Brothers. Il a joué un rôle moteur dans le cinéma Hong-Kongais du Wu Xia Pian et du Kung Fu Pian qu’il a contribué à fonder. Chang Cheh conserve une grande importance dans le cinéma HK et mondiale car il est le père de deux genres essentiels du cinéma d'arts martiaux ; le wu xia pian (film de sabre) nouvelle manière (dont Tigre et dragon est un avatar) et le kung-Fu Pian (film d’arts martiaux) de Shaolin (réactualisé plus tard par Jet Li).
Son cinéma se caractérise par un usage fasciné et érotique du sang, par la place réduite des femmes qu’il met à l’écart du Wu Xia Pian traditionnel (contrairement aux films de son contemporain King Hu), et par le thème fréquent de l'amitié virile. Son film qui reste un des plus connus et peut-être le plus emblématique rétrospectivement est
La rage du tigre (critique cinéma, 1977).
Suite au succès de L’Hirondelle d’or(1966) de King Hu, Chang Cheh décide d’en reprendre l’héroïne pour l’intégrer à son univers viril et violent, popularisé un an plus tôt par le film Un seul bras les tua tous(1967).
Cependant, si ce croisement improbable aboutit à une des plus grandes réussites du film de sabre, le tournage du Retour de l’hirondelle d’or ne s’est pourtant pas déroulé dans des conditions idylliques. En effet, comme l’explique Cheng Pei-pei dans le documentaire exclusif « Cheng Pei-pei vs Chang Cheh » en bonus, les acteurs masculins vedettes avaient des horaires de travail plus souples et elle a du faire valoir ses compétences d’actrice professionnelle capable d’effectuer certaines cascades que l’approche misogyne de Chang Cheh voulait lui dissuader d’exécuter. Ce documentaire décrit également l’univers du tournage de ce chef-d’œuvre épique et flamboyant aux chorégraphies réglées par Liu Chia-liang (La 36eme chambre de Shaolin) et Tang Chia (Le sabre infernal).
Bien que Le retour de l’hirondelle d’or soit réalisé deux ans après le trio magnifique, le montage final comporte quelques maladresses. On constate avec amusement certains raccords un peu décalés par exemple à la 30 ème minute. Hu revient en titubant et l’hirondelle d’or continue de sourire comme si de rien n’était et qu’elle ne voyait la blessure ensanglantée qu’au dernier moment. Le film est cependant plus aboutit que Trio magnifique ou 2 héros. Le personnage masculin interprété par Jimmy Wang Yu révèle une psychologie assez complexe tandis qu’une relation assez fusionnelle et conflictuelle se dessine entre son personnage et celui de Pei-pei Cheng.
Il n’en reste pas moins vrai que le combat final est assez ahurissant puisque l’on voit le héros masculin affronté de nombreux ennemis ce qui n’est pas nouveau chez Chang Cheh mais surtout recevoir et supporter un nombre importants de mutilations et de blessures avant de finir en plusieurs morceaux aux quatre coins de l'écran. On retrouve là la fascination érotisée de Chang Cheh pour le sang. Le personnage masculin semble ne pouvoir accepter l’amour que venant d’une femme au moeurs légère, une prostituée en somme tandis que son amour pour Pei-pei Chang apparaît comme insurmontable.
Et surtout on retrouve ce goût immodéré pour l’honneur qui conduit les personnages à ce sacrifier comme un jeune garçon qui est accusé à dessein d’avoir manger une oie afin de faire pression sur son père. Le jeune garçon préfère ce planter un sabre dans le ventre afin de bien faire voir qu’il n’y a pas de trace de l’oie dans son estomac ce qui bien sur prend une tournure tout à fait tragique jusqu’à entraîner la mort du père et le début d’un chagrin infini de la mère.
Verdict :
Une fois de plus Wilde Side Video nous propose un des films de la Shaw Brothers dans une édition impeccable sur le plan technique. C’est l’occasion de se replonger dans ce cinéma de Chang Cheh, avec un film qui expose son obsession immodérée pour les affrontements qui finissent souvent par la mort dans d’atroces souffrances. On regrettera que les talents de Pei-pei Cheng n’ait pas été plus sollicités par Chang Cheh mais on se réjouira que Ang Lee l’ait rappelé pour servir le casting de Tigre et dragon (2000) en interprétant le personnage de La Hyène.