L’histoire d’un homme qui osa braver la puissance de tout un empire. Ridley Scott nous offre une nouvelle vision de l’histoire de Moïse, leader insoumis qui défia le pharaon Ramsès, entraînant 600 000 esclaves dans un périple grandiose pour fuir l’Egypte et échapper au terrible cycle des dix plaies.
Depuis un certain temps Ridley Scott s’est spécialisé dans un style : « Celui de susciter l’envie avec des projets toujours plus ambitieux ». Mais seulement le résultat, s’il engrange des bénéfices conséquents, n’est pourtant pas toujours à la hauteur de l’attente. Ce fut le cas avec « Robin des Bois » qui s’avérait l’histoire de celui qui allait devenir la légende, ou encore « Prometheus » et son histoire sans relief et ses personnages sans grand intérêt. Pour « Exodus : Gods and Kings », le réalisateur décide de s’attaquer au mythe de Moïse. Alors bien sûr, on connait le goût pour le réalisateur de plonger le spectateur au cœur de scènes spectaculaires et de ce côté-là on n’est pas déçu ! On en prend plein les mirettes. Et les bonnes idées sont évidemment la séparation de la mer, dont l’ingéniosité se laisse découvrir, ou encore les dix plaies d’Egypte dont la mise en scène est chaque fois plus inventive.
Mais si la mise en scène de Ridley Scott est toujours aussi précise avec des placements de caméras minutieux pour plonger littéralement le spectateur au cœur de la bataille, le traitement des personnages reste assez léger notamment l’ensemble des personnages secondaires comme Josué ou Noun dont la transparence n’a d’égale que l’eau du Nil elle-même. Ceux qui sont normalement les piliers du mythe, qui vont le soutenir durant toute sa transformation deviennent des apparitions occasionnelles sans aucune force ni aucun volume. On peut faire le même constat avec Ramsès, dont on imagine parfois qu’il va se lancer dans un slam endiablé. Le pauvre ne parle que par bout de phrases toutes aussi convenues les unes que les autres sans jamais avoir ni la force, ni le charisme que l’on attendait d’un tel pharaon. Alors il ne reste plus que Moïse, mais là aussi le compte n’y est pas ! Car si la prestation de Christian Bale reste impressionnante, il lui manque tout de même une certaine cohérence.
Car Ridley Scott a aussi revu l’histoire pour qu’elle corresponde un peu plus à une vulgarisation du mythe. Ainsi Moïse tue un garde pour assurer sa fuite, pas pour sauver un pauvre homme en train d’être fouetté, plus de bâton de Dieu mais une épée offerte par Ramsès, ce n’est plus Moïse qui parle et ordonne aux éléments de se déchaîner mais à Dieu lui-même. Du coup le prophète devient un simple personnage manquant terriblement de consistance, au point que l’on a du mal à croire qu’il ait pu être suivit par 400 000 esclaves en manque de liberté. D’ailleurs c’est certainement là la faiblesse du scénario et de la mise en scène de Ridley Scott. A vouloir tout condenser, s’éloigner du mythe et par la même occasion de l’œuvre marquante de Cecil B. DeMille (Les Dix commandements), le sujet est traité trop rapidement comme un catalogue de ce qui peut se faire. Les dix plaies d’Egypte s’enchaînent sans réellement de liaisons, les rencontre entre Moïse et Ramsès sont réduits à peau de chagrin, au point de nous donner l’impression que le réalisateur voulait se faire plaisir en mettant en scène la traversée de la mer rouge, mais qu’il en a oublié le reste de l’histoire.
En conclusion, une fois encore, Ridley Scott suscite l’envie, et nous en met pleins les yeux avec des scènes de batailles dantesques, ou encore des effets spéciaux monumentaux et parfois de bonnes idées dans la narration, mais la pauvreté des personnages et l’inexistence d’une trame narrative solide, font de ce nouveau film : « Exodus : Gods & Kings », une œuvre fade, où tout est traité comme sur le tapis d’un supermarché : trop vite, trop léger et bourré de remplissage maladroit. Même les acteurs ne parviennent pas à trouve leur marque : Christian Bale donne le meilleur de lui-même (et cela se voit) mais ne suffit pas, Aaron Paul (la star de la série Breaking Bad) se retrouve à jouer un Josué vidé de toute substance, même chose pour Ben Kingsley et un constat encore plus difficile pour Joel Edgerton (Gatsby le Magnifique) tout juste inexistant et impuissant.