L'histoire :
#DVD 1 : Un seul bras les tua tous :(The One Armed Swordsman - 1967- 92 mn)
Réalisé par Chang Cheh - Avec Jimmy Wang Yu, Ku Feng, Tien Feng
Fils de serviteur, Fang Gang est élevé par les valeureux suite à la mort de son père. Devenu un combattant hors-pair, Fang Gang s'apprête à succéder à son maître, qui durant 13 ans l'a élevé comme son propre fils. Une situation qui éveille la jalousie de la fille de Ru-feng, qui provoque Gang en duel avant de lui trancher le bras par traîtrise.
#DVD 2 : Le bras de la vengeance :(The Return Of The One Armed Swordsman - 1968 - 102 mn)
Réalisé par Chang Cheh - Avec Jimmy Wang Yu, Chiao Chiao, Liu Chia-liang
Le fermier Fang Gang, anciennement surnommé le "sabreur manchot", est convié à un tournoi d'arts martiaux. Ayant promis à sa femme Xiao-man de ne plus se battre, il décline l'invitation. Il se rend alors compte très vite, que la proposition était plutôt un ultimatum ...
#DVD 3 : La rage du tigre :(The New One-Armed Swordsman - 1971- 84 mn)
Réalisé par Chang Cheh - Avec David Chiang, Ku Feng, Ti Lung, Li Ching
Dans une chine ensanglantée par la guerre des clans, Lei Li est accusé à tort du vol du trésor du clan du tigre, suite à une rumeur lancée par le fourbe Lung. Attaqué par le tigre et ses hommes, Lei Li en vient à bout avec facilité. Mais Lung, que tous prennent pour un sage, surgit, et propose à Lei Li un combat, dont l'issue décidera, ou pas, de son innocence. Le vaincu devra se trancher le bras ... Lei Li accepte, mais Lung sera le vainqueur, grâce à une arme truquée.
Critique subjective :
Après
Trio magnifique (1966),
Frères de sang (1973),
2 Héros (1974),
Le retour de l’hirondelle d’or (1968), Griffes de Jade (1968) Wilde Side Video poursuit son entreprise de réédition des films de
Chang Cheh.
L'éditeur Wild Side Video a prévu de sortir près de 50 titres de la Shaw Brothers entre 2004 et 2006 en version restaurée pour notre plus grand plaisir.
Cette fois l’éditeur fait fort en proposant à la vente à la fois un double DVD collector du cultissime La rage du tigre (1971) et un coffret pour la trilogie du sabreur manchot tandis que wild Side film a supervisé la ressortie au cinéma de
La Rage du Tigre début 2005. La trilogie comprend les deux premiers volets de la trilogie interprétés par l’acteur
Jimmy Wang Yu, Un seul bras les tua tous (1967) et Le bras de la vengeance (1968) ainsi que le troisième et ultime volet La rage du tigre (1971) avec David Chiang dans le rôle du sabreur manchot. La trilogie du sabreur manchot avec la rage du tigre et Un seul bras les tua tous ( dont la chorégraphie de Liu Chia-liang (La 36ème chambre de shaolin) et Tang Chia (Le sabre infernal)) s’impose comme la référence ultime du film de sabre de
Quentin Tarantino qui a rendu hommage à Chang Cheh comme de nombreux réalisateurs actuels dont
John Woo (Hand of death, 1976),
Daniel Lee (
Frères de sang (1994) qui est une sorte de mise à jour expérimentale de l’œuvre de Chang Cheh ou
Tsui Hark (The Blade 1996)).
La trilogie du sabreur manchot occupe une place particulière dans la filmographie de Chang Cheh, dans la production cinématographique de Hong-Kong et la culture cinéphile en général. Chang Cheh conserve une grande importance dans le cinéma Hongkongais et mondiale car il est le père de deux genres essentiels du cinéma d'arts martiaux : le Wu Xia Pian (film de sabre) nouvelle manière (dont Tigre et dragon est un avatar) et le kung-Fu Pian (film d’arts martiaux) de Shaolin (réactualisé plus tard par
Jet Li).
Chang Cheh est un réalisateur dont on peut voir l’évolution à chaque nouveau film. Il ne cesse de s’améliorer au court de sa carrière ce qui se voit si on compare
Trio magnifique (1966) où les coups de caméra sont assez rudes et les raccords quelques fois foireux aux trois films de la trilogie qui sont nettement plus maîtrisés.
Les deux premiers volets de la trilogie (Un seul bras les tua tous (1967) qui a été un énorme succès et Le bras de la vengeance (1968)) présentent une certaine cohérence car la collaboration entre Chang Cheh et Jimmy Wang Yu avait pu se maintenir. Le troisième volet intervient plus tard alors que les deux hommes sont déjà brouillés et Chang Cheh propose un nouveau sabreur manchot comme l’indique clairement le titre anglais (The new one-armed swordman). Ce nouveau sabreur manchot sera incarné par David Chiang qui impose un visage un peu moins macho du sabreur manchot peut-être à cause de ses airs plus doux de jeune premier.
