L’histoire :
Victime d’un coup monté, l’ancien tireur d’élite Bob Lee Swagger va chercher à se venger de ceux qui l’ont trahi.
Critique subjective :
Au moment où l’on s’apprête à visionner un film estampillé Antoine Fuqua, on craint toujours le pire. Il faut dire que la filmographie du monsieur n’est guère reluisante : Un tueur pour cible (résumé : « Je n’ai rien compris au cinéma d’action de Hong Kong »), Training day (piteuse copie des polars urbains nerveux des seventies), Les larmes du soleil (film de guerre vaseux), Le roi Arthur (ou quand le Moyen-Âge rencontre le clip). Bref, pas le genre de titres qui nous font attendre la suite avec impatience. Des films à la tonalité souvent beauf et à la réalisation invariablement pauvre (chez Fuqua, la mise en scène est purement démonstrative et le plan se retrouve souvent dénué de sens). Avec Shooter (2007), la surprise est d’autant plus conséquente qu’elle s’avère agréable. Tout à fait regardable, le résultat tient presque du miracle.
Lâché par son commandement lors d’une mission officieuse en Ethiopie et témoin de la mort de son compagnon d’armes, le sniper Bob Lee Swagger (Marky Mark, le muscle saillant et le visage grave) a plaqué l’armée américaine. Vivant en ermite dans les sommets enneigés du Montana, il accepte néanmoins de rempiler pour une dernière mission : aider à déjouer un projet d’assassinat visant le Président. Trahi (ça devient une habitude), notre tireur d’élite se retrouve alors au coeur d’un coup monté dans lequel il occupe la position ingrate de bouc émissaire. S’ensuivra une chasse à l’homme effrénée, Swagger étant traqué par toutes les autorités du pays. Ce pitch vous rappelle vaguement quelque chose ? C’est normal, Shooter essaie de surfer sur le succès de la sage Jason Bourne et a pour ambition d’en livrer une variation bourrine.
Le dernier film d’Antoine Fuqua s’ouvre sur une séquence de tir embusqué au cours de laquelle le personnage principal inflige de lourdes pertes aux forces ennemies (headshots à foison). Tout est dit. Point de tromperie sur la marchandise, on en a pour son argent. Spectacle populaire, Shooter est un film d’action qui va droit au but. Si l’on pourra toujours pinailler sur les grosses incohérences narratives (soldat d’élite, Swagger se fait piéger comme un bleu puis, à moitié mort, parvient à semer tous les hommes lancés à ses trousses) et s’offenser du style « publicitaire » de Fuqua (moins mauvais que d’habitude, le réalisateur ne nous épargne cependant pas ses mouvements d’appareil satisfaits et son montage hyper découpé), force est de constater que Shooter remplit néanmoins son cahier des charges. Le rythme est soutenu (presque aucun temps mort) et les péripéties s’enchaînent convenablement. Vous vouliez de l’action ? On vous en donne. A l’arrivée, le plaisir, fusse-t-il un tantinet coupable, est bel et bien présent.
S’il y a un gros reproche que l’on peut adresser à Shooter, c’est de s’être aventuré sur un terrain glissant en ayant voulu se poser comme un film à message (Fuqua cinéaste engagé, on en rit encore). On déplore ainsi un sous texte trop appuyé et, plus encore, de multiples références explicites au second conflit en Irak. Pendant les trois quarts du film, on nous martèle que la guerre ce n’est pas joli et que sacrifier des soldats pour satisfaire les intérêts économiques de quelques gros consortium, c’est encore plus vilain. Puis vient la conclusion du métrage et sa grosse morale réactionnaire qui contredit les thématiques développées en amont. On relèvera notamment ce passage pro-NRA où les personnages regrettent ouvertement le bon vieux temps du Far West, cette époque bénie où la justice se faisait avec des fusils (Charlton Heston et John Milius ont dû apprécier …). Allez, on excusera ce faux-pas, même s’il faut bien convenir qu’il est de taille.
Verdict :
Seule bonne surprise de la filmographie d’Antoine Fuqua (c’est indéniablement son meilleur film à ce jour), Shooter s’impose comme un actioner réjouissant pour peu que l’on prenne soin de mettre son cerveau de côté avant le visionnage.
- Commentaire audio du réalisateur Antoine Fuqua : Si Fuqua s’étend sur les conditions de tournage et le scénario du film, il se montre malheureusement assez évasif sur les aspects de pure mise en scène. A noter qu’en bon réalisateur commercial, il ne tarit pas d’éloges sur tout le monde (un peu plus et sa boulangère y passait).
- Le making of : la survie du plus fort (22 minutes) : Quelques propos sans grand intérêt sur le roman à l’origine du film, les personnages et les conditions de tournage. On retiendra, en revanche, des informations très intéressantes sur le tir à longue distance et le métier de sniper.
- Independance hall (7 minutes) : Présentation du lieu historique où a été tournée la scène de l’assassinat.
- Scènes coupées (11 minutes) : Une dizaine de scènes coupées qui n’apportent que quelques développements anecdotiques à des passages déjà existants pour la plupart.