D’un point de vue formel on remarque immédiatement l’étrange choix musical opéré pour la rage du tigre et cette trouvaille qui consiste à utiliser un pont presque aérien comme lieu de l’affrontement ultime entre le sabreur et ses ennemis.
Rétrospectivement il est fort possible que la rupture rentre Chang Cheh et Jimmy Wang Yu ait permis de clôturer la trilogie avec une réalisation plus intéressante que si il ne s’était agit que d’une séquelle de plus.
La rage du tigre est en quelque sorte une hyperbole du sabreur manchot des deux premiers volets. Certes, le sabreur manchot n’utilise plus un sabre cassé ce qui est déjà très gros et rajoute à la dimension extravagante du combattant mais il doit comme pour compenser le double handicap du seul bras et du demi sabre infernal, se battre contre un ennemis qui maîtrise une technique qui neutralise la technique des deux sabres et nécessiterait d’avoir trois bras. Là encore le sabreur qui s’avère aussi torturé moralement qu’il est cérébral trouve une solution inédite et encore plus faramineuse que l’apprentissage d’une technique transmisse par un livre comme c’est le cas dans Le Bras de la vengeance.
Il extrapole une solution à partir d’une expérience de sa vie quotidienne et comprend qu’à défaut d’avoir trois bras, il lui faut trois sabres ce qui conduit au combat final extravagant de La rage du tigre.
La surenchère dans ce film atteint des sommets dans la trilogie à la fois par l’énormité des combats qui confère au sabreur une capacité de vaincre hors du commun et parce qu’il doit affronter de très nombreux combattants et vaincre Lung qui maîtrise une dangereuse technique de combat que même le très brillant justicier incarné par Ti Lung ne pourra vaincre avec ses deux bras. La technique de combat change également pour le sabreur qui manie désormais la technique des doubles sabres au lieu de la technique du sabre d’or simple. L’autre particularité de ce troisième volet et de montrer des personnages qui effectuent des déplacements très aériens qui peuvent nous sembler très courants aujourd’hui mais ne l’étaient pas autant à l’époque d’autant qu’il ne s’agit pas d’une kung Fu comédie (genre que l’on considère être né vers 1975 avec Spiritual Boxer du réalisateur Liu Chia-liang) où toutes les fantaisies sont permises. On note également la présence de chevaux lors de certaines scènes auxquelles un thème musical assez étonnant (son de synthé et roulement de tambour) donne une couleur western.
L'extravagance de La rage du Tigre (1971) survient la même année que celle de Du boxeur manchot(1971), un cross-over entre Un seul bras les tua tous et le boxeur chinois (The Chinese Boxer) réalisé par Jimmy Wang Yu de son côté. Le boxeur manchot reprend le principe du deuxième volet de la trilogie de Chang cheh, Le Bras de la vengeance et montre Tienlung affrontant seul et avec un seul bras une armée de 8 spécialistes des arts martiaux de l'Asie non chinoise ce qui rappelle les huit maîtres que doit affronter Fang Gang dans Le bras de la vengeance : 'Le Roi Furtif' (Tien Feng), 'Hercule' (Ku Feng), 'Dragon Venimeux' (Tung Li), 'Le Maître des Roues' (Tang Chia), 'Le Combattant Volant' (Yuen Cheung-yan), 'Le Dieu de l’Enfer' (Liu Chia-yung), 'Bras de Singe' (Liu Chia-liang) et 'La Dame aux Mille Mains' (Essie Lin Chia). Ce deuxième volet particulièrement rythmé, réserve beaucoup d’action et l’on y aperçoit notamment les jeunes Ti Lung et David Chiang, qui deux ans plus tard, seront en vedette de La rage du tigre, le dernier volet de la trilogie du Sabreur Manchot.
Chang Cheh reprend dans la trilogie plusieurs des thèmes qui lui sont chers comme les coups de sabre portés au ventre que certains auteurs ont pu interpréter comme une forme de césarienne masculine. La mort du combattant interprété par Ti Lung dans la rage du tigre rappelle celle de Jimmy Wang Yu à la fin de Le retour de l’hirondelle d’or où le combattant reçoit un nombre importants de mutilations et de blessures avant de finir en plusieurs morceaux aux quatre coins de l'écran. L’hémoglobine est toujours aussi présente, le sang giclant aussi vite que le sabre frappe.
Verdict :
Une fois de plus, Wild Side Video livre une édition DVD parfaite pour une trilogie magistrale, ultime et fascinante du grand Chang Cheh. Du sabreur Manchot incarné par Jimmy Wang Yu à celui de David Chiang, Chang Cheh livre un univers sanglant où le héro affronte ses propres démons afin de vaincre ses ennemis. Le désir absolu de vengeance surpasse les handicaps que le réalisateur s’ingénie à sublimer en trouvant des solutions aussi originales que spectaculaires. Une fulgurance armée d’un sabre